Francesca da Rimini – Opéra Bastille
La Divine Comédie de Dante n’a pas fini d’inspirer nombre d’artistes. Au premier plan, il y a le poète D’Annunzio qui s’en inspira pour écrire la pièce Francesca da Rimini en 1902. Un mélodrame dans lequel trois frères (disons le bon, la brute et le truand) tombent amoureux de la même femme, elle-même tombée sous le charme du plus beau d’entre eux. Dix ans plus tard, le compositeur Riccardo Zandonai et son librettiste fétiche Tito Ricordi en tireront un opéra dense et éclectique. La pensée de D’Annunzio ne sera aucunement trahie.
Lors de sa création en 1914 à Turin, Zandonai a 30 ans. Pour lui qui est né trois mois après la mort de Wagner, qui a fait ses armes à Pesaro dans la ville natale de Rossini et qui admire autant Verdi que Puccini et Richard Strauss, les références musicales vont bon train. C’est ce qui ressort avant tout de Francesca da Rimini, son opéra phare que Nicolas Joel a eu la bonne idée de programmer cette saison. Son coup de force venant du choix de Roberto Alagna pour redonner vie à une œuvre méconnue et attirer le public.
L’ombre de Zeffirelli
Disons-le d’emblée, cette production vaut surtout pour son premier acte dont l’aspect visuel fait penser aux photographies de David Hamilton et à la peinture préraphaélite. Au lever de rideau, la scène s’ouvre sur une cour contiguë à un jardin où l’humidité des plantes, des fleurs et des arbustes se fait pleinement ressentir. C’est kitch, c’est érotique à souhait mais c’est beau ! Son final (qui rendrait jaloux les auteurs de romans à l’eau de rose) est l’un des passages les plus émouvants avec ce chœur de femmes et cette idylle naissante entre les deux amoureux Francesca et Paolo. Avec ses allures de prologue, l’ombre de Wagner et de Strauss flotte déjà dans la fosse. Le reste de la production sera radicalement différent mais tout aussi varié, à l’inverse de la mise en scène de Giancarlo del Monaco et des décors de Carlo Centolavigna, ancien assistant de Franco Zeffirelli. Que l’on s’entende : leur travail n’efface en rien la composition de Zandonai et épouse gentillement ses références.
Quatre solistes font la pair
Scènes de bataille à la Verdi, quatuors féminins à la Strauss ou encore duel shakespearien à la Richard III, voici quelques exemples de ce que l’on peut trouver ici. C’est ce mélange des genres qui plaît avant tout et qui rend l’exercice difficile pour les solistes. Au premier plan, Roberto Alagna et Svelta Vassileva forment un couple davantage torturé que passionnel tandis que George Gagnidze et William Joyner incarnent deux frères tyranniques avec conviction et folie. Leur duo au premier tableau de l’acte IV est aussi intense que celui des deux amoureux lors du troisième acte. Le chef d’orchestre Daniel Oren semble être quant à lui l’investigateur de ce mélodrame tant il sautille et s’énerve dans la fosse à l’image de sa direction. Dommage que l’œuvre ennuie par moment et que la mise en scène n’ait pas d’autres choses à dire que faire quelques allusions au fascisme et références dans un même décor à l’Art Déco et l’Art néo-byzantin.
Edouard Brane
Francesca da Rimini
Durée: 3 heures avec 2 entractes
Jusqu’au 21 février 2011 à 19h30
Tarifs : 5€, 15€, 20€, 40€, 75€, 95€, 115€, 135€, 155€, 180€
Opéra Bastille
Place de la Bastille
Métro Bastille
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