Katia et Marielle Labèque – Andris Poga – Salle Pleyel
C’est la première fois que l’Orchestre de Paris interprète la Suite tirée des Animaux modèles de Poulenc. Peu connue, celle-ci n’en est pas moins typique du compositeur. Un orchestre imposant de soixante cordes y déploie de belles sonorités, souvent légères, admirablement défendues par l’Orchestre de Paris. L’introduction des cordes est profonde et chaleureuse. Les couleurs sont joyeuses et sollicitent notre mémoire cinématographique. De nombreux effets de timbres, comme la chute burlesque à la fin de la troisième partie, sont habilement combinés.
Puis vient l’Adagio central à l’expression neutre. Le plaisir d’entendre une musique si fortement datée de son époque (années 30 et 40) s’épuise peu à peu. La pompe du Finale n’y change rien. Nous sommes heureux d’en sortir, comme nous l’étions d’y entrer.
Deux petites filles poudrées montent sur scènes en costume de poupées… Ce sont les soeurs Labèque. Depuis 1982, elles jouent le Concerto pour deux pianos de Poulenc avec l’Orchestre de Paris une fois tous les dix ans. L’effectif orchestral est réduit, une trentaine de cordes, et l’oeuvre ne dépasse guère les vingt minutes. La verve des Soeurs presque jumelles est saisissante dans les passages les plus rythmés, à grand coups de talons (hauts).
Le célèbre thème à la ligne claire du Larghetto est finement dessiné. Le public fait un triomphe aux musiciennes, y compris après un bis bluesy façon medley inspiré de West-side-story.
Georges Prêtre aurait dû dirigé ce concert, lui qui, en 1973, avait joué la première du Concerto de Poulenc de cet orchestre. Remplacé par le jeune chef letton Andris Poga, assistant de Paavo Järvi, la Symphonie de Franck initialement prévue est remplacée par la Cinquième de Tchaïkovsky. Le programme, entièrement nouveau pour lui, a été certainement accommodé avec une oeuvre de son répertoire.
Depuis 2006, c’est la cinquième exécution de l’oeuvre par l’Orchestre de Paris !
Le chef se montre d’une élégante retenue et d’une grande précision. Le premier mouvement est d’une cohésion magnifique. Dans les tutti, alors qu’une violoniste faisant un malaise sort de scène inopinément, la présence des cuivres accentue le caractère sombre et fatal de l’oeuvre. Dans le deuxième mouvement, la sonorité profonde des cordes graves accompagne un admirable et tragique solo de cor. Puis, le hautbois apporte sa belle lumière.
Après une valse légère, le dernier mouvement nous emporte dans une ferveur passionnée.
Francis Poulenc
Suite d’orchestre, tirée du ballet Les Animaux modèles
Concerto pour deux pianos en ré mineur
Piotr Ilyitch Tchaïkovski
Symphonie n°5 en mi mineur, op. 64
Katia et Marielle Labèque, pianos
Orchestre de Paris
Andris Poga, direction
Salle Pleyel
252, rue du Faubourg Saint-Honoré
75008 Paris
[Crédit visuel : Marc Ginot]
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