Les Pêcheurs de perles – Bizet – Opéra Comique
Entre une Muette de Portici d’Auber confiée à l’Italienne Emma Dante et les Pêcheurs de perles de Bizet conçu par le Japonais Yoshi Oida, l’Opéra Comique affectionne décidément les metteurs en scène étrangers. Une sage idée qui peut réserver des grands moments d’opéra (La Muette) comme laisser sur sa faim (Les Pêcheurs).
Pour clore sa saison 2011-2012, l’Opéra-Comique reprend donc Les Pécheurs de perles écrit en trois mois par Georges Bizet, alors âgé d’à peine 25 ans. Le livret (qui lui est alors imposé) conte l’histoire d’une amitié impossible entre Nadir et Zurga, deux pécheurs amoureux de la même prêtresse (Léïla) venue prédire la bonne récolte sur l’île de Ceylan. Créée au sein du Théâtre-Lyrique et remportant un succès honorable en 1823, l’œuvre renaît de ses cendres après la mort de son compositeur pour faire le tour du monde avant de s’installer à l’Opéra-Comique dans des mises en scène somme toute classiques.
Avec cette nouvelle production, ne cherchez pourtant pas d’exotisme ou de folklore à n’en plus finir car vous n’en trouverez pas Salle Favart. A la place, Yoshi Oida a préféré opter pour une mise en scène sobre et feutrée faisant écho à la culture arabe, mais avant tout japonaise. Sur scène, une toile rappelant celle du peintre chinois Zao Wou-Ki nous fait donc face, une coupure entre le mur et le sol servant à symboliser la mer et ses vagues ondulantes.
Redite
Au premier acte, le parti-pris fonctionne. On suit Zurga de bout en bout et l’on fait connaissance avec son peuple et le vaillant Nadir. Le chœur Accentus s’impose d’emblée, le duo d’amitié entre les deux chanteurs André Heyboer (Zurga) et Dmitry Korchak (Nadir) Au fond du temple saint emporte au son de sa harpe et de la flûte traversière tandis que la voix italianisante de Sonya Yoncheva (Léïla) nous entraine presque au septième ciel. Seulement voilà : la pureté initiale du premier acte prend des allures de redites après l’entracte…
Parfois grossière (Nourabad surprenant le couple Nadir/Leïla, Zurga qui récolte les perles des huitres), la direction d’acteurs se contente de simples mouvements classiques empêchant les solistes de s’exprimer comme il se devrait, essentiellement lors des trois duos qui parcourent l’œuvre de Bizet. Ajoutez à cela un trac perceptible et une chorégraphie répétitive (mais onirique) et vous arrivez au final avec une production en demi-teinte.
Heureusement, celle-ci est sauvée par un trio de jeunes chanteurs admirables qui sans nul doute feront des miracles au fil des soirs, le tout accompagné de la savoureuse direction nostalgique et mélancolique de Leo Hussain à la tête de l’Orchestre Philharmonique de Radio France. Dépêchez-vous donc de les entendre car il ne reste que cinq représentations. Pour la suite, il faudra attendre décembre 2012 pour découvrir la prochaine saison de l’Opéra-Comique.
Edouard Brane
Twitter : cinedouard
Les Pêcheurs de perles
Musique de Georges Bizet
Livret d’Eugène Cormon et Muchel Carré
Leo Hussain, direction musicale
Yoshi Oïda, mise en scène // Tom Schenk, décors // Fabrice Kebour, lumières // Daniela Kurz, chorégraphie
Avec : Sonya Yoncheva (Leïla), Dmitry Korchak (Nadir), André Heyboer (baryton – Zurga) et Nicolas Testé (basse – Nourabad)
Accentus, Orchestre Philharmonique de Radio France
Introduction à l’œuvre par Agnès Terrier 40 minutes avant chaque représentation
Les 18, 20, 22, 26 et 28 juin 2012 à 20h
Le dimanche 24 juin 2012 à 15h
Tarifs : 115€ // 95€ // 70€ // 40€ // 15€ // 6€
Location : www.opera-comique.com ou 08.25.01.01.23
Opéra Comique
75002 Paris
M° Richelieu Drouot ou Quatre Septembre
[Crédit photos : Pierre Grosbois]
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