L’or des voix féminines pour Aïda à l’Opéra Bastille
Aïda De Verdi Mise en scène de Olivier Py Avec IL RE AMNERIS AIDA RADAMÈS AMONASRO UN MESSAGGERO SACERDOTESSA Les 22, 25, 28 juin et 1er, 4, 7, 0, 10, 12 , 13 et 16 juillet à 19h30 Tarifs : de 5 à 176 euros Réservation en ligne ou au 08 92 89 90 90 (0,34 euros la minute) Durée : 2h50 avec entracte Opéra Bastille |
Pour cette reprise d’une production de 2013, l’un des opéras les plus populaires de Verdi, nous retrouvons la mise en scène politique d’Olivier Py dans des décors rutilants de Pierre-André Weitz. Sondra Radvanovsky et Anita Rachvelishvili donnent aux deux héroïnes égyptiennes une humanité bouleversante.
Un opéra grandiose C’est le vice-roi d’Egypte Ismaïl Pacha qui commanda l’opéra à Verdi pour inaugurer son nouveau théâtre en 1871. Depuis une dizaine d’années et avec le soutien du Parlement italien dont Verdi fait partie en tant que député, Victor-Emmanuel s’est proclamé Roi d’Italie. L’Italie poursuit ses guerres d’indépendance contre l’Empire austro-hongrois tandis que la France a déclaré la guerre à la Prusse. C’est l’époque enflammée où l’Europe voit ses principales nations réclamer leur autonomie tandis que les instances religieuses comme le Pape cherche à sauver ses prérogatives à Rome. Le metteur en scène Olivier Py conserve l’or des Pharaons égyptiens en le fondant dans des masses de temples latins aux colonnes rutilantes, à la gloire de l’occupant austro-hongrois tandis que l’Italie y inscrit le nom de son libérateur, VERDI allias Victor Emmanuel Roi d’Italie. La musique flamboie dans la politique Soldats en treillis, mitraillettes au poing, amas de cadavres nus amoncelés dans des charniers, tank rutilant et prêtres encapuchonnés, déguisés en apôtres du Ku Klux Klan, le traitement esthétique ouvertement politique oppose l’or des vainqueurs à la pauvreté des vaincus de manière à actualiser le propos. Pas sûr que cette proposition soit follement originale ni très subtile car le décor trop lourd laisse peu de liberté aux chanteurs quant à leurs déplacements. Reste que la musique flamboie par la grâce d’une partition aussi riche que variée dans ses enchaînements et ses scènes d’atmosphère, donnant une place décisive et novatrice à l’orchestre. Le chef Daniel Oren imprime une belle vigueur à l’Orchestre de l’Opéra même si la première représentation montrait encore quelques décalages des choeurs avec les musiciens. Mais la qualité vocale des chanteurs et leur engagement dramatique, en particulier des héroïnes féminines, est à relever de manière tout à fait remarquable. Une esclave magnifique L’amour contre l’ordre moral, la passion contre le politique, Aïda exalte ces dilemmes impossibles avec la fougue et la profondeur d’airs musicaux célestes. La soprano canadienne Sondra Radvanosky s’épanouit sur scène dans la souffrance d’une passion trahie, déployant avec un grand talent les nuances et l’expressivité d’un grand rôle d’amoureuse avec une élégance et une maîtrise rares. Sa rivale Amnéris est flamboyante, incarnée par la mezzo Anita Rachvelishvili qui parvient dans ce rôle de jalouse à déployer une puissance vocale et un velours de timbre, sans jamais crier, avec une intelligence dramatique brillante. Du coté des personnages masculins, on retiendra la profondeur et la majesté vocale de George Gagnidze dans le rôle du rebelle Amonasro, alors le ténor Aleksandrs Antonenko devient un Radamès bouleversant dans les scènes où il déclare ouvertement sa passion à Aïda, jusqu’à perdre sa vie et sa victoire pour elle. Pour les chanteurs et pour l’orchestre qui célèbrent la beauté vocale d’Aïda, il faut vite aller à l’Opéra Bastille. Hélène Kuttner [ Crédit Photos © Guergana Damianova-Opéra National de Paris] |
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