Andrea Sitter – Une Intense Action Restructurante
A première vue, on qualifierait son humour de « british », mais son accent, dont elle joue malicieusement, est allemand. Ensuite, on se régale grâce à son ce sens du décalage, lequel se double d’une douceur presque viennoise, revue à travers l’esprit parisien, si attaché à la réflexion sur l’acte artistique. Sans oublier que Sitter possède un sens de la poésie qui fait d’elle un personnage presque aristocratique et suranné, mais délicieusement conscient de l’être. La tenue toujours rigoureuse, même dans les situations les plus absurdes, il y a dans son attitude autant d’Ionesco que de Pina Bausch, autant de Lac des cygnes que de Pasolini.
Scènes de ménage, bête de scène. En robe rouge, elle manipule les objets du quotidien, le sceau et le balai, se peint le visage telle une chamane, cherche le contact avec le monde animal. Sa danse reste danse, mais quand elle rencontre les objets et la scénographie, elle devient signe et renvoie au-delà d’elle-même, comme dans l’installation d’un plasticien – qui aime le rouge. Des tomates cocktail au carré rouge (à ne pas franchir), de sa robe au fil rouge (du micro!), l’écarlate est la couleur de l’évasion et de la rétention en même temps.
C’est donc quoi, une « intense action restructurante? » Rien d’autre qu’une promesse de l’industrie cosmétique, le désir d’éternelle jeunesse d’une ménagère qui ne retrouve pas ses rêves dans un quotidien banal. Entre arabesques, attitudes et développés, Sitter joue avec les signes du monde contemporain, avec ses mythes, ses leurres et ses aberrations. Mais quelle différence avec une reine? Un autre solo de Sitter s’appelle, justement, « La reine s’ennuie ».
Sans indiscrétion, qui ne s’est pas déjà fantasmé(e) en rock star tout en lavant par terre ? Chez Sitter, l’exercice trouve son plein potentiel d’absurdité tragi-comique. Chaque mouvement est placé sous un contrôle impeccable d’un personnage qui tient autant du Petit Chaperon Rouge que de Till l’Espiègle. Mais au résultat, tout lui échappe. Forte d’une paire de jambes à la Sylvie Guillem, la ménagère se roule par terre sur « La Truite » de Schubert, dans une sorte de ballet horizontal et finit par laver sa culotte – rouge, bien entendu.
D’année en année, le phénomène Sitter prend de l’ampleur. En 2005 elle décide de créer sa propre compagnie et de l’appeler Die Donau, en hommage au lieu de naissance d’Andrea, à savoir la ville de Passau en Bavière, sur les bords du Danube. Cinq solos déjà à son actif, dont on peut voir en janvier, après « U.I.A.R. – Une Intense Action Restructurante » à l’Echangeur de Bagnolet, l’émouvant « Rock’n’roll suicide », au Théâtre Paul Eluard de Bezons, le tout dans le cadre d’un « Embarquement pour Sitter » (entendez : Cythère) qui retrace son chemin poético-chorégraphique.
Thomas Hahn
U.I.A.R. – une intense action restructurante
Chorégraphie, textes et interprétation : Andrea Sitter
Musique: Jimi Hendrix, Franz Schubert, Daniel Johnston, Hugh Levick et Tom Waits
Le 17 janvier à 20h30
L’Echangeur
59, avenue du Général de Gaulle
93170 Bagnolet
M° Galliéni (à 150 m en sortant à droite)
Rock’n roll suicide
Chorégraphie, textes et interprétation : Andréa Sitter
Avec Benjamin Colin percussionniste
Le 26 janvier 2013 à 19h
Au Théâtre Paul Eluard
162 Rue Maurice Berteaux
95870 Bezons
[Crédit de la photographie (en bas) : Eric Boudet]
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