Yves Saint Laurent – biopic
Yves Saint Laurent De Jalil Lespert Avec Pierre Niney, Guillaume Gallienne, Charlotte Le Bon, Laura Smet, Marie de Villepin et Ruben Alves Durée : 100 min. |
Sortie le 8 janvier 2014
Jalil Lespert s’offre deux sociétaires du Français pour retracer le destin hors normes du révolutionnaire créateur de mode qui drapa les femmes dans des costumes d’hommes. Un film lumineux, tendre et cruel rehaussé d’un casting de rêve. Passionné de dessins et croquis vestimentaires, Yves Mathieu Saint-Laurent, à la mort de Christian Dior, reprend en main la célèbre maison de couture. Il n’a que 21 ans et lors de son premier défilé qui remporte un triomphe, il rencontre Pierre Bergé. Ils ne se quitteront plus, malgré les frasques du créateur qui sombre dans la drogue et la neurasthénie. La révolution YSL est en marche… C’est un biopic lumineux, à l’image de son modèle, que livre Jalil Lespert pour son troisième film de metteur en scène. Sous le regard qu’on imagine très attentif de Pierre Bergé, le cinéaste-comédien, dresse un saisissant portrait qu’il replace aussi dans plusieurs époques avec comme fond sonore la guerre d’Algérie, Mai 68 et les années qui suivirent faites d’interdictions d’interdire avec tout le cortège d’abus et excentricités que cela charrie. Partant d’un personnage aussi sûr de son génie que mal à l’aise en société, ne sachant pas remplir un chèque mais doté d’un coup d’œil aussi percutant que son coup de crayon, doté d’un sens du phrasé aussi doux que la soie ou cassant comme du bois sec, le cinéaste va créer une puissante empathie avec son héros car c’est bien connu, on pardonne tout aux génies… Ces génies trop multiples pour qu’on puisse ne détenir d’eux qu’une seule vérité. Lespert livre celle de Bergé, dont la voix off ponctue le récit. Une vérité qui ose désacraliser le sujet, colérique, cocaïnomane, adultérin mais qu’affranchissent aussi bien le savoir-faire que le mal de vivre. « Tu n’étais heureux que deux fois par an », lui dit Bergé. Au printemps et en hiver. Un bonheur retrouvé mais terriblement éphémère quand arrive l’heure de présenter la nouvelle collection du maître assailli de doutes et pensées noires. Nous partons donc à la découverte d’une intimité. Jalil Lespert la filme avec un sens soutenu du rythme et du détail. Les décors, de Paris à Marrakech, sont somptueux sans puer le faste et le fric. Ils occupent une place aussi indispensable qu’accessoire, le cœur du sujet restant la relation de Saint-Laurent au monde qui l’entoure, le courtise, le phagocyte et celle, plus profonde, avec soi-même, ses démons intérieurs, ses obsessions. Magistralement filmées, les séquences de défilés constituent des contrepoints à ce marasme intérieur dont le héros s’avère inguérissable, confèrant à ce biopic son incontournable coloration glamour. Le dialogue est brillant avec cette grâce aristocratique d’une autre époque. Amoureux du mot et du verbe, les deux comédiens principaux s’en donnent à cœur joie. Quelques semaines après son triomphal premier film de cinéaste, Guillaume Gallienne campe un Pierre Bergé entre autorité despotique et compassion amoureuse tout à fait passionnant. Le sociétaire de la Comédie Française donne la réplique à son collègue Pierre Niney qui livre une renversante composition dans le rôle-titre. Epaulés par des seconds rôles taillés sur mesure (Laura Smet, Charlotte le Bon, Marie de Villepin) ils hissent ce troisième film d’un cinéaste décidément à suivre vers le prix d’excellence. Un cinéaste qui assume pleinement la part de rêve qu’il entend offrir au public sans pour autant délaisser les coulisses où se fomentent les vrais tragédies. Franck Bortelle [embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=wiKzqEfDkoM[/embedyt] A découvrir sur Artistik Rezo : |
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