Britannicus fait triompher Dominique Blanc à la Comédie-Française
Britannicus De Jean Racine Mise en scène de Stéphane Braunschweig Avec Clotilde de Bayser, Laurent Stocker, Hervé Pierre, Stéphane Varupenne, Georgia Scalliet, Benjamin Lavernhe, Dominique Blanc En alternance jusqu’au 23 juillet 2016 Tarifs : de 5 à 41 euros Réservation en ligne ou par téléphone au 01 44 58 15 15 Durée : 2h Comédie Française |
Du 7 mai au 23 juillet 2016 Après la Marquise de Merteuil des Liaisons Dangereuses au Théâtre de la Ville, c’est dans le rôle d’Agrippine que Dominique Blanc fait son entrée triomphale à la Comédie Française. Un personnage ultra-contemporain de mère abusive à l’emprise très politique sur son fils Néron, dans une mise en scène sans temps morts signée Stéphane Braunschweig. Quand les passions déchaînent la politique On n’en finit pas de gloser sur ce chef-d’oeuvre de Racine, écrit en 1669, au moment où la gloire de son rival Corneille commençait à pâlir. Pièce psychologique ou politique ? Personnages tous noirs, tout blancs, ou en demi-teinte ? Force est de constater que le génie de Racine, dont c’est la deuxième grande tragédie avant Andromaque, réside bien dans cette formidable alchimie qui mêle les passions, névroses, frustrations et désirs de ses personnages avec la fièvre totalement mégalomaniaque du pouvoir. Image de la cour au 17° siècle ? Image d’une Rome peinte par Tacite ? En réalité, les alexandrins sont si bien troussés, avec ce qu’il faut d’argumentation pragmatique et de poésie, ciselée par un vocabulaire à la simplicité et la précision diabolique, qu’elle peut séduire à n’importe quelle époque. Aujourd’hui, dans une scénographie en noir et en gris, ou les portes blanches dessinent sur des voiles sombres les antichambres du désir et de l’inconscient, Stéphane Braunschweig y projette un thriller terrifiant et cynique aux allures de film américain mais sans une goutte de sang. La parole ici fait office d’armes blanches. Somptueuse Dominique Blanc En tailleur pantalon et chemise blanche ouverte, Agripppine a tout d’une dirigeante de multinationale, assise jambes écartées pour confier son trouble à Burrhus (formidable Hervé Pierre) et se plaindre du comportement ingrat de son fils Néron (Laurent Stocker). Alors qu’elle l’a placé sur le trône, à force de manigances et de complots rocambolesques, ne voilà-t-il pas que le jeune empereur Néron se rebelle contre sa mère en kidnappant Junie ( Georgia Scalliet), la fiancée de son frère Britannicus (Stéphane Varupenne), par pure jalousie ? Craint-il que sa mère ne fomente le retour au pouvoir de Britannicus ? Ne supporte-t-il pas que l’amour entre les deux tourtereaux lui échappe, lui à qui rien n’échappe ? Et que vient comploter ici l’ambigu Narcisse (Benjamin Lavernhe) en écoutant aux portes ? En une journée et deux heures de spectacle intense, la tragédie de Racine propulse ses personnages et l’attention du spectateur dans les tourbillons vertigineux des égoïsmes, des calculs politiques et de la passion déchirée. Dominique Blanc incarne Agrippine, le personnage central de la pièce, avec une douceur et un calme olympien. Séductrice, charnelle, presque émouvante dans son désespoir, elle n’en demeure pas moins d’une somptueuse autorité, maniant l’alexandrin comme une arme à triple tranchant. Sa simplicité, son immense talent, l’intelligence subtile de son jeu ainsi que le talent des autres comédiens rendent le spectacle captivant. Hélène Kuttner [ Crédit Photos : © Brigitte Enguérand- Comédie Française]
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