Adieu Mr Haffmann : une vraie réussite
©Evelyne Desaux
C’est l’une des reprises les plus intéressantes de cette rentrée. Jean-Philippe Daguerre, que l’on connait comme brillant metteur en scène de classiques, a composé un petit bijou de pièce qu’il dirige avec une distribution aux petits oignons, mêlant une histoire de famille à celle de l’Occupation nazie. La pièce vient juste d’être récompensée par le Prix de la Fondation Barrière.
Un bijoutier sous l’Occupation
Cela ressemble à un scénario de film. Nous sommes à Paris, en 1942. Joseph Haffmann, qu’incarne le formidable Alexandre Bonstein, se terre dans sa bijouterie alors qu’il a envoyé sa femme et ses enfants se cacher en Suisse. Il propose à son employé, Pierre Vigneau, joué par l’excellent Grégory Bacquet, de reprendre la boutique à condition de lui permettre de se cacher dans la cave, aménagée pour la circonstance. Pierre finit par accepter ce pacte, auquel il ajoute une autre condition : que Joseph couche avec sa femme Isabelle parce que lui-même, étant stérile, ne peut la rendre enceinte.
Des acteurs vibrants d’humanité

©Evelyne Desaux
Sur le papier, le début de ce scénario pourrait sembler peu vraisemblable, difficile à incarner. Pourtant, la force de ce spectacle émane de la puissance des comédiens, leur sincérité pour camper des être perdus dans la tourmente de l’Histoire et de leurs propres problèmes. Dès lors, la pièce évite les pièges des clichés manichéens, brouille les frontières entre les «bons » et les « méchants » sous l’Occupation en plaçant les personnages plus vrais que nature dans un entre-deux des arrangements quotidiens, des compromis de la vie, qui ont permis à nombre de personnes de survivre. Pour autant, l’auteur n’omet par de nous rappeler la perversité des nazis à souffler le chaud et le froid, à travers le personnage plus qu’ambigü de l’Ambassadeur allemand Otto Abetz, remarquablement écrit et incarné, ainsi que des archives sonores de l’époque.
Séquences cinéma

©Evelyne Desaux
Un décor sommaire, bureau, table, vaisselle, lit, et des lumières rasantes, c’est le principe d’une scénographie ultra-légère qui fait la part belle aux acteurs et à la direction scénique. Comme au cinéma, les dialogues sont vifs, cinglants, émouvants. La comédienne Julie Cavanna, belle et grave, est une épouse frémissante, déchirée entre un mari qui vire collabo, mais qui est incapable de lui donner un enfant et un Juif qu’elle cache, et de qui, progressivement et par la force des choses, elle se rapprochera. Franck Desmet, Charlotte Matzneff ou Salomé Villiers forment un couple nazi et francophile haut en couleurs et en perversité, entre hypocrisie et cruauté. La précision des dialogues, la finesse du jeu des acteurs et la subtilité de la mise en scène, enlevée, font de ce spectacle une vraie réussite, à proposer à tous les publics !
Hélène Kuttner
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