Béjart, Nijinski, Robbins et Cherkaoui – Jalet – Opéra Garnier
L’Oiseau de feu, Béjart
L’Oiseau de feu est la première œuvre de ballet d’Igor Stravinsky. Y figure déjà l’énergie que le chef Vello Pahn donne brillamment et que l’on retrouvera dans le Sacre du printemps, à l’affiche actuellement au Théâtre des Champs Élysées dans trois versions (Nijinski, Waltz, Bausch).
Florian Magnenet avec grâce et légèreté incarne un Oiseau de feu un peu trop féminin. Le premier danseur dans une douceur quasi mélancolique charme néanmoins la salle. Très applaudi, il a convaincu par sa maîtrise du rôle et son interprétation romantique. L’Oiseau – phénix de Jérémy-Loup Quer fait contraste bien au contraire. Le danseur dégage une toute autre énergie. Radieux et puissant, il évolue plein d’une force toute masculine.
L’Après-midi d’un Faune, Nijinski
Cette œuvre a fait scandale en 1912 et a été donnée déjà dans de nombreux programmes à l’Opéra de Paris. Ce chef d’œuvre qui propose un voyage dans le monde antique ne vieillit pas même s’il apparait un peu désuet. Toutefois la salle semble lui préférer la version de Robbins. On aime la magnifique toile gigantesque en fond de scène figurant la jungle. Nicolas Le Riche incarne dans ce tableau toujours avec puissance et sensualité ce faune suave et épris. Aux côtés du danseur étoile, Eve Grinsztajn apporte au personnage de la nymphe une étrangeté sauvage fort plaisante. Froide et digne, elle dégage un halo de mystère fascinant.
L’Après-midi d’un Faune, Robbins
Extrêmement applaudi, ce ballet invite le spectateur à se plonger dans l’intimité d’un danseur qui répète dans un studio de danse. Le personnage est surpris agréablement par une danseuse, entrée par hasard, sans doute uniquement pour vérifier sa tenue dans le miroir. Et la rencontre furtive a lieu. La musique commence alors que le danseur n’est pas visible. Robbins rompt nettement avec son prédécesseur faisant du spectateur un voyeur. Puis un voile semi opaque qui évoque à l’imagination un tableau de Marc Rothko, se lève sur un Hervé Moreau superbe. Le danseur étoile séduit par sa force sereine et la beauté de sa jeunesse. Il est sublime. La jolie blonde Éléonora Abbagnato incarne une de ces poupées américaines qui se lissent les cheveux. Gracile et aérienne, elle apparaît comme un songe et disparaît. Aucune réelle virtuosité dans cette version.
Le Boléro, Cherkaoui – Jalet
Cette création déçoit malgré quelques effets bien trouvés. Acclamé, le ballet obtient néanmoins de la salle un excellent accueil. Le miroir incliné en fond de scène, reflétant danseurs et fosse accentue le vertige du mouvement tourbillonnant de la scène. Les projections circulaires créent aussi différents cercles qui enivrent. Cela fait beaucoup d’effets les premières minutes. Ensuite, on a compris. On regrette la scénographie très sombre. Les danseurs apparaissent dans une image macabre, dissimulés par des capes noires tels les médecins ridicules du théâtre de Molière. Les costumes de Riccardo Tisci ne sont pas très heureux : des squelette blancs… La chorégraphie équilibre les rôles des danseurs. Personne n’est réellement privilégiée. Les danseuses étoiles tourbillonnent avec brio certes mais méconnaissables avec leur peintures noires sur le visage, à l’exception naturellement de la gracieuse Aurélie Dupont et de l’impressionnante Marie-Agnès Gillot.
Marie Torrès
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