La Covid au service de la créativité dans la musique live
Le virus a métamorphosé de nombreux secteurs de notre société, mais s’il y a bien un domaine qui a été bouleversé, c’est celui de la musique live. Les mesures sanitaires ont laissé bon nombre de séquelles chez les acteurs du spectacle vivant. Néanmoins, à chaque crise apparaissent des opportunités et des changements.
De manière générale, les acteurs de l’industrie musicale pratiquant le “360”, c’est-à-dire ceux présents à la fois sur la musique enregistrée, le live, l’édition, et l’audiovisuel, ont pu sortir la tête hors de l’eau et s’adapter au contexte. Parmi eux, nous pouvons citer le gros indépendant Wagram Music ou les majors Universal Music, Sony et Warner. Le géant de la distribution numérique Believe est l’un des grands gagnants. Positionné depuis sa création sur le streaming, il s’apprête dès 2021 à entrer en bourse. Depuis peu Believe compte faire évoluer son champ d’action dans la promotion de ses artistes, notamment avec le livestream. Car oui, le développement exponentiel du « livestream » est l’une des métamorphoses majeures de la musique de l’année 2020. Dans la musique, le terme « livestream » désigne la diffusion d’un concert ou DJ set en live sur une plateforme internet quelconque.
Auparavant réservé à la promotion d’artistes émergents ou de nouvelles sorties, le livestream existe depuis plusieurs années. Il apparaît d’abord avec les radios ; ce sont d’ailleurs ces dernières qui développeront leurs propres formats vidéos pour sortir du côté promotionnel afin d’aller chercher l’aspect performance, à l’instar du fameux Tiny Desk de la radio NPR ou encore le KEXP Live Performance de la radio du même nom. Le paysage audiovisuel et les artistes se sont rapidement adaptés face à l’absence de spectacle vivant. En France, il nous suffit de citer parmi d’autres Arte Concert et ses formats Ground Control, ou encore la nouvelle chaîne éphémère de France télévision Culturebox.
Que le concert soit diffusé sur une plateforme de télévision, sur une chaîne Youtube ou sur un compte Instagram, les livestreams musicaux sont une opportunité pour les musiciens de faire vivre leurs créations, maintenir le lien avec les fans et toucher de nouveaux publics. Ils peuvent également être annoncés comme un acte de solidarité pour lutter contre la fermeture des salles et des clubs. Parfois, ce sont aussi des moments d’échanges entre les artistes et leur public voire des cours de musique, comme ce qu’a proposé Thomas Dutronc par exemple.
La crise a fait exploser l’usage du livestream et a repoussé ses limites. L’audience s’étant déplacée en ligne, il a fallu de manière urgente repenser l’expérience du téléspectateur face à la musique live (spoiler : les Américains sont plutôt forts pour ça). D’autant plus que les sponsors et les chaînes de télévisions ont accordé davantage de crédit au livestream et à de nouvelles formes de contenus originaux.
En effet, nous avons affaire à de plus en plus de lives créatifs et techniquement élaborés. Ces derniers vont au-delà de la simple prestation musicale, offrant au spectateur une expérience unique et immersive. En témoignent les récentes prestations de The Weeknd, comme celle livrée au American Music Awards en novembre dernier ou encore celle donnée il y a quelques semaines durant le SuperBowl. Des shows mémorables, à l’américaine et imaginés par la tête pensante des lives de l’artiste, Alex Lill.
On peut également évoquer la magnifique performance champêtre de Moses Sumney, pour le festival en version digitale de Planet Afropunk le 30 octobre dernier.
Du côté anglais, on pourrait citer le live de Liam Gallhager dans un Londres confiné, à bord d’une péniche sur la Tamise.
https://www.youtube.com/watch?v=Ka0bjl19bIM
En France, Derek Barbolla, fondateur de Cercle, n’a pas attendu la pandémie pour nous livrer des performances lives immersives et spectaculaires . Mais il faut avouer que le concept s’adapte plutôt bien à la période et nous a permis pendant les derniers confinements d’assister à une DJ set de Sébastien Léger face aux pyramides de Gizeh ou encore celle de Ben Böhmer à bord d’une montgolfière survolant la Turquie.
Alors d’accord, nous n’avons pas la possibilité d’interagir physiquement avec l’artiste, ni de profiter de la douce chaleur humaine d’un pogo, mais s’il fallait dénicher un point positif à cette période trouble, c’est bien cette capacité à fusionner le son et l’image de manière toujours plus créative.
Marco Farkas
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