Anton Tchekhov
Anton Pavlovitch Tchekhov naît en 1860 à Taganrog, sur les rives de la mer d’Azov. Ses parents sont des petits commerçants, descendants d’esclaves affranchis. Son enfance, rude, est partagée entre le travail à la boutique de ses parents et l’école. D’une religiosité excessive, son père est un homme violent, soucieux cependant de l’instruction de ses enfants. Tchekhov publie, à seulement 18 ans, sa première pièce de théâtre ; une actrice de renom, Maria Iermolova, lui inspire Sans Père, connu aujourd’hui sous le titre Platonov.
Si, à l’époque, l’œuvre ne rencontre pas d’écho favorable, elle demeure aujourd’hui un chef d’œuvre incontesté de la littérature. Malgré des conditions de vie très précaires et des soucis de logement, le jeune adulte entreprend avec succès des études de médecine à Moscou. Il exerce dès 1884.
Alors que son père fait faillite, Tchekhov cherche un moyen financier de recours afin de venir en aide à sa famille. Aussi, il publie des nouvelles humoristiques dans différents journaux. Une entreprise qui se voit bientôt récompensée par un franc succès et une reconnaissance dans des cercles littéraires influents. Le jeune écrivain, lors d’un voyage à Saint-Pétersbourg, rencontre l’illustre romancier Grigorovitch. Celui-ci décèle son talent exceptionnel et encourage vivement le jeune talent. « Vous vous rendez coupable d’un grand péché moral si vous ne répondez pas à ces espérances », lui déclare-t-il dans une lettre. C’est à cette même époque que le jeune homme développe un mal incurable, la tuberculose.
Dès lors, Tchekhov prend plus au sérieux la perspective d’une carrière d’écrivain. Il abandonne ses pseudonymes pour signer ses écrits de son vrai nom. Il développe de plus en plus de récits autour des thèmes plus sombres qu’on lui connaît. Avec un talent sans pareil, il dépeint le vide, le tragique et le néant des existences bourgeoises, dans une société provinciale russe. Les pièces Ivanov (1887) ou L’Ours (1888) voient le jour.
Tchekhov tousse et crache du sang. Il lutte jour après jour contre la fièvre qui le ronge. Ses nombreux déplacements et cures multiples lui permettent de respirer un air plus sain et de gagner un peu de temps sur la maladie. Cet état de santé critique ne l’empêche pas de s’impliquer dans de nombreuses œuvres de bienfaisance. Très sensible à la misère de son prochain, il multiplie les bonnes actions, s’engage dans la constructions d’écoles, pratique la médecine gratuitement. En 1890, afin de rendre compte des conditions d’existence des bagnards, l’écrivain séjourne une année à leurs côtés. De cette expérience naît l’œuvre, L’île de Sakhaline (1893).
Amoureux d’une actrice du Théâtre d’art de Moscou, Olga Leonardovna Knipper, Anton Tchekhov se résout au mariage en 1901. Il lui reste alors trois années à vivre. Établi en Crimée, il signe deux pièces phares du répertoire théâtral, Les Trois Sœurs (1900) et La Cerisaie (1903). Puis, lors d’un dernier voyage en Allemagne, ultime tentative de cure en compagnie de son épouse, l’écrivain rend son dernier soupir. Celle-ci décrira avec émotion ses derniers instants dans ses mémoires :« Peu après minuit, il se réveille et fait appeler un médecin pour la première fois de sa vie. […] Le docteur étant arrivé, il demande un verre de champagne. Anton Pavlovitch se lève et dit solennellement en allemand au médecin qui était à son chevet : « Ich sterbe… » (« je meurs… ») puis il prend le verre, se tourne vers moi, […] dit : « cela fait longtemps que je n’ai plus bu du champagne… », ayant bu son verre tranquillement, il se coucha sur le côté gauche et se tut à jamais. »
Ainsi, la Russie perd, en 1904, un très grand dramaturge, qui fait sa fierté à l’égal d’un Dostoievski ou d’un Tolstoï.
Jeanne Rolland
Bibliographie
Théâtre
- 1878 : Platonov
- 1884 : Sur la grand-route
- 1886, 1902 : Les Méfaits du tabac
- 1886 : Le Chant du cygne
- 1887 : Ivanov
- 1888 : L’Ours
- 1888-1889 : Une demande en mariage
- 1889 : Tatiana Repina
- 1889 : Le Sauvage ou L’Homme des bois ou Le Génie des forêts ou Le Sylvain
- 1889-1890 : Le Tragédien malgré lui
- 1889-1890 : La Noce
- 1891 : Le Jubilé
- 1895-1896 : La Mouette
- 1897 : Oncle Vania
- 1899 : La Dame au petit chien
- 1901 : Les Trois Sœurs
- 1904 : La Cerisaie
Recueils
- 1884 : Les contes du Melpomène
- 1887 : Dans le crépuscule ou Dans les Ténèbres
- 1887 : Innocentes paroles
- 1894 : Nouvelles et récits
Divers
- 1884-1885 : Drame de Chasse (roman policier)
- 1890 : Notes de Sibérie
- 1893 : L’île de Sakhaline (carnets de voyage)
Citations
- « Quand nous avons soif, il nous semble que nous pourrions boire tout un océan : c’est la foi. Et quand nous nous mettons à boire, nous buvons un verre ou deux : c’est la science. »
- « Rien n’unit aussi fort que la haine : ni l’amour, ni l’amitié, ni l’admiration. »
- « L’originalité d’un auteur dépend moins de son style que de sa manière de penser. »
- « Les paysans sont sans cesse au travail et c’est un mot qu’ils n’utilisent jamais. »
- « Nous ne sommes pas heureux, et le bonheur n’existe pas ; nous ne pouvons que le désirer. » (Les Trois sœurs)
- « C’est affreux de connaître le secret d’un autre et de ne pas pouvoir l’aider. » (Oncle Vania)
- « Ce ne sont ni les brigands ni les incendies qui détruisent le monde, mais la haine, l’hostilité, les petites intrigues… »
- « Une femme ne peut devenir l’amie d’un homme qu’après avoir été une camarade, puis une maîtresse. » (Oncle Vania)
- « Le talent, c’est la hardiesse, l’esprit libre, les idées larges. » (Oncle Vania)
[Visuel : Anton Pavlovich Chekhov. Auteur inconnu. This image (or other media file) is in the public domain because its copyright has expired.This applies to Australia, the European Union and those countries with a copyright term of life of the author plus 70 years.]
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