On y était: Mama Festival
MaMa Festival 2015 Du 14 au 16 octobre 2015 Concerts dans différents lieux à Montmartre et Pigalle |
Du 14 au 16 octobre 2015 Le Mama Festival refait la part belle aux découvertes et aux pointures, entre Pigalle et Montmartre. Désormais accessible au grand public en plus des professionnels de la musique, la programmation n’a toujours le défaut que de sa qualité : éclectique et foisonnante, elle condamne ses festivaliers à des dilemmes cornelliens, entre des sets souvent trop courts. Impossible de choisir l’un sans regretter l’autre. JOUR 1 : RADIO ELVIS, BORN RUFFIANS, AARON [Par Arno Byhet] Pass en poche, bracelet au poignet, dernier coup d’œil sur la programmation pour enterrer ses derniers regrets, et c’est parti pour le marathon musical du mois, sous une pluie qui me clouera au lit le reste de la semaine mais ça, c’est une autre histoire. Pour l’instant je file à la Boule Noire, ou joue Radio Elvis, dont la formule trio tourne depuis près de 3 années. Le jeune homme a gagné en assurance et affronte, avec une réelle prestance, son set, dans une salle pleine à craquer. Les chansons de Radio Elvis sont comme des voyages, des aventures en pleine mer « Le Continent » ou « La Traversée » qui parfois nous emportent loin et nous électrisent. Entre fausses accalmies et riffs addictifs des morceaux comme « au loin les pyramides » ou « Goliath » emportent un public déjà conquis. Juste le temps de se frayer un passage pour arriver à la voisine de la Boule Noire, la Cigale, ou Born Ruffians vient à peine de débuter. Le groupe de Toronto joue en formation serrée une power pop hyper bien calibrée et efficace. En pleine promo de leur nouvel album « Ruff » le quatuor enchaine les morceaux de ce quatrième opus sans oublier de glisser quelques petites perles des précédents lp comme « Ocean Deep ». Globalement leur prestation séduit le public Parisien qui a envahi la fosse pour profiter du concert des Canadiens. Aaron à la lourde tâche de clôturer cette première soirée dans une Cigale qui se remplit au compte-goutte, avec de sérieux concurrents dans les salles voisines, comme Pain Noir ou Bruce Brubaker, pour ne citer qu’eux. L’ambiance est clairement affichée : à la fois sombre et bleutée, entre ombre et lumière. Leur nouvel album « We Cut The night » fait la part belle à ces ambiances en apesanteur, tout en retenu et prêt à exploser à chaque instant. Aaron est un peu un fauve tapi dans l’ombre mais prêt à se battre à chaque instant. Le climat n’est clairement pas à la légèreté, même si leur concert est très bien rodé, je quitte la salle au bout de 5 morceaux qui me laissent un peu sur ma faim. Je file donc me trémousser sur le set des Papooz qui entre clavier vintage, pop song « bubble gum » et insouciance me font vite oublier la pluie qui s’abat sur Paris.
JOUR 2 : CHAPELIER FOU, INNA MODJA, SAUL WILLIAMS [Par Lydie.M] L’autre histoire, c’est que la pluie a eu raison d’Arnaud, trop malade pour sillonner les boulevards de Pigalle. Je prends le relais du marathon, qui redémarre à La Cigale, ou Chapelier fou met un point final et orchestral à sa tournée Deltas, xème album ou EP. L’architecte sonore n’est plus seul à sampler les pizzicati et coups d’archets mélodiques de son violon. Ils sont désormais 4 sur scène : 2 violonistes derrière les machines, entourés par un clarinettiste et une violoncelliste. L’horizon des matières sonores organiques à sa disposition est plus large, l’espace de liberté et d’improvisation, plus vaste. Espace dans lequel on voit surtout se ballader une clarinette qui nous dévoile presque tous les recoins de ses sonorités, au service d’un set electro et organique, lyrique et atmosphérique. Après la mélancolique et toujours aussi bouleversante « darling, darling, darling » direction le Backstage of the Mill. Inna Modja y chante et rappe en anglais ou en bambara, avec élégance et retenue, son Mali natal et lointain. Il a inspiré son troisième et nouvel album, aux couleurs musicales chaleureuses et urbaines, à la nostalgie profonde et dansante : Motel Bamako. L’opus semble plus engagé et personnel, alors le live essaye de l’être. Mais le brouhaha du public à l’humeur festive n’offre pas l’écrin intimiste dont auraient besoin les mots d’explication personnelle qu’Inna Modja sème entre ses morceaux, comme des virgules, sincères et pourtant nécessaires. JOUR 3: HEYMOONSHAKER, SLY JOHNSON [Par Lydie.M] Deux princes du beatbox ont éclairé cette dernière soirée de rythm’n bass inoubliables. Le premier prince est anglais : la bouche de David Crowe recrée tous les sons d’une batterie, qu’il martèle sur une voix blessée qui semble porter les cicatrices d’un passé que l’on entend, que l’on perçoit, sans jamais vraiment voir. C’est la voix du bluesman Andrew Balcon, avec qui David forme Heymoonshaker depuis 2008. Le concert tourne parfois à la démonstration de force, noyant par exemple les mélodies du quatuor de cordes, featuring surprise pourtant enthousiasmant. Mais même dans la force, le duo de blues et de beatbox crée la magie, à partir de peu : les cordes électriques d’une guitare, les cordes vocales du chanteur et celles du beatboxer, dont la profondeur nous traverse. L’harmonie du dialogue entre toutes ces cordes, dessinent la finesse et la richesse de compositions, aux arrangements scéniques épurés. Le deuxième prince de la soirée nous vient du saïan supa crew hexagonal. 5 ans après son premier album solo, Sly Johnson revient enfin, en Mic Buddah très attendu. Il nous chante l’esclave du rythme qu’il est, tout en nous démontrant que du rythme, il est en faites le maître. Chanteur, machiniste, beatboxer et beatmaker seul en scène, le poète urbain slame ses fleurs du mal, rappe quelques vers de l’époque KLR, chante son amour du hip hop, sample et improvise les lignes les plus basses, les beat les plus groove. Sa soul est le point final idéal à notre Mama Festival. COUP DE CŒUR : BLONDINO Je ne pouvais cependant pas finir sans vous parler du coup de cœur avec lequel le festival a commencé : Blondino, découvert au cours de la carte blanche accordée au nouveau label Tomboy Lab, au théâtre intimiste de l’Atalante. Vêtue de noir, entourée de ses musiciens, la chanteuse Typhaine Lozupone touche et berce une salle comble, avec les vagues de sa langueur parfois électrique, de sa mélancolie sans artifices, de sa poésie intérieure, chantée d’une voix grave, sobre et habitée. [embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=FGadXGOitCI[/embedyt] Crédits photos: Gaëlle Lepetit |
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