Maeva : “Je chante mon histoire comme dans un journal intime”
Rencontre avec Maeva, auteure-compositrice-interprète franco-britannique de 25 ans. Basée à Londres depuis maintenant plus de 2 ans, elle vient tout juste de sortir son premier EP Warrior.
Peux-tu nous raconter ton parcours ?
J’ai commencé la musique à l’âge de 4 ans, à Genève. J’ai choisi le violon d’abord, puis plus tard, j’ai suivi des cours “chanter en s’accompagnant” à l’Institut Jaques-Dalcroze, je vous le promets, ça s’appelle vraiment comme ça ! (Rires)
Le cours consistait, comme son nom l’indique, à jouer au piano pour s’accompagner en chantant. À ce moment-là, je n’avais jamais vraiment pris de cours de chant, mais j’adorais déjà chanter. Ma mère dit souvent que j’ai commencé à chanter dès que j’ai commencé à parler ! En parallèle, je commençais à écrire et composer des chansons en français, que je chantais au Lycée pendant les pauses déjeuner sur un piano qu’on avait à disposition. Les gens venaient m’écouter, avaient du plaisir et moi aussi. Un jour, le prof à Jaques-Dalcroze nous a fait partir d’un poème pour réaliser une chanson, et ça a été un déclic pour moi. Pendant mes études à la Haute école de Musique je me suis produite avec un ami guitariste dans différents cafés, fêtes de village… nous faisions des covers et cela a duré jusqu’à que cet ami parte vivre ailleurs.
Mon parcours a pris une toute nouvelle tournure en 2017, année qui a été particulièrement difficile, j’ai perdu beaucoup de personnes qui m’étaient chères. Dans cette période difficile j’ai eu un déclic ; je suis retombée sur un brouillon d’un début de chanson en anglais. Je m’étais arrêtée en cours parce que je ne la trouvais pas terrible, je n’avais plus d’inspiration. Finalement je l’ai terminée et c’était la première fois que j’avais envie d’enregistrer quelque chose, de le partager. Cette chanson c’est On your Own.
Qu’est-ce qui t’as influencé à passer du français à l’anglais pour tes textes ?
Ma mère est anglaise. J’ai donc toujours regardé les films en VO et beaucoup de mes influences musicales sont en anglais (Beyoncé, Amy Winehouse, Adèle et Jennifer Lopez notamment). J’ai associé l’anglais à cette façon de communiquer rythmée, belle et directe. Chanter en anglais, c’est pour moi une manière de dire les choses plus directement, sans devoir travailler les mots comme j’ai la sensation qu’il “faut” le faire en français pour que le résultat soit bon. Beaucoup d’artistes que j’admire ont cette capacité de jouer avec les mots, les rendre beaux, intéressants (Pomme, Jaques Brel, Nekfeu). Quand on écoute Amy Winehouse, on a presque la sensation qu’elle nous parle directement. L’Anglais a cette force en musique. Ce choix est aussi marqué par mon amour de la comédie musicale.
Quel est ton lien avec le monde de la comédie musicale ?
J’ai découvert la comédie musicale à l’âge de 15 ans lors d’un voyage chez ma famille à Londres. Je suis tombée amoureuse de cette pratique, pour moi c’était incroyable de voir la danse, le théâtre et le chant réunis sur scène. Aujourd’hui je suis diplômée de l’ICMT (International College of Musical Theatre) à Londres et je vis ici. Grâce à cette école j’ai pu prendre des cours de chant, travailler ma voix, la développer afin de pouvoir faire de véritables choix, d’avoir une palette que je peux utiliser comme j’en ai envie.
Comment décrirais-tu ton univers musical ?
Toutes mes chansons parlent de quelque chose de réel, je ne suis pas un auteur qui peut écrire pour parler des autres. Brel il va raconter une histoire, j’admire ça, il peut parler de lui comme de l’histoire d’un marchand. Je n’en suis pas encore là, je ne sais pas si j’y serai ou si j’en aurai envie un jour. Toutes mes chansons c’est ma vie, mon journal intime. Je n’ai donc pas le besoin ou l’envie de sortir une nouvelle chanson toutes les semaines. Je n’ai pas envie de sortir quelque chose qui n’est pas sincère. Je préfère attendre qu’il y ait une réelle émotion, quelque chose à dire. Je ne vois pas le principe de chanter pour chanter, pour faire des ventes, être célèbre. Le but est qu’on écoute mon histoire, qu’on se dise “moi aussi je comprends”.
Comment est né l’EP Warrior ?
L’EP est parti de l’Intro, simple production constituée de beats et d’improvisations vocales que j’ai co-produit avec LEX et Moh Ciss. Nous étions au studio un soir, ils ont branché le clavier et m’ont demandé si je voulais essayer de poser de la voix dessus. Quelque chose était né ! Cet extrait s’est développé quelques mois plus tard et Warrior est né.
Platform 2 est né de ma vie à Londres, ici, loin de ma famille, mes proches, mon ex, dont j’avais dû me séparer car nos rêves nous emmenaient dans des directions trop éloignées.
Deep Water est parti d’une très grosse déception amicale et d’un univers plus sombre, mêlé de up and down… Dans mon école, je me suis retrouvée seule et isolée suite à cette déception amicale. Les midis, pour ne pas être gênée de manger seule à la cafétéria, j’allais manger au bord du canal proche de l’école. Dans les jours les plus sombres, j’avais envie de sauter dedans. Mais une fois je me suis demandée, et si le canal n’est pas si profond ? Faudra que j’assume de retourner en cours trempée ! (Rires)
Je parle de dépression dans ma musique car c’est un sujet qui met les gens mal à l’aise et qui fait qu’on n’ose pas en parler. En musique, c’est plus courant. (Billie Eilish, Lorde) Et là, quand tu en parles, tout le monde écoute.
Quels sont tes futurs projets ?
Je m’intéresse de plus en plus à la production (beat making ndlr), j’aimerais produire moi-même, les femmes sont trop rares dans cette industrie encore ! (Seulement 2% dans la production/beats making). Un de mes projets est de faire des versions acoustiques de mes chansons, mais ce projet est ralenti par la pandémie : les personnes avec qui je travaille sur ce projet (Théo Kummer à la guitare bass et édition, Luvango, stroz et Iamheaven pour la production et beat making) sont en Suisse et nous ne pouvons donc pas beaucoup avancer le projet pour l’instant. Mais j’ai hâte ! Ce sera la première fois que je m’accompagnerai au piano sur mes chansons ! Aussi, j’ai trois singles qui vont sortir prochainement.
Plus d’informations sur Maeva ici
Propos recueillis par Elena Moret
Articles liés
Nick Cave offre une grand messe jubilatoire à l’Accor Arena de Paris
Il existe des artistes inclassables, totalement hors normes, et Nick Cave appartient à cette catégorie. Après un passage remarqué à Rock en Seine en 2022, il est revenu à Paris ce 17 novembre 2024. Sa voix de velours, de...
Un week-end à l’Est… en plein Paris ! Édition 2024
Célébrant les cultures de certains pays d’Asie et d’Orient pour la huitième fois d’affilée, le festival Un week-end à l’Est a décidé de mettre à l’honneur cette année, Erevan, mais plus généralement, l’Arménie. A l’instar donc des éditions précédentes,...
“Travelling song”, le concert de musique de la Renaissance au Temple de Port-Royal
Avec « Traveling Songs », nous proposons un voyage musical à travers l’Europe de la Renaissance, autour de pièces très célèbres de la fin du XVe siècle au début du XVIIe siècle, dont les mélodies ont été reprises et...