La Clémence de Titus, les lumières de Mozart célébrées par Denis Podalydès
La Clémence de Titus De Mozart, livret de Mazzola d’après Metastasio et Cinna de Corneille Mise en scène de Denis Podalydès Avec Kurt Streit, Karina Gauvin, Julie Fuchs, Kate Lindsey, Julie Boulianne et Robert Gleadow Vendred 12, Tarifs : 5 à 140 euros Réservation : Durée : 2h30 Théâtre des Champs Elysées |
Jusqu’au 18 décembre 2014
En 1791, à la même époque que sa « Flûte Enchantée », Mozart répond à une commande de Léopold II pour son couronnement en Bohême. Dans cet opéra plutôt sérieux, qui n’a pas la magie de la Flûte, le pouvoir absolu, la trahison et l’amour se chevauchent dangereusement. Un huis clos intime et étouffant remarquablement mis en scène par Denis Podalydès. Vitellia, une fille d’empereur romain qui a été détrôné et assassiné, rumine sa vengeance contre l’actuel souverain, Titus, et sa maitresse Bérénice. Elle rêve de l’assassiner et confie son projet à Sextus, qui est amoureux d’elle et qui est ami de Titus. Toute l’intrigue de l’opéra se concentre dans le choix cornélien du personnage de Sextus, forcé à trahir et à tuer par amour. Désireux de mettre en valeur la ligne sentimentale des personnages, l’acteur et metteur en scène Denis Podalydès a choisi de les faire évoluer dans un décor d’hôtel mussolinien des années 30, aux sombres boiseries monumentales crées par Eric Ruf où bruissent rumeurs et propos des fidèles de l’empereur. Bérénice, incarnée par la comédienne Leslie Menu, fait ses adieux à Titus à travers les alexandrins de Racine. Nous sommes au théâtre et le metteur en scène aura la finesse de s’effacer derrière le propos, dirigeant au plus près les chanteurs dans l’expression la plus investie de leur jeu. Karina Gauvin réalise une belle prestation dans le rôle de Vitellia, puissamment jalouse et tempétueuse, et l’Américaine Kate Lindsey est tout simplement éblouissante de musicalité et de sincérité dramatique dans celui de Sexto. Voix de velours, clarté des lignes mélodiques, la mezzo-soprano forme avec Julie Boulianne, qui chante Annius, un épatant duo androgyne dont les silhouettes, les profils aigus et les coupes de cheveux à la garçonne contrastent avec celles de Servillia, incarnée par la somptueuse Julie Fuchs et de Vitellia. Si Kurt Streit campe un Titus parfaitement crédible, clément et perspicace, sorte de patriarche qui en aurait vu de toutes les couleurs, que l’humanisme des Lumières vient sauver in extrémis, on pourra regretter son timbre de voix métallique et par trop nasal. A la baguette, le jeune Jérémie Rhorer dirige le Cercle de l’Harmonie de manière sensible et précise, sans nous faire totalement rêver. Les costumes de Christian Lacroix, ainsi que les lumières de Stéphanie Daniel, tout en finesse et en élégance, participent de la réussite du spectacle qui n’oublie jamais l’humain, dans son incarnation et ses émotions. Hélène Kuttner [Crédit Photos : Vincent Pontet] |
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