Le Lac des Cygnes – Opéra Bastille
Dès l’ouverture, le rêve s’incarne : en fond de scène, le magnifique décor de toile peinte d’Ezio Frigerio fait apparaître un lac mystérieux plongé dans la nuit, alors que deux oiseaux s’envolent furtivement à tire d’ailes, un noir, un blanc. En écho, cette même image bouleversante clôture tragiquement le ballet, laissant le Prince Siegried anéanti sur scène.
Le premier tableau affiche volontairement, parmi ses sujets, l’ennui du prince incarné avec grâce et noblesse par Karl Paquette, gouverné manifestement par une mère très puissante. Le pas de trois remarquable de Nolwenn Daniel, Mélanie Hurel et Emmanuel Thibault, très frais, éclatant, apporte pourtant un vrai souffle sur le plateau.
Les costumes somptueux et raffinés de Franca Squarciapino concourent pleinement à marquer l’opposition de deux univers : le monde de la cour bruyant, coloré, avec ses nombreux sujets d’un côté, et de l’autre l’amour, un seul être, unique. On retrouve ensuite ce même étourdissement dans les divertissements des danses de caractère, espagnole, napolitaine ou de la Mazurka très réussies du troisième acte.
Beaucoup d’émotion
« Ce fut comme une apparition »… On pourrait reprendre la phrase de Frédéric Moreau de L’Éducation sentimentale lorsque Émilie Cozette en Odette d’une extrême sensibilité, d’une grâce inouïe, pénètre sur le plateau. Sublime de perfection, tout son être délicat irradie de lumière, de douceur et de pureté. Son interprétation est sans faille. On la découvre double et manipulatrice dans le rôle d’Odile. Elle multiplie avec frénésie et une extrême précision les tours sur elle-même, elle vole dans les bras de ses partenaires, elle avance avec pudeur avec ce mouvement de bras si gracieux. Sa prestation des derniers vacillements du cygne, épuisé, a fait naître beaucoup d’émotions.
Stéphane Bullion en Rothbart a été très applaudi. Ténébreux et puissant, une grande force émane de sa personne. La chorégraphie souligne l’aspect maléfique du personnage. Le danseur étoile étreint le Prince qui s’effondre dans ses bras alors qu’il cherchait à le tuer. Les danseurs font naître cette ambiguïté et le trouble.
Enfin, la magie du ballet repose sur la chorégraphie des cygnes extrêmement bien réglée, sur ces figures symétriques, alignées, tantôt courbes, rectilignes, triangulaires, cette exactitude des mouvements harmonieux, cette douceur et pudeur de l’animal incarné. Un moment de féérie pure.
Marie Torrès
Le Lac des Cygnes
BALLET EN QUATRE ACTES
SUJET DE VLADIMIR BEGICHEV ET VASSILI GELTSER
PIOTR ILYITCH TCHAIKOVSKI Musique
RUDOLF NOUREEV Chorégraphie et mise en scène (Opéra national de Paris, 1984) d’après MARIUS PETIPA et LEV IVANOV
EZIO FRIGERIO Décors
FRANCA SQUARCIAPINO Costumes
VINICIO CHELI Lumières
LES ÉTOILES, LES PREMIERS DANSEURS ET LE CORPS DE BALLET
ORCHESTRE COLONNE
SIMON HEWETT Direction musicale
Du 29 novembre 2010 au 5 janvier 2011
Réservations : 08 92 89 90 90 (0,337€ la minute)
Tarifs : 89 €, 74 €, 62 €, 50 €, 34 €, 20 €, 18€, 10€, 5€
Opéra Bastille
Place de la Bastille
Métro Bastille
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