À Chaillot, un jardin “Pop up” pour s’amuser comme des gamins

Du 5 au 14 novembre 2015

Ils sont les jardiniers du paysage chorégraphique et ses botanistes virtuels. En amis multiculturels de l’horticulture 2.0, la compagnie italienne TPO ravit les adultes et enchante les enfants avec des spectacles poétiques et ludiques, sur des sols interactifs où surgissent buissons et fleurs, mares et merveilles, ponts et poissons.

Pop up garden est la dernière création (coproduite par le Théâtre National de Chaillot) de cette compagnie, fleuron inventif de la création chorégraphique transalpine. En fait, pourquoi n’ont-ils pas encore fait de spectacle sur les Alpes ? Il y a dans leur répertoire un jardin japonais, un jardin à la française comme un tableau peint (Il Giardino dipinto) et une balade dans des paysages d’Islande. Tous fonctionnent selon le même principe qui rend si unique cette compagnie qui travaille à Prato, en Toscane.

Dans les spectacles de TPO, il est question d’écologie, grâce à un environnement interactif et ludique, en parfaite adéquation avec les modes de perception de cette nouvelle génération. Pour ces jeunes-là, les écrans tactiles sont aussi naturels que la radio l’était pour leurs grands-parents. On commence par une histoire, un conte et la danse, ce qui permet de comprendre le principe interactif. À la fin, le public est invité à faire comme les artistes, à courir ou sauter pour déclencher les apparitions colorées, représentations botaniques pleines de poésie.

Dans Pop up garden, il y a pourtant un jardinier qui réclame bien son titre. Il s’agit de Monsieur Bu, qui adore semer la verdure là où il n’y a que du bitume. Pour se faire plaisir, et pour faire plaisir aux animaux qui viennent lui réclamer un espace de vie plus verdoyant. Lui, la danseuse et finalement le public seront immergés dans un mélange de deux techniques de pop-up, l’une virtuelle, l’autre travaillant avec des objets en papier qui évoquent les plantes et leur migration. La nature est toujours en mouvement, comme le démontrent les images de migration végétale, autant que la danse.

Pop up garden s’inspire de l’artiste-jardinier français Gilles Clément et de son concept du “jardin planétaire” qui nous demande de regarder notre planète comme si elle était un jardin et d’en prendre soin comme (presque) chacun le fait quand il veut tirer de la qualité de vie d’un bout de terre dont il espère tirer un plaisir personnel. Seul, on sait faire, mais collectivement on va dans le mur ? Les spectacles de TPO permettent de saisir et de (re)découvrir le caractère fragile et éphémère de la flore, tout en valorisant l’énergie inépuisable de la vie végétale.

À l’interactivité des images au sol, TPO ajoute ici celle du son qui devient un environnement spatial et quasiment plastique. C’est d’autant plus juste que les jardins de TPO sont toujours entourés du public. Ici, on regarde ensemble, en voyant les autres spectateurs, et on crée des relations, avec eux et avec les danseurs. Et avec la nature avant tout, avec sa poésie et son autonomie. Interactivité ne signifie pas contrôle ! TPO nourrit l’utopie d’une fraternité entre les hommes et la nature et en transmet l’idée aux plus jeunes (à partir de 4 ans).

 
Thomas Hahn

[Photos © Ilaria Constanzo]