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Avignon 16, troisième épisode : les révélations des jeunes artistes européens

18 juillet 2016
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Bergman 1

Het Land Nod

De Fc Bergman

Avec Stef Aerts,

Joé Agemans, Bart Hollanders,

Matteo Simoni, Thomas Verstraeten,

Marie Vinck

Jusqu’au 23 juillet à 17h et 22h

Durée :1h35

Parc des Expositions Avignon


Karamazov

D’après “Les frères Karamazov” de Dostoievski

Mise en scène Jean Bellorini

Avec Michalis Boliakis, François Deblock, Mathieu Delmonté, Karyll Elgrichi, Jean-Christophe Folly, Jules Garreau, Camille de La Guillonnière, Jacques Hadjaje, Blanche Leleu, Clara Mayer, Teddy Melis, Marc Plas, Geoffroy Rondeau, Hugo Sablic

Jusqu’au 22 juillet à 21h30

Durée : 5h30 avec entracte

Truckstop

Mise en scène Arnaud Meunier

De Lot Vekemans

Avec Claire Aveline, Maurin Ollès, Manon Raffaelli

Jusqu’au 16 juillet à 11h et 15h

Durée : 1h30

Chapelle des Pénitents Blancs

Tigern et 20 November

De Gianina Cārbunariu et Lars Noren

Mise en scène de Sofia Jupither

Avec David Fukamachi Regnfors, Fredrik Gunnarson, Anders Hambraeus, Åsa Persson, Jonas Sjöqvist

Jusqu’au 17 juilet 15h et 18h

Durée 1h

www.festival-avignon.com

Bergman 1 copie copieEblouis par « Hed Land Nod » du collectif d’Anvers FC Bergman, attentifs au long voyage des « Frères Karamazov » dans la carrière Boulbon adapté par Jean Bellorini, nous avons été séduits par le « Truckstop » d’Arnaud Meunier et par la finesse de la Suédoise Sofia Jupither qui a présenté deux courts mais poignants spectacles, « La Tigresse » et « 20 November » à Benoît XII. Une révélation.

Le pays de NodHet Land Nod : Entre Harold Lloyd et Jean-Luc Godart

Ils sont six jeunes artistes belges d’Anvers qui ont fondé le collectif FC Bergman, explorant de manière subtilement transversale le monde des images, du cinéma, du mouvement et de la littérature. Le spectacle qu’ils présentent à Avignon en ce moment se déroule dans une gigantesque salle de musée en réfection où trône l’immense toile de Rubens sur la mise en croix du Christ. 

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KARAMAZOV copieKaramazov : Une saga de 5 heures 30 entre Bien et Mal

Il y a dans cette saga policière et métaphysique de plus de 3000 pages tout ce qui est coeur de l’oeuvre de Dostoïevski, ce que Sigmund Freud et Franz Kafka ont considéré comme son chef d’oeuvre : une lutte erratique, affolante entre le Bien et le Mal qui s’incarne à travers une fratrie de trois fils dominés par un père tyrannique, débauché et violent (Jacques Hadjaje) qui finit pas être assassiné par l’un d’entre eux.

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TruckstopTruckstop : Au carrefour de tous les désirs

Dans le relais routier qu’elles tiennent en bordure d’une autoroute d’Europe du Nord, une mère et sa fille de 18 ans vivent modestement. Le quotidien n’est pas forcément facile et Katalijne, la jeune fille, est totalement dépendante de sa mère qui exerce sur elle une autorité terrible et bienveillante. Surgit Remco, jeune camionneur au charme insouciant et à l’allure séduisante, dont Katalijne tombe éperdument amoureuse. Les deux jeunes gens cherchent à échapper tous deux à leur quotidien en rêvant d’une vie nouvelle qui va les conduire au drame. Les personnages qui s’exprlment sur le plateau, entre narration du récit et discours direct des dialogues, sont donc entre la vie et la mort, dans des fragments de vie éparpillés à la manière d’un puzzle qui raconte leur histoire avant la catastrophe, de manière désordonnée, rêvée. Arnaud Meunier, fin directeur d’acteurs (« Chapîtres de la chute » sur les Lehman’s Brothers au Rond-Point) et directeur de la Comédie de Saint-Etienne, s’est emparé de ce beau texte écrit par la Néerlandaise Lot Vekemans. Il y a dans ces dialogues faits de ruptures narratives et d’ellipses une actualité bouleversante qui parle de la jeunesse actuelle en manque d’idéal, en perte de confiance, assoiffée par le désir de réussir matériellement dans une mondialisation féroce. Dans la scénographie et les lumières en demi teintes de Nicolas Marie, la comédienne Claire Aveline (la mère) dégage une vibrante présence face à Manon Rafaelli (Katalijne) et Maurin Ollès (Remco), tous jeunes acteurs. Un très fort moment de théâtre.

La trigresse20 NovemberLa Tigresse et 20 November : la subtilité et la force de Sofia Jupither

Avec beaucoup de douceur, de malice et de subtilité pour traiter des sujets graves, la metteur en scène Sofia Jupither est l’une des jeunes révélations du Festival d’Avignon. Autant avec « Tigern » (La Tigresse) qu’avec « 20 November » elle réalise deux spectacles très réussis qui sont tous deux écrits à partir d’événements réels. L’évasion d’un tigre de son zoo est le point de départ de la pièce de la Roumaine Gianina Cārbunariu qui fait intervenir les citadins, les oiseaux et les animaux du zoo d’une petite ville face à l’irruption de la tigresse dont chacun, au delà de la peur qu’elle suscite, voudrait tirer profit. Qui de la fourrure, qui de son argent, qui de son compte en banque, la tigresse intrépide devra payer d’avoir fait irruption dans le monde civilisé en échappant au contrôle de son gardien. Quand les hommes sont plus féroces que les animaux, Sofia Jupither dirige ses excellents acteurs comme de bons voisins de palier prêts à vendre leur âme face à un corps étranger, dans des dialogue d’une drôlerie acide et caustique à souhait. On rit beaucoup moins dans « 20 November » où Lars Noren fait parler dans un long monologue Sebastian Bosse, le jeune garçon allemand de 18 ans qui en 2006 fait feu sur ses camarades de lycée et ses professeurs en lâchant aussi bombes à gaz dans les salles du bâtiment. Noren s’est servi des messages et des vidéos que le lycéen avait postés sur Internet, de son journal intime où il se présente comme un ange de la mort, souffrant du mépris et de l’exclusion. Tour à tour accusant l’école, la société de consommation, les professeurs, le jeune homme prémédite son acte monstrueux avec la plus grande méticulosité. Face à la caméra et dans une mise en scène simplement théâtrale, David Fukamachi Regnfors est bouleversant de fragilité dans son désir de marquer le temps par la mort et la célébrité. Ses mots et son regard résonnent, à la lumière des attentats du 14 Juillet, de manière terriblement juste. 

Hélène Kuttner

[ Crédit Photos (C) Christophe Raynaud de Lage/Festival d’Avignon]

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