Une brève histoire de la soul music
Apparue aux États-Unis à la fin des années 50, la soul music est un mouvement musical qui a marqué le XXe siècle, s’étant rapidement répandue outre-Atlantique pour être écoutée à travers le monde. Plus qu’une musique, elle fut un moyen pour la communauté afro-américaine d’affirmer son identité et sa spiritualité dans un pays profondément marqué par le racisme et la ségrégation.
La soul naît dans un premier temps de l’évolution musicale du rhythm and blues, et a la particularité d’être plus libre dans sa structure, adoptant une musicalité plus “funky” mais elle est surtout un retour aux sources dont il est issu : le Gospel. C’est Ray Charles qui mélangea sa passion pour le gospel avec les rythmes saccadés du rhythm and blues pour donner naissance à la soul. Mais celui qui sera considéré par beaucoup comme le réel père fondateur de la soul n’est autre que Sam Cooke, qui posera les bases de ce mouvement et rentrera dans la légende avec sa célèbre musique A change is gonna come, évoquant la conditions des Afro-américains aux États-Unis, leur déracinement et le rejet dont ils sont victimes, affirmant que le changement est en cours. Sam Cooke sera abattu à 33 ans, quelques mois après avoir écris ce titre. Cette musique, ainsi que la mort tragique de son auteur, reflète très bien pourquoi ce mouvement musical est étroitement lié au contexte historique dans lequel il a vu le jour. Il fut pour tout un peuple, méprisé et rejeté, le reflet de l’espérance qu’un changement allait avoir lieu. Malheureusement, cette lueur d’espoir fut de courte durée dû aux évènements tragiques des mouvements afro-américains des droits civiques avec comme point culminant la mort de Martin Luther King. Si la Soul cherchait justement à séduire un public blanc afin d’entrainer en quelques sorte une réconciliation entre les deux communautés, la funk, née de cette rupture, va mettre en avant une musique qui puise ses sources dans ses racines africaines affirmant avec fierté ses origines et sa culture.
Mais bien comprendre l’histoire de la soul nécessite quelques notions de géographie. Pendant des années, deux labels se sont construits sur une opposition musicale et marketing. Au nord, la Motown, créée en 1959, ce qui a valu à Detroit le surnom de “Hitsville”. Dans le même temps naissait, à Memphis, la sudiste : la Stax Records. Les stars de la Motown chantent un RnB qui se veut accessible, visant un public blanc, avec des artistes comme Marvin Gaye, Stevie Wonder, The Temptations, Diana Ross… Tandis que la Stax défend les crooners et la deep soul venue du gospel, visant un public noir, avec des artistes comme Otis Redding, Isaac Hayes, Rufus Thomas…
Ces deux labels permettront l’essor du mouvement et sa popularité aux yeux du grand public. Le mouvement va ainsi vite s’étendre à d’autres grandes villes américaines comme Chicago, New York, avec le légendaire Atlantic records, ou encore Philadelphie qui produiront des artistes aux sons variés et verront naitre par la suite les courants funk et disco. L’apparition de ces nouveaux courants musicaux entrainera un déclin de la soul au milieu des années 1970.
Au début des années 1980 de nouveaux artistes renouvellent le genre, à l’image de Michael Jackson avec Off the Wall, Rick James, ou encore Prince. Ils popularisent définitivement la soul. Par la suite, en samplant les standards des années 1960 et 1970, le rap contribuera à une nouvelle popularité de la musique soul. Certains groupes iront plus loin et fusionneront soul, rap et pop music, pour donner naissance à une neo soul (ou nu soul) dans la seconde partie des années 1990 comme D’Angelo, De La Soul, Erykah Badu…
Dans les années 2000 des artistes vont renouer avec une soul classique revenant aux racines originelles de cette musique avec notamment, Lee Fields, Sharon Jones & the Dap-Kings, Charles Bradley et Amy Winehouse.
De nombreux artistes perpétuent encore aujourd’hui ce style musical qui aura su traverser les générations et marquer de son empreinte le monde musical moderne, nous montrant également que le changement tant espéré de Sam Cooke n’a pas totalement eu lieu et que la route est encore longue.
Voici une playlist de quelques morceaux cultes pour les curieux :
https://open.spotify.com/playlist/0IdR0rOVGZuEVOeTSfJlVV?si=Bth7Ig5ZSha9fCjdxegfzg
Articles liés
“Tant pis c’est moi” à La Scala
Une vie dessinée par un secret de famille Écrire un récit théâtral relatant l’histoire d’un homme, ce n’est pas seulement organiser les faits et anecdotes qu’il vous transmet en une dramaturgie efficace, c’est aussi faire remonter à la surface...
“Un siècle, vie et mort de Galia Libertad” à découvrir au Théâtre de la Tempête
C’est Galia Libertad – leur amie, leur mère, leur grand-mère, leur amante – qui les a réunis pour leur faire ses adieux. Ce petit groupe d’amis et de proches, trois générations traversées par un siècle de notre histoire, se retrouvent...
“Chaque vie est une histoire” : une double exposition événement au Palais de la Porte Dorée
Depuis le 8 novembre, le Palais de la Porte Dorée accueille une double exposition inédite, “Chaque vie est une histoire”, qui investit pour la première fois l’ensemble du Palais, de ses espaces historiques au Musée national de l’histoire de...