La Veuve Joyeuse – Franz Lehar – Opéra Garnier
Ah La Veuve joyeuse ! Douce opérette dans le style viennois comme on les aime avec ses bals, ses somptueuses réceptions et ses personnages débridés ! Créée en 1905, elle apporta la gloire à son compositeur Franz Lehár. Œuvre fétiche de nos amis d’outre-Rhin, il n’est pas difficile de la trouver à l’affiche si vous voyagez en territoire germanique. En France, l’œuvre se fait plus discrète et n’est entrée au répertoire de l’Opéra de Paris qu’en 1997 pour être reprise en 1998 avant de refaire son apparition… en 2012 ! Quinze ans séparent donc la première de cette production à aujourd’hui. Quinze ans que ces décors sont restés cloitrer dans des containers attendant sagement de ressortir de ces caisses humides.
S’il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark, comme le rappelle le personnage de Danilo, il y a quelque chose de poussiéreux sur la scène de l’opéra Garnier. Oui, nous sommes en plein Bauhaus, et oui les décors sont du style Art déco. On perçoit pourtant la fin d’une époque en voyant ce décor fatigué où de nombreuses portes battantes (de cuisine ?) sont constamment franchies par les personnages. Désuète, la production de Lavelli manque de fraîcheur et de contemporanéité. Difficile d’en trouver en même temps quand on voit le peu de place qu’accorde l’Opéra de Paris aux jeunes metteurs en scène. Niveau chorégraphique, le kitsch est de mise, excepté lors d’un final particulièrement réussi qui, il faut le dire, en met plein la vue ! L’œuvre siège-t-elle pourtant à l’Opéra Garnier ? Pas si sûr, car La Veuve Joyeuse est aussi une opérette intime qui pourrait aussi avoir sa place sur la scène de l’Opéra-Comique.
Pour le Bo Skovhus
Alors que la mezzo-soprano Susan Graham était prévue dans le rôle d’Hanna, la chanteuse américaine a dû déclarer forfait in extremis, remplacée au pied levé par Christina Dietzsch-Carvin. Le résultat n’est bien entendu pas le même. Le désir et la prise de risque sont pourtant bien là même si sa remplaçante manque de clarté et de portée vocale. Il en est tout autre pour le reste de la distribution. Au premier plan, il y a le baryton Bo Skovhus. Il porte la production sur ses larges épaules. Il a tout pour plaire : le timbre, la prestance, le charme, la classe et fait un excellent danseur (il suffit de le voir dans le Cosi fan tutte mis en scène par Claus Guth à Salzbourg capté en DVD). Nul doute qu’il ferait un bon présentateur aux Oscars au côté l’acteur danseur Hugh Jackman !
Pour leur début à l’Opéra de Paris, la soprano Ana Maria Labin et le ténor Daniel Behle forment un sublime couple en Camille et Valencienne. La maîtrise est là, la langue allemande parfaitement prononcée et le timbre assuré. Quant à Harald Serafin, après l’avoir incarné plus de 1700 fois, il semble être devenu le baron Mirko Zeta. Malgré son âge avancé, il a su garder une fraîcheur intacte à l’inverse de cette production ennuyeuse et fade. Nous ne sommes plus dans l’art déco, nous sommes passés dans l’art rétro.
Edouard Brane (Twitter)
La Veuve Joyeuse
Direction musicale : Asher Fisch
Mise en scène : Jorge Lavelli
Avec Harald Serafin (Baron Mirko Zeta), Ana Maria Labin (Valencienne), Bo Skovhus (Graf Danilo), Susan Graham / Christina Dietzsch-Carvin (29 fév.) (Hanna Glawari), Daniel Behle (Camille de Rosillon), Edwin Crossley-Mercer (Vicomte Cascada), François Piolino (Raoul de Saint-Brioche), Francis Bouyer (Bogdanowitsch), Claudia Galli (Sylviane), Francis Dudziak (Kromow), Andrea Hill (Olga), Fabrice Dalis (Pritschitsch), Michèle Lagrange (Praskowia) et Franz Mazura (Njegus)
Décors : Antonio Lagarto // Costumes : Francesco Zito // Lumières : Dominique Bruguière // Chorégraphie : Laurence Fanon // Chef du Chœur : Patrick Marie Aubert
Du 29 février au 2 avril 2012
Tarifs : 10€, 25€, 45€, 70€, 115€, 140€ et 180€
Jour de représentation et réservation
Durée : 2h30 avec un entracte
Opéra Garnier
Place de l’Opéra
75009 Paris
M° Opéra
[Crédit photo : Opéra National de Paris / Julien Benhamou]
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