Rencontre avec Jeanette Berger à l’occasion de la sortie de son nouvel album “Do Your Thing”
Connue et reconnue pour sa voix d’une versatilité rare, Jeanette Berger revient avec un second album studio et délivre une musique authentique en fusionnant les genres pour sublimer son répertoire avec une pointe de pop, subtilement teinté de gospel même si elle reste habitée par la soul.
En 2011, de retour de Londres, Jeanette propose un premier EP Blues Prayer. Alors en solo piano-voix, elle captive déjà par sa spontanéité à travers une centaine de représentations. En 2018, elle enregistre son premier album In My Mind à la Maison des Artistes de Chamonix, Studio & Jazz Club chapeauté par André Manoukian. Puis, en 2020, arrive un album live issu de la tournée, véritable réalisation personnelle pour cette artiste de scène.
Quels sont tes artistes de référence ? Ceux qui t’ont influencée ?
De manière générale, je suis tombée amoureuse de la musique de Ray Charles. Ensuite, j’ai découvert (évidemment) Alicia Keys, et plus récemment j’ai été beaucoup influencée par Lianne La Havas et Olivia Dean.
Comment composes-tu tes morceaux ? Les paroles en premier et la musique ensuite ou le contraire…
Les deux à la fois ! Souvent, c’est une phrase qui émerge de façon entêtante, accompagnée d’une mélodie. C’est à partir de ça que je creuse pour construire le reste, les couplets, la suite d’un refrain, etc…
Tes paroles semblent inspirées d’expériences personnelles… ou est-ce que tu te glisses dans la peau d’un personnage à la manière d’une actrice ?
Oui, puisque j’écris les textes, je parle beaucoup d’expériences personnelles, d’émotions aussi, d’instant que j’essaye de figer via une chanson. Mais j’avoue, je me permets parfois d’emmener plus loin les textes, j’aime parler “d’autofiction”, comme pour se réinventer, s’autoriser à rêver.
Quel message souhaites-tu faire passer ?
Fais ton truc ! C’est le titre de cet album, et c’est pour moi tout un concept libérateur, qui fait du bien, que de trouver ce qui te fait vibrer, là où tu te sens bien, et de foncer, sans s’encombrer du “qu’en dira-t-on”, ou du regard des autres. Ça parait si évident, mais on se met trop souvent des limites, dû à l’éducation, l’environnement, ou la peur d’oser tout simplement… et c’est dommage ! Ça donne un pouvoir immense de se sentir soi-même, une force intérieure.
Ta musique a une énergie très spontanée. Est-ce que l’improvisation a une place importante dans ta manière de travailler ?
Je dirais que oui, quand même ! Dans le sens où, de base, j’aime composer mes chansons de façon assez structurée, mais je les mets ensuite dans les mains de mes musiciens, sans forcément savoir où cela va nous mener… Et c’est souvent que les chansons prennent une tournure autre que ma composition originelle, mais c’est je trouve pour lui donner encore plus de profondeur. Et pour ce disque, nous avons enregistré la section rythmique en simultané, ce qui appuie je pense cette énergie de l’instant !
Tu as une grande expérience de la scène. Quelle est la clef pour la transcender devant ton public ?
Je dirais que je tache de rester moi-même : j’ai beaucoup travaillé pour parvenir à débloquer certaines timidités sur scène, voir à l’excès, et cela ne me ressemblait plus. Je pense aujourd’hui enfin trouver ma place sur scène, d’autant plus avec ce répertoire, et assumer de dévoiler qui je suis, entre énergie-puissance et tendresse-émotions. Je crois que c’est ce que le public retient surtout lors des concerts.
Que t’a apporté ton expérience londonienne ?
Londres a été un énorme déclic ! Je terminais mes études, et les mois passés dans cette ville m’ont permis de me faire prendre conscience que je voulais écrire des chansons. Ça m’a aussi évidemment beaucoup servi pour la langue ! c’est là-bas que je griffonnais mes premières paroles sur les quais de gare, déjà tout en anglais, parce que j’ai toujours adoré cette langue et la façon dont on peut tourner les idées, les rimes, etc…
En 2015, tu as enregistré ton premier album sous la houlette de André Manoukian. Que retiens-tu de cette rencontre / collaboration ?
En 2017, oui ! J’ai eu la chance de le rencontrer lors du Cosmo Jazz festival en 2015, et ça a été vraiment moteur pour lancer la réalisation de ce premier album studio. Nous n’avons pas réellement collaboré, mais le studio qu’il chapote à Chamonix, La Maison des Artistes, nous a permis d’aller au bout de ce projet. Un premier album, c’est toujours significatif, mais j’ai hâte qu’il découvre le nouveau !
Peux-tu nous dire quelques mots sur la pochette de Do Your Thing ?
Tout un concept ! En fait, je voulais un visuel fort de sens pour souligner justement tout ce que cet album porte, l’affirmation de soi, le fait de trouver sa voie malgré tout, et d’en être fière. Et j’ai fait la rencontre d’une artiste peintre à Chamonix, qui représente à 100% cette idée-là : reconversion professionnelle, elle se lance dans son rêve de toujours, être artiste peintre. Elle se saisit de matériaux destinés à la benne pour leur donner une seconde vie, et elle se laisse porter par ce que la matière, les formes et couleurs de ses supports lui offrent pour faire apparaitre des visages et des histoires. J’ai été très touchée lors d’une expo de son travail, et je lui ai proposé une collaboration. On s’est ensuite inspirées d’une de ses œuvres pour la photo qui a servi de modèle pour la pochette de l’album… mais elle a suivi le même process créatif, avec de vieilles affiches de concert, un collage au feeling, pour voir ce qui allait apparaitre. Et le visage a trouvé sa place.
Avec ce nouvel album, quelles sont tes ambitions ?
Ce qui m’anime le plus, c’est que ces chansons fassent écho auprès du public. C’est vraiment un disque que je souhaite partager, parce que j’ai compris que tout le monde est sujet aux doutes ou aux épreuves de la vie, mais qu’il est possible de s’en relever, d’aller de l’avant, et de se réaliser.
Dans Do Your Thing, elle se livre et se délivre, d’un passé douloureux sous emprise, de ses heures sombres après la perte d’un être cher, pour faire la part belle à une liberté retrouvée, une sensualité assumée. Tout cela traverse l’incandescent Keep me Burning, le funky Do Your Thing, le planant Way Beyond Intimate, ou encore les balades Sunshine in the dark, She Gave Me, l’autoportrait How Long Will I Wait qui ouvre un album, qui s’il change d’allures ne s’écarte jamais d’une doctrine musicale fondée sur les sentiments, en un dispositif aussi solide qu’efficient, avec trio de cuivres, claviers subtiles avec chœurs gospels et section rythmique sur mesure. Dans cet écrin sublime, la voix à la douce fêlure de Jeanette Berger resplendit, échappe à l’imitation comme à la rétro-mania, en trouvant sa vérité.
Écoutez Do Your Thing ici
Retrouvez Jeanette Berger en concert en France :
Le 23 novembre au Château du Rozier à Feurs, billetterie ici
Le 18 décembre 2024 aux Docks 40 à Lyon, billetterie ici
Le 5 février 2025 au Jazz Radio Docks à Lyon
Le 11 février 2025 au New Morning à Paris
Interview réalisée par Juliette Labati
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