Joachim Horsley – Interview
Parler d’un artiste ou pour un artiste qui ne serait pas capable de le faire, tient souvent d’un exercice de style périlleux. Mais quand cet artiste revendique une culture musicale qui va du jazz le plus classieux à la pop la plus joyeuse, du rock californien au classique souvent romantique, on veut en savoir plus de l’intéressé !
Est-il difficile d’exister musicalement quand on n’appartient à aucune des « grandes familles » musicales tout en revendiquant leurs évidentes influences ?
Je ne me pose même pas la question ! Toutes ces musiques existent en moi et ressortent au gré de voyages, de rencontres ou de concerts. Je ne m’inscris dans aucun mouvement musical particulier. J’espère rencontrer la même liberté avec le public dans ces voyages inattendus tout en respectant l’œuvre et son compositeur.
Vous utilisez votre piano comme un immense orchestre à percussions. Est-ce aussi une évidence musicale ou une expérimentation heureuse ?
C’est un mélange des deux. J’ai besoin du rythme et de la mélodie ensemble. Tous les sons sortis du piano font partie de mes arrangements au même titre que d’autres instruments.
Pourquoi mettre la rumba cubaine au service d’œuvres classiques que l’on croit intouchables ?
La musique est en perpétuelle évolution. Elle n’est ni scotchée ni attachée à une époque et à son compositeur. Les musiques devenues des références sont elles-mêmes le résultat de rencontres et autres métissages.Ma musique est celle de l’âme. J’essaye de toucher les personnes et de leur communiquer une émotion pleine de vie et de plaisir sans aucune prétention musicologique. Il se trouve que j’ai découvert la rumba cubaine et qu’elle m’a parlé immédiatement. La rencontre avec le chef d’œuvre de Beethoven a été comme une évidence et le succès que cette fusion a connue démontre que beaucoup de personnes l’ont ressenti aussi. La musique cubaine a déclenché d’autres rencontres avec des rythmes afro-descendants. Le blues, le jazz et par voie de conséquence le rock et la pop, trouvent leur essence dans les rythmes d’origine africaines. J’ai voulu associer la puissance d’œuvres classiques à l’authenticité de ces rythmes. Ce qui explique la présence de musiques capverdiennes et vénézuéliennes dans le CD. D’autres rencontres sont à venir assurément.
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J’imagine que vous expliquez les passages dans la pop, les musiques de films et autres recherches de sons avec le même souci de « relecture » ?
Je n’ai pas d’explication rationnelle. Mes musiques sont faites de ce que je suis.
Si vous deviez mettre en avant des exigences essentielles dans votre travail…
J’en ai trop pour toutes les citer car je suis perfectionniste. J’essaye d’aller le plus loin possible dans ma démarche et je ne peux me contenter d’un « copier-coller ». Je cherche la rencontre et la fusion. Être juste et ne pas faire de concessions avec moi-même est devenu une exigence majeure. Si je veux communiquer ma passion pour la musique et son universalité, je me dois d’aller au plus loin dans l’expression de moi-même.
Ce n’est pas utopique de vouloir une communion avec le grand public par ces temps de marketing forcené ?
Si ce n’est les artistes, qui va communiquer ce sentiment de vie et d’émotions qui nous anime. C’est un privilège d’avoir cette liberté ! Les artistes peuvent pousser les frontières du possible et apporter cette part de rêve. A eux de créer ces domaines musicaux où le partage, la fusion et l’émotion sont les seules limites. C’est le travail de toute une vie où l’utopie contribue à la création.
Interview réalisée par Thierry Nossin, Label Music Associés.
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