Sophie Koch, un retour attendu
Formée au CNSM, Sophie Koch est depuis longtemps l’élève de Jane Berbié, qui la suit toujours avec attention et affection. C’est Londres qui, en premier, attira l’attention sur elle en lui confiant Rosina dès 1998. La même maison l’invita immédiatement pour la Dorabella de « Così » et La Cenerentola. Une nouvelle diva rossinienne était-elle née ? Le physique, l’abattage, la souplesse de la voix auraient pu le faire penser. Mais c’est le répertoire allemand qui depuis longtemps attirait Sophie Koch et c’est Dresde puis Vienne qui le lui donnèrent. Il y eut d’abord le rôle du Compositeur d’Ariane à Naxos dans la capitale saxonne. Ioan Holender l’engagea alors à Vienne pour Cherubino et Octavian du Chevalier à la rose, une prise de rôle sur la scène du Staatsoper, et quel rôle ! Et avec quels souvenirs, de Gutheil-Schoder à Seefried et de Lehmann à Jurinac ! Et dans quelles conditions : deux jours de répétitions pour quatre heures de musique ! Depuis, Sophie Koch a imposé son « Chevalier » sur les plus grandes scènes du monde. On l’a vue encore récemment, à Vienne, face à la Maréchale savante et retenue de Soile Isokoski : un jeune prince assurément, un maintien à la fois naturel et militaire, une joie de vivre où affleure sans cesse malgré tout la discipline de la meilleure école de cavalerie. Mais il arrive à Sophie Koch ce qu’on n’a vu à aucun Octavian sur la même scène : pendant sa longue conversation du premier acte avec la Maréchale, ce Quinquin-là entend le texte et comprend ce qu’elle lui dit – là où tant d’autres ne font que s’agiter pour montrer qu’elles s’ennuient. Rien de cela ici, mais enfin les mots de Hofmannsthal écoutés et entendus, la leçon entendue. Et soudain une émouvante pâleur s’emparait du visage du jeune homme. Ce qui ne l’empêchait pas ensuite de mener sa mascarade avec une énergie et une malice irrésistibles. Bientôt, elle le rechanta à Dresde, prenant l’habitude d’avoir dans la fosse les meilleurs orchestres au monde.
Et Paris dans tout cela ? Les premiers rôles y ont été Mercedes et Zerlina et l’on se souvient de sa Concepcion joyeusement délurée dans L’Heure espagnole, de sa Rosina du « Barbier » ou de son Compositeur dans le spectacle de Laurent Pelly. Mais tout cela date d’au moins cinq ans et Sophie Koch s’est faite rare. Elle ne l’était pas au Capitole, la scène française qui l’a le plus entendue depuis ses débuts en Cherubino : il y eut sa première Mignon d’Ambroise Thomas, Dorabella, un turbulent Néron dans Le Couronnement de Poppée, son premier Octavian en France… Mettons à part deux souvenirs inoubliables : les Poèmes pour Mi de Messiaen, appris en quelques semaines pour remplacer une chanteuse défaillante, d’un aplomb, d’une flamme et d’une autorité impressionnants. Il y eut enfin et surtout la noire Margared du Roi d’Ys de Lalo, belle, tourmentée, maléfique, implacable.
Pour son retour à Paris, Sophie Koch chantera ce répertoire français qu’elle a progressivement apprivoisé ces dernières années : face à Jonas Kaufmann, voici sa Charlotte si pure et retenue, déjà entendue à Berlin, Vienne et Munich. Et il y aura très vite, dans le colossal projet du Ring, la juvénile Fricka de L’Or du Rhin, venant après une première Brangäne à Londres cette saison. Et, pour compléter l’impressionnant programme, elle donnera au Palais Garnier, sous la direction du directeur musical Philippe Jordan, le Poème de l’amour et de la mer de Chausson et les Sea Pictures d’Elgar. C’est le début des années Koch !
Propos recueillis par Christophe Ghristi,
Pour le magazine En Scène ! Le journal de l’Opéra National de Paris
A retrouver sur le site de l’Opéra National de Paris
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