Rencontre avec Yecke : “Les années 2020 ont commencé depuis plus de 3 ans, et on sent déjà qu’il se passe quelque chose”
Yecke est un artiste franco-camerounais de 22 ans, originaire de Paris. Considéré aux yeux du monde comme un rappeur, le jeune auteur-compositeur-interprète puise ses inspirations bien au-delà du rap, qui lui apportent ces sonorités qui font sa force. Également graphiste, peintre et réalisateur, Yecke est un artiste complet avec une vision totale de son art. Nous le rencontrons quelques semaines après “Année 1”, son troisième EP qui fait suite à “Castle FM Vol.1” et “Castle FM Vol.2”.
Yecke, merci d’avoir accepté l’invitation, comment vas-tu depuis la sortie de Année 1 ?
Ça va ! Je vois qu’il y a un peu plus d’engouement que sur les autres projets que j’ai sortis, parce que je me rends compte que c’est de la meilleure musique donc c’est normal. Les scènes s’accumulent, c’est cool.
Je ressens beaucoup d’influences différentes dans ta musique. Qu’écoutais-tu petit et comment l’écoutais-tu ?
Quand j’étais tout petit, j’écoutais vraiment que du Michael Jackson et Prince. Puis Georges Brassens, Gainsbourg, beaucoup d’artistes très connus. J’écoutais aussi de la house du côté de ma mère avec des titres comme Lady de Modjo. J’ai également écouté beaucoup de Fela Kuti, avec mon père dans la voiture. Mon iPod, aussi, était très important pour moi ! Je l’ai encore à la maison d’ailleurs. Ma belle-mère m’a fait découvrir plein de rappeurs. J’ai énormément écouté The Weeknd, j’avais à fond dans les oreilles Opposite of Adults de Chiddy Bang aussi ! Par contre, je n’étais pas du tout dans le rap français pendant les années 2000, il y avait des sonorités que je n’aimais pas du tout, même aujourd’hui.
Beaucoup de choses dans ta musique ont évolué depuis Castle FM Vol.2. Que s’est-il passé depuis ce projet ?
Oui, c’est pour ça que je l’ai appelé Année 1. Le nom vient d’une BD de Batman dans laquelle le poto fait déjà ses affaires, mais le Batman qu’on connait n’est pas encore finalisé. Là, je me dis que j’ai trouvé le truc et que je n’ai pas envie de lâcher ça. Sur les Castle FM j’étais encore un peu éparpillé. J’ai aussi beaucoup plus travaillé les instruments. Je savais déjà jouer du piano mais j’ai aussi appris la guitare, la batterie. Avec ces instruments, tu es encore plus concentré que sur un ordi.
Quelques semaines après la sortie de Année 1, quel regard portes-tu sur ce projet ? Tes objectifs ont-ils été atteints ?
J’aime bien ce projet mais je ne le trouve vraiment pas parfait, loin de là. J’ai peut-être envie d’atteindre un niveau qui est impossible à atteindre, mais quoi qu’il en soit je ne me satisfait pas de ça. Je ne l’écoute même plus aujourd’hui, j’écoute les prochains déjà. C’est toujours la même chose : tu as envie de faire mieux, donc tu fais mieux, puis tu as le seum des précédents. C’est de l’ambition de merde (rires), je ne sais pas si c’est un cercle vicieux ou vertueux, mais quoi qu’il arrive : je travaille.
Justement, aujourd’hui quelle est ta manière de travailler ?
Déjà je fais tout chez moi, de A à Z. Cela me permet de capter toutes les inspirations dès qu’elles sont là. Je n’ai plus qu’à commencer à prendre mon piano et c’est parti. Et le mix, mastering, je gère aussi de chez moi, avec Féfé. Il a d’ailleurs fait 4 prods sur le projet. On bosse ensemble, sur tout. Aussi, au fur et à mesure, j’ai eu plein d’avis de gens qui écoutent, mais qui n’écoutent pas la même chose que moi, qui ne veulent pas la même chose que moi. Alors, pourquoi j’écouterais ces gens ? Moi je ne donne pas d’avis ou de conseil de rap à quelqu’un : fais ton truc, persévère et puis c’est tout. La plupart des gens n’écoutent pas du tout ce que je fais.
Tu parles beaucoup de ton rapport aux autres, au monde, quelle est la place pour toi de ton entourage aujourd’hui ?
Je fais un peu le Calimero dans mes textes. J’explique pourquoi je me plains, mais je me plains quand même. Ça m’amène une question que je me pose beaucoup : si je me sens mieux dans ma vie, qu’est-ce que je vais pouvoir raconter ?
Beaucoup de chemins se dessinent pour le rap dans les prochaines années vu les scènes actuelles, comment imagines-tu la suite pour le rap selon toi ?
Je fais juste confiance aux artistes qui montent, même si ça fait 4-5 ans que c’est un peu la même musique qui tourne en mainstream.
Est-ce que tu vois un de ces chemins prendre plus de place ?
Ouais, tout ce qui est un peu plus organique : des vraies batteries enregistrées, des vrais pianos, des vrais guitares. J’aimerais bien qu’on retrouve une musicalité poussée, parce que là c’est un peu bête et méchant. Je ne me vois pas que rappeur plus tard. Je me vois sur scène, avec une guitare, un piano, et faire mes sons. J’aimerais beaucoup déjà mettre des musiciens sur scène, même si c’est compliqué. De manière générale, je compte développer la scène. Je l’ai travaillé avec La Valentina par exemple, qui a déjà bien bossé le live.
Comment vois-tu la suite pour toi ?
J’aimerais bien pousser tous les médias : ma musique, mes cover, mes clips. En gros j’ai besoin juste d’investissement. On a des projets avec Féfé. J’aimerais bien, dans ma vie, faire un dessin animé. Tu vois Rétroprojecteur ? C’est un peu un test. C’est moi qui ai fait les animations, à la main, image par image ! C’est pas la bonne technique, mais ça donne un grain. Le truc c’est que j’ai envie d’être un super-héros auprès des gens, mais sans l’être vraiment : surprendre les gens en permanence.
Ton documentaire musical préféré ?
Celui de Kanye, la trilogie. Il m’avait bousculé avec The Life Of Pablo.
Ton album préféré de 2023 ?
Il n’y a pas vraiment d’album qui m’a marqué cette année, des trucs cool mais j’ai plus réécouté de la musique des années précédentes, comme Thundercat par exemple.
Ton album préféré sorti il y a plus de 20 ans ?
Erykah Badu – Mama’s Gun. J’aurais même pu le dire pour cette année.
Un entrepreneur qui t’inspire ?
Nekfeu. Trop fort
Un artiste que t’aimerais mettre en avant ?
Mon gars Bayle ! C’est le gars avec qui j’ai commencé le rap.
As-tu un sujet que tu aimerais traiter dont on n’a pas parlé ?
Dans la musique, c’est beaucoup trop fermé. Les gens, même moi je deviens comme ça, sont fermés. Imaginons demain, on se dit tous qu’on arrête de mettre en avant le mainstream. Tu vois ces trucs comme “Les Flammes” : c’est cool, mais c’est pas cool. C’est un présent qui est déjà un peu ancré dans le passé. Il y a un truc qui va venir mais pour l’instant, il faut s’éloigner de ça. Après, c’est juste ce que les gens écoutent. Les années 2020 ont commencé depuis plus de 3 ans, et on sent déjà qu’il se passe quelque chose.
Merci Yecke
Merci à toi.
Propos recueillis par Briac Montet
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