La Fille du régiment – triomphe de la nouvelle distribution – Opéra Bastille
Difficile peut-être de succéder aux deux superstars en titre: Nathalie Dessay, tant aimée du public français – elle a retrouvé son énergie et sa vitalité dans le rôle vivifiant de Marie – et Juan Diego Folrez, extraordinaire en Tonio.
Et pourtant ….
Passée la surprise de l’accent délicieux de Désirée Rancatore mais déstabilisant pour le texte français, rendant la langue parfois énigmatique et mystérieuse, la soprano conquiert l’auditoire par le charisme, la beauté et la rondeur de sa voix. Se produit un véritable enchantement lyrique de ce nouveau duo.
Elle, très à l’aise en fille aimante et bonne enfant de tous ses papas : une bonne cinquantaine… , un peu brut de décoffrage à souhait, délicieuse vivandière, mais aussi jeune femme espiègle découvrant avec fraîcheur la surprise de l’amour, ou déchirante dans « Il faut partir ».
Lui, Celso Albelo, puissant vocalement … à la prononciation irréprochable. Il remporte un véritable triomphe dans : « Ah, mes amis, quel jour de fête ! » Très émouvant dans la noblesse de son cri d’amour dans la romance « Madame, écoutez-moi… » On l’ adore aussi quand, grand niais, il bouscule les papas craintifs ou qu’il saisit à toutes forces sa belle dans les bras. Une grande vitalité: la vie est là, l’amour est là. La France aussi… clamée haut et fort dans l’air célèbre de « Rantanplan » chanté avec subtilité par le chœur des soldats.
Les airs du choeur font preuve de nuances délicates, ce qui est remarquable dans le comique troupier de la mise en scène.
Doris Lamprecht campe une marquise solitaire et nostalgique de l’amour. Malheureusement, on n’entend pas toujours les nombreux dialogues, la salle de l’Opéra Bastille étant trop grande. Dame Félicity Lott en diabolique Duchesse de Crakentop ne manque ni d’humour british, et pour cause…, ni de noblesse dans sa superbe tenue violette. On retiendra la prestation formidable d’Alessandro Corbelli en Sulpice. Le trio mécanique des retrouvailles : « Tous les trois réunis » ajoute à la gaieté gaieté farcesque et supprime l’aspect kitsch du livret.
La mise en scène de Laurent Pelly permet un jeu théâtral subtil qui exploite au mieux la simplicité d’un livret romanesque servie par de beaux décors. Le premier tableau de barricades évoque tout à fait la précarité de la vie tandis que le vide du château de la baronne suggéré apparaît dans l’immensité des ouvertures, et la quasi nudité de la scène à l’exception de la cheminée et du piano, signe du statut social. Les chorégraphies drôles et détournées révèlent astucieusement le rêve des personnages ou leur réification tout en créant sur scène une grande allégresse. Malheureusement, la salle de l’Opéra Bastille est trop grande pour les dialogues qui ne sont pas toujours audibles.
Beaucoup d’allégresse dans cet opéra très kitsch.
Marie Torrès
A lire sur Artistik Rezo :
– La Fille du régiment de Donizetti avec Juan Diego Florez et Natalie Dessay
La Fille du régiment
Marco Armiliato, direction musicale
Laurent Pelly, mise en scène et costumes
Chantal Thomas, décors // Joël Adam, lumières // Laura Scozzi, chorégraphie // Agathe Mélinand, dramaturgie et adaptation des dialogues) // Patrick Marie Aubert, chef du Choeur
Desirée Rancatore (2, 6, 8 et 11 nov.), Marie
Doris Lamprecht, La Marquise de Berkenfield
Dame Felicity Lott, La Duchesse de Crakentorp
Celso Albelo (2, 6, 8 et 11 nov.), Tonio
Alessandro Corbelli, Sulpice
Francis Dudziak, Hortensius
Robert Catania, un Paysan
Daejin Bang, Le Caporal
Orchestre et chœur de l’Opéra national de Paris
Jusqu’au 11 novembre 2012
Tarifs : 5€, 15€, 35€, 70€, 100€, 130€, 150€, 170€ et 180€
Durée : 2h36 avec un entracte
Opéra Bastille
M° Bastille
[Crédit : Opéra national de Paris/ Agathe Poupeney]
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