Sly Johnson – 74
Vous le connaissez probablement déjà sous le pseudonyme de Sly the Mic Budha – ce MC hors norme et beatboxer du groupe devenu culte de la scène rap française, le saïan supa crew. Si vous êtes passés à côté de ce « raz de marée » rythmique et vocal qui, malheureusement, n’est plus, peut-être l’avez-vous découvert lorsqu’il se cherchait encore aux côtés de Camille, en tant que beatboxer ou dans des duos détonnants avec Dee Dee Bridge Water, Rokia Traoré, ou encore le trompettiste Eric Truffaz. Ne vous attendez pas pour autant à un album de rap et/ou de beatbox car ce Sylvère est mort. Il renaît de ses cendres hip hop avec un album nu-soul surprenant dans lequel il ne rappe pas mais… il chante !
Du Hip hop on retrouve quand même dans cet album ses racines : il s’inspire des classiques du funk de la soul et du blues que le disquaire Jean-Philippe Mano lui a fait redécouvrir. Il va même jusqu’à reprendre la mélancolique « Fa-fa-fa-fa-fa » (sad song) d’un des plus grands chanteurs de soul – Ottis Redding. L’autre reprise est un peu plus osée : il transforme la pop song « Everybody’s got to learn sometimes » de The Korgis, qui devient une ballade soul méconnaissable prenante et surprenante.
Eclats d’âme
De son passé de beatboxer, il préserve sa passion presque obsessive pour le rythme, qu’il chante d’ailleurs dans la première chanson de l’album « slave 2 » aux côtés des rappeurs américains de slum village, comme pour faire le lien entre ses deux identités musicales. Mais, au fil des chansons, ce rythme n’est pas là où on l’attend : trop rarement dans sa bouche, on le retrouve plutôt dans les baguettes de Cindy Blackman (Lenny Cravitz) dans la basse de TM Stevens (Miles Davis, James Brown, Tina Turner), et, surtout, dans sa voix profonde et puissante. Elle enveloppe, soutient ou perce les lignes rythmiques et mélodiques savamment arrangées par le mythique Larry Gold (Erikah Badu, The Roots, Justin Timberlake).
On devine par l’équipe de musiciens dont il s’est entouré que le son de l’album est résolument soul et américain. D’ailleurs toutes les chansons sont en anglais. A l’exception d’une, coup de cœur de l’album : 26.06.74. Dans ce second acte de naissance, Sly Johnson slame sur un beat efficace sa vie, son enfance, ses manques.
Mais en français ou en anglais, slamés ou chantés, malheureusement jamais rappés, ses éclats de voix sont comme des éclats d’âme, des éclats de soul : personnels, authentiques, universels.
Lydie Mushamalirwa
Sly Johnson – 74
[embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=mz30-4qkib4[/embedyt]
Sortie le 20 septembre 2010
Articles liés
“Moins que rien” : l’histoire de Johann Christian Woyzeck adaptée au Théâtre 14
L’histoire est inspirée de l’affaire de Johann Christian Woyzeck (1780-1824) à Leipzig, ancien soldat, accusé d’avoir poignardé par jalousie sa maîtresse, Johanna Christiane Woost, le 21 juin 1821. Condamné à mort, il a été exécuté le 27 août 1824....
La Scala présente “Les Parallèles”
Un soir, dans une ville sans nom, Elle et Lui se croisent sur le pas d’une porte. Elle est piquante et sexy. Lui est hypersensible et timide. Il se pourrait bien que ce soit une rencontre… Mais rien n’est moins sûr, tant ces deux-là sont maladroits dans leurs...
“Tant pis c’est moi” à La Scala
Une vie dessinée par un secret de famille Écrire un récit théâtral relatant l’histoire d’un homme, ce n’est pas seulement organiser les faits et anecdotes qu’il vous transmet en une dramaturgie efficace, c’est aussi faire remonter à la surface...