À Chaillot, Rocío Molina réinvente le flamenco
Biennale d’art flamenco 2015 Du 14 au 22 mars 2015 Danse, musique, arts visuels Théâtre National de Chaillot M° Trocadéro |
![]() Sa curiosité semble inépuisable. Rocío Molina dégage les vaches sacrées et prend le taureau par les cornes. Le flamenco est pour elle un champ d’expérimentation, d’ouverture et de liberté où toutes les surprises sont possibles. Nommée artiste associée au Théâtre National de Chaillot, Molina est au cœur de la 2e Biennale d’art flamenco. Quand Séville rencontre la forêt profonde et les mystères de l’Asie… D’abord, on pourra découvrir sa toute dernière création, Bosque ardora, où elle affronte la musique contemporaine et plonge dans des légendes, des scènes de chasse en pleine forêt et autres rêves mythologiques. Cet univers-là semble être aussi éloigné de Séville que l’univers de Honji Wang, Germano-Coréenne qui a grandi dans le milieu du hip-hop. Les deux sont partenaires dans Felahikum, un jeu troublant sur l’identité et la ressemblance. Bosque ardora : flamenco et musique contemporaine Dans une vidéo digne d’un conte de fées, Molina part à la chasse, à dos de cheval, accompagnée de ses chiens. En traversant une rivière au galop, elle chute et se retrouve dans l’eau. Là, elle entre dans un rêve, à moins qu’elle n’y était déjà. Molina devient la renarde, cet animal qu’elle voulait abattre. Entrent musiciens, danseurs et chanteurs sur un tapis de lichen imaginaire. Le flamenco émerge. Et pour une fois, une femme se permet d’exposer ses fantasmes sur les hommes. Quelle drôle de faune ! Molina aime à nous rappeler quelques poses de Nijinsky, debout ou assis(e) dans l’herbe. Eduardo Guerrero et Fernando Jimenez, ses deux acolytes masculins, piaffent comme dans la haute école viennoise. Et les deux trombones, repère visuel autant que sonore, dialoguent avec le zapateado de Molina, dans une forêt de signes. Tout ça ne peut qu’intriguer. Le flamenco est un art solaire. Que cherche-t-il dans une forêt nocturne ? Le flamenco a-t-il besoin de métaphores animales ? N’en est-il pas une à lui tout seul ? Voilà donc le flamenco comme on ne l’avait jamais vu, ni osé imaginer. Flamenco se disait “Felahikum” Cette rencontre joue sur la très étonnante ressemblance physique et physionomique entre l’Espagnole et la Coréenne. Wang, plutôt féline et aérienne, incarne un univers opposé aux frappes des talons, le zapateado. Tout commence par ailleurs sur un miroir brisé et termine dans le vent d’une vingtaine de ventilateurs. Et pourtant, au début de leur jeu troublant, elles semblent ne faire qu’une. Tableau par tableau, elles vont gagner en autonomie. Provocations, défis et autres jeux témoignent du déchirement à lutter avec une part de soi, faite de désirs et de souvenirs. Après avoir vu Wang et Ramirez danser ensemble à Séville, Molina leur a proposé une recherche commune. Jusqu’ici, il fallait être une vedette mondiale pour créer un duo avec une autre vedette du flamenco. La rencontre au sommet s’est imposée comme une figure majeure, avec des duos comme Carolyn Carlson / Eva Yerbabuena, Andres Marin / Kader Attou et bien sûr Israel Galvan / Akram Khan. Tous ces dialogues se sont révélés fructueux, mais celui entre Molina et Wang a ceci de particulier qu’il se noue entre deux interprètes-chorégraphes qui sont chacune en pleine recherche d’une voie nouvelle dans leurs univers respectifs. Le résultat est étonnant. Wang, qui fait plier le hip-hop tel un roseau, se devait de trouver une réponse face à la force du flamenco, qu’elle soit physique ou acoustique. Elle mise sur la fluidité et l’autodérision, créant une dualité qui rappelle le yin et le yang. Avec Rocío Molina, l’étonnement est garanti. [Photos © Bosque ardora – Alain Scherer ; Felahikum – Ghostographic] |
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