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Marshall’Ombre : “Je me fais vieux mais j’aime trop cette merde”

© Pierre Bertho

Rencontre avec Marshall’Ombre, l’un des doyens de la scène rap francophone. Présent au Rap Contenders depuis la cinquième édition, il nous parle de son vécu et de sa vision du battle rap en 2020. 

Marshall’, comment as-tu commencé le rap et la scène ?

J’ai commencé le rap aux alentours de 1997 avec mon groupe de l’époque, “La Doxa”. On a sorti des EP et des albums, fait pas mal de concerts et de premières parties. En 2003, je me suis laissé tenter par les battles en impro. J’y ai pris goût jusqu’en 2007, en écumant les scènes parisiennes et de province.

Tu as fait ta première apparition au RC 5. Comment as-tu découvert le Rap Contenders ? 

J’ai découvert les RC à l’édition 2. J’ai tout de suite accroché car je suivais pas mal les ligues américaines Grind Time avec Conceited, Arsonal… On est donc entré en contact avec Dony, qui m’a booké sur une draft où Stermah n’a pas pu venir, puis une autre où Rebel n’est pas venu non plus. Du coup, il m’a booké d’office au RC5 contre Vincenz.

Au RC6, tu reviens en duo avec Arcanes. Depuis, vous avez évolué en duo plusieurs fois, en France et au Québec. Comment l’affinité et le duo se sont-ils développés au début ?

J’avais rencontré Arcanes au “End Of the Weak” de Grenoble, peu de temps après mon battle contre Vincenz. On a un peu échangé, par la suite on a communiqué sur Messenger et il a battle au RC Espoir. Il m’a dit que sa prestation avait été remarquée, et en parallèle avec Dony, on parlait de mon battle au RC6. Si je me souviens bien, il m’avait proposé Crescendo, puis on a parlé battle double et il y a eu l’idée que je fasse équipe avec Arcanes. Il était chaud et Dony a validé. Du coup, on s’est captés pas mal de fois pour bosser notre battle, à répéter des heures entières nos croisements, positionnements, etc.

Dans ta perf du RC 9 contre Aladoum, l’un de tes angles, c’est son côté one-man-show. Quel regard portes-tu sur l’évolution de la scène, avec des emcees qui veulent revenir à l’essence du battle, l’écrit, et s’éloigner du simple humour ?

Je pense que si tout le monde tend vers ça, ce sera l’essoufflement. Ce qui fait l’engouement de tout un public, c’est la diversité. Tu as des lyricistes, des agressifs, des plus comiques… Bref, il faut garder une palette large. Si tout le monde se met à faire le même délire, ça va être des battles de copycat. Du coup, la nouvelle génération est bonne : elle ramène tous les ingrédients pour que la recette marche, l’écrit pour certains et le one-man-show pour d’autres, voire un savant mélange des deux et c’est le feu !

Tu as alterné entre battles doubles et en solo. Quelles sont tes préférences dans chaque discipline ?

En battle double, il n’y a que du plus. On a une complicité et une alchimie que peu de gens arrivent à avoir. C’est plus simple d’écrire à deux mais il faut que ça prenne, il faut que tout soit réglé au millimètre près, que tout soit synchro. Il faut que le duo forme une seule entité, c’est ça le plus dur. Aujourd’hui, Marsh’canes a marqué les esprits car notre duo n’est pas “Marshall et Arcanes” mais une vraie fusion. On a toujours gardé un gros rythme, une dynamique et on a jamais choke, pas d’hésitation, ça frappait. C’est ça le plus dur à faire en battle double, ne pas donner l’impression que chacun lâche des quatre mesures. Pour mes solos, j’ai eu des gros moments et des moins bons. Ça dépend de la stratégie que je décide d’adopter, selon l’adversaire, et des fois je me suis planté ou j’ai mal amené et interprété mes lignes. Puis ces derniers temps, j’étais très laid-back et ça m’a pas mal desservi. Je dois retrouver cette agressivité des débuts. Je me fais vieux mais j’aime trop cette merde. À suivre..

Est-ce qu’on reverra Marshall’ au RC ?

J’espère revenir au RC. J’ai annoncé ma retraite au RC16 mais c’était pas prévu, pas prémédité. Je ne sais pas ce qui m’a pris… Mon pote était sur la scène et direct il m’a regardé et dit : “Tu pars en couilles ?”. Je ne sais pas ce qui m’a pris ! Et le pire, c’est que je conclue avec un “Adieu”. Mais non, j’ai toujours envie de performer.

Que penses-tu de l’évolution récente du battle rap, que ce soit la nouvelle génération, les nouvelles ligues, les nouvelles dérivations comme Maadou Live ?

Je dirais que le battle rap ne s’est jamais aussi bien porté. Les nouvelles générations élèvent le niveau. L’engouement autour de cette discipline n’a jamais été aussi fort, ça se sent sur les forums et c’est un régal de voir que des acteurs de la discipline comme Maadou lancent leurs chaînes YouTube pour alimenter sans cesse les échanges et débats autour du battle rap. Le parti pris des Rap Contenders avec Vimeo a également beaucoup contribué à donner plus de moyens pour la qualité des événements, mais aussi du rendu des vidéos, etc. Je crois vraiment que c’est une bonne période pour le battle rap et que de très bonnes choses vont encore voir le jour. La ligue de battle de compliments, montée par Maras, est une très bonne chose aussi. Big up à Gary Lee et la TakeOver à Lyon, il faut que les ligues mineures continuent de pouvoir faire émerger de nouveaux potentiels. Big up à la 59 Arena également. Longue vie au Rap Contenders en tout cas. Et au battle rap en général.

Tu continues à faire de la musique. As-tu des projets ou s’agit-il seulement de continuer un exercice passionné ?

J’ai toujours plein de projets. Certains aboutissent, sans finalement sortir. D’autres s’avortent relativement vite. Je suis sur un projet actuellement, ça écrit, ça bricole… Je ne m’avance pas, je fais à mon rythme.

Enfin, la question recommandation : qu’est-ce que tu écoutes en ce moment ?

En ce moment je me réécoute beaucoup de Yelawolf. Je suis aussi à l’affût des vidéos freestyles d’Hermano, qui mériteraient une plus forte exposition encore.

Pour retrouver les performances de Marshall’, rendez-vous ici.

Propos recueillis par Loïck Piovesan.

 

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