C’est un programme russe interprété par des musiciens russes. Mikhaïl Rudy a fui l’union soviétique il y a trente-cinq ans. Français d’adoption, il n’en demeure pas moins l’un des grands défenseurs du répertoire russe, en France notamment. La salle Pleyel est pleine pour venir entendre un musicien qui a su se rendre populaire tant par son histoire que par son talent et sa personnalité.
Le Premier Concerto pour piano de Tchaïkovski est certainement l’une des partitions les plus populaires du genre. Souple, les épaules très basses, et les mains fuyantes sur le clavier, il faut quelques instants pour que le soliste et l’orchestre se mettent d’accord sur un tempo lors de la célèbre introduction. Le second thème est en revanche parfaitement cohérent. Rudy joue sa partie avec une très grande retenue expressive, une belle profondeur dans toutes les phrases, mais une certaine confusion dans les octaves, comme s’il souhaitait s’en débarrasser rapidement et nous faire comprendre que là n’était pas l’essentiel. En somme, le contraire de ce que font beaucoup de jeunes et brillants pianistes d’aujourd’hui.
A partir du thème en ré b majeur, une amplitude exceptionnelle se dégage de l’orchestre, également dans les nuances les plus piano. Le génie mélodique du compositeur russe saisit l’audience jusqu’au roulement de timbales de la modulation en mi majeur, magnifiquement rendu.
La cadence est d’une belle profondeur expressive, même si l’on note quelques imprécisions dans les traits pianistiques. Les musiciens sont applaudis dès la fin du premier mouvement.
Les deuxième et troisième mouvements sont abordés de façon identique. Les cordes, avec sourdines, sont encore une fois admirables dans l’Allegro vivace du deuxième mouvement, les effets de timbres avec le piano sont très réussis. Le jeu du pianiste est souple, presqu’en retrait, dans le troisième.
Très applaudi, Mikhaïl Rudy interprète en bis le Nocturne en réb majeur de Chopin.
Les quatorze extraits de Cendrillon ont été choisis, vraisemblablement par le chef, à partir des trois suites et du ballet lui-même. Ce fut globalement une interprétation saisissante.
Alexander Vedernikov est un chef russe de quarante-sept ans. Directeur musical du Bolchoï dans les années 2000, il dirige régulièrement l’Orchestre National de Russie, et dans les pays scandinaves.
Dès l’introduction, les sonorités sont étoffées. Le chef semble connaître parfaitement la partition. Le fameux Pas de châle est remarquable de cohésion. Les choix des extraits offrent une intense progression dramatique, jusqu’au douze coups de Minuit. Les solistes se font également remarquer, notamment Ayako Tanaka, le violon solo. Que se soit dans une grande amplitude, ou dans un caractère burlesque (Le prince et les cordonniers), l’orchestre montre toute sa maîtrise. C’est un sans faute.
De nombreux rappels saluent Vedernikov, très applaudi également par les musiciens.
Cendrillon
Piotr Ilyitch TCHAÎKOVSKI, Concerto pour piano et orchestre n°1
Serge PROKOFIEV, Cendrillon (extraits du ballet)
Mikhaïl Rudy, piano
Orchestre Philharmonique de Radio France
Alexander Vedernikov, direction
Vendredi 6 janvier 2012 à 20h
Tarifs : 45€, 35€, 25€, 17€ et 10€
Concert en direct sur France Musique
Salle Pleyel
252, rue du faubourg Saint-Honoré
75008 Paris
M° Ternes