“Dans la musique électronique, il relève du génie d’être réellement original (…)” – Rencontre avec AWILD
DJ et producteur, AWILD a plus d’une corde à son arc. Avec lui, nous avons parlé processus artistique, influences mais également du monde de la musique. Un milieu en perpétuelle effervescence qui connaît différentes mutations, impactant, en bien ou en mal, les professionnels du secteur.
Comment est né ta passion pour la musique ?
J’ai toujours été passionné par la musique électronique. Au début c’était les Daft Punk, Justice, Deadmau5, Uppermost… Puis à force de baigner dans ces influences et de consulter des vidéos de pleins d’artistes, j’ai eu envie de faire la même chose. Alors j’ai commencé à télécharger des logiciels de production sur le pc de ma mère et c’est parti de là.
Certains de tes sons sont signés chez des labels (Repulsive Records entre autres) en quoi ces expériences t’ont été bénéfiques et qu’est-ce qu’elles t’ont apportées ?
Dans “label” on peut entendre plusieurs choses : sorti de morceaux, accompagnement artistique, editing, etc. Pour ma part ce n’était que pour sortir mes productions. En signant sur des labels ça m’a apporté la “validation” de mes productions par des structures reconnues dans le milieu. Ça permet de prouver que des pros valident la qualité de ta production et trouvent la DA originale, puissante ou autre. Le label peut souvent être porté ou avoir signé de grands noms. J’ai eu le cas avec Down2Earth Musik qui est le label porté par Macky Gee (un gros nom de la scène Drum and Bass) j’ai signé mon morceau Ancestral Soul dessus. Cet aspect de validation est important quand tu es un petit artiste, ça appuie la qualité de ton travail et montre ton potentiel pour les autres labels, bookers, manageurs, plateformes de streaming…
Suivant les accords du contrat, le label prend également les frais de distributions sur les plateformes et de communication sur les réseaux sociaux en charge en contrepartie d’un pourcentage sur tes royalties. Encore un point intéressant quand on a un budget extrêmement restreint.
Quel a été le moment décisif pour toi pour passer à la production ?
A vrai dire il n’y en a pas eu, tout s’est fait naturellement. Je pense que c’est les artistes cités à la première question qui m’ont vraiment motivé à faire de même. Notamment Uppermost, pendant ma période collège/lycée. Sa chaîne youtube était remplie de vidéo où il montrait comment il produisait, je trouvais ça incroyable. Donc c’est plus un artiste décisif qu’un moment.
Qu’est-ce que cette casquette change dans ton processus artistique ?
Étant donné que j’ai commencé par la production, cette casquette je l’ai toujours eu. C’est le fondement même de mon projet. Quand j’ai commencé à sortir quelques morceaux j’ai eu l’envie de me produire sur scène. Je voulais jouer en mode live : jouer uniquement mes propres morceaux originaux ou des édits. Le souci c’est que ça demande beaucoup de création, énormément de préparation, de répétitions et c’est très peu adaptable suivant l’endroit où tu joues. J’ai donc choisi le DJ Set plutôt que le live, ce qui me permet de jouer mes morceaux et ceux d’autres artistes, tout en les adaptant suivant le lieu et le type de soirée. Ça apporte une valeur ajoutée à ton projet. Tu ne joues pas uniquement les sons des autres mais aussi les tiens.
Et justement pour jouer sur scène ou “vendre” son projet cette casquette est très utile. J’ai toujours proposé autres choses que mes dates en DJ Sets. Maintenant c’est devenu quelque chose de très commun de voir des DJ produire leur propre musique, avant ça l’était moins.
Quelles sont tes influences ?
Pour mon projet AWILD, mes influences viennent clairement du Royaume-Uni. Depuis 2017 environ j’ai une fascination pour ce qu’il se passe là-bas, dans les clubs et les festivals. UK Garage, UK Bass, Bassline, Drum and Bass, Jungle, 140BPM, Riddim/Dubstep, ou d’autres, les styles nés en UK sont nombreux. Ils ont une très forte identité et une histoire très riche autour de la culture des raves depuis les années 90. Depuis l’année dernière cette culture plaît de plus en plus au niveau international comme avec l’explosion de Fred Again, le retour de Skrillex dans des styles beaucoup moins violents et clairement axés UK ou encore Chase & Status et Bou qui ont poussé le style Drum and Bass devant le grand public avec des titres comme Baddadan.
Si je devais donner des artistes je dirais Hamdi, Hedex, Simula, Cesco…Mais je pourrais en donner des centaines tellement il y a d’artistes talentueux !
A quelles nouvelles difficultés es-tu confronté ?
Actuellement je pense que mes problématiques sont les mêmes que de nombreux artistes, si ce n’est pas la quasi-totalité. Toute le monde peut faire de la musique avec son PC maintenant, des concepteurs de logiciels ont rendus les utilisations simples et ludiques. Dans la musique électronique, vu le nombre incalculable de styles et sous-styles il relève du génie d’être réellement original en cassant complètement les codes.
Puis comme tout projet quel qu’il soit, le faire connaitre au plus grand nombre est devenu à la fois beaucoup plus facile et beaucoup plus difficile avec les réseaux sociaux. Là où je trouve que ça pose un problème direct aux artistes avant même de voir les résultats c’est que ça nous oblige à être community manager à temps complet. Surtout depuis que le format vidéo prends le pas sur le reste. Si on ne s’adapte pas à cette tendance, on se met des bâtons dans les roues. C’est de plus en plus chronophage.
Que penses-tu de l’évolution de l’industrie musicale actuellement ?
Comme je le disais précédemment, les réseaux sociaux ont clairement bouleversé l’industrie. Après personnellement je trouve qu’il y a aussi énormément de points positifs à cela, mais c’est un long débat. Je pense qu’en tant qu’artiste il faut entrer dans un état d’esprit que ces grands changements sont une évolution qui sera surement toujours constante. Il faut s’y faire et tirer avantage de chaque nouveauté et tendance tout en restant soi-même.
Comment rester fidèle à ton univers artistique au milieu de cette évolution ?
Maintenant on a vite fait de s’égarer de ce qui nous fait vraiment vibrer. Alors il faut réussir à prendre du recul, se couper de tout ça et revenir à des démarches de production plus “naturelles” en laissant parler les émotions et chercher à créer quelque chose qui nous fait vibrer. Selon moi si notre morceau fait vibrer notre cœur il en fera sans aucun doute vibrer d’autres. C’est la première règle à ne jamais bafouer pour être sûr de faire quelque chose de pertinent. Après je sais que pour moi, cela fonctionne parce que ma démarche créative est très solitaire mais je comprends que ça puisse fonctionner autrement chez d’autres artistes et groupes.
Travailles-tu ou penses-tu travailler avec d’autres artistes ?
Je l’ai fait à plusieurs reprises déjà sans pour autant avoir réellement produit quelque chose de concret. Ça va un petit peu contredire ce que j’ai dit avant mais c’est vraiment important voir indispensable pour continuer à progresser et donner le meilleur de soi-même. J’ai tellement appris en partageant avec les autres, ça permet aussi de s’ouvrir, de ne pas toujours faire les mêmes choses, de s’améliorer et surtout de se remotiver quand il y a des baisses.
Comment choisis-tu (ou choisirais-tu) les projets sur lesquels tu souhaites travailler ?
Tout dépend du type de projet. Pour une collaboration ou tout autre projet, ce sera suivant le style et si le projet en lui-même me donne envie. En soi poser des limites ou des règles c’est peut-être trop contreproductif donc là aussi c’est vraiment suivant le felling pour ma part.
Une collab de rêve ?
Hum c’est vraiment difficile à dire vu le nombre d’artistes. Si c’est de rêve c’est que je n’ai absolument pas de limite alors je dirai Justice à défaut de ne plus pouvoir rêver des Daft Punk.
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Propos recueillis par Margaux Kica
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