Christoph von Dohnanyi – Le château de Barbe-bleue – Salle Pleyel
Le chef allemand Christoph von Dohnanyi est de retour à la tête de la phalange parisienne qu’il a dirigée régulièrement (il en avait été le principal conseiller artistique de 1998 à 2000, époque pendant laquelle l’orchestre cherchait un remplaçant à Semyon Bychkov). Après quelques années d’absence, il retrouve ces musiciens depuis 2010.
La Quatrième symphonie de Mendelssohn, « italienne », ouvre le concert. Sur scène, l’orchestre est configuré autrement qu’à son habitude. Les seconds violons sont à droite, les violoncelles, au centre gauche. Les contrebasses passent à gauche, les harpes à droite.
Le chef dirige par coeur. La sonorité du très célèbre premier thème est magnifique. Les batteries de croches de l’accompagnement de vents sont à la fois perçantes et fulgurantes. Les lignes, notamment dans le développement, sont superposées de façon admirablement distinctes, tout en conservant une très belle cohésion d’ensemble.
Le premier motif du second mouvement doublant bois et violons est déchirant. Le chef, en grande forme physique pour ses quatre-vingt trois ans, est ici très à l’écoute de l’orchestre. Il est toujours précis dans chaque articulation dynamique. Il sait donner beaucoup de caractère au trio du troisième mouvement. Le timbre des cors y est chaleureux.
Enfin, le dernier mouvement très dramatique n’est pas sans évoquer le dernier Haydn en poussant l’orchestre vers une humeur très sturm und drang.
Fréquemment joué en version de concert, le Château de Barbe-Bleue de Bela Bartok, oeuvre de jeunesse composée avant la première guerre mondiale, et seul essai du compositeur dans le domaine de l’Opéra, requiert un effectif important pour une durée d’une heure. La trame narrative est assez simple et efficace. Judith, nouvelle épouse de Barbe-Bleue, arrive dans sa nouvelle demeure et ouvre une à une les sept portes qui représentent les sept secrets de l’âme du duc.
Après un bref prologue en hongrois, heureusement accompagné de surtitres, l’Orchestre de Paris déploie pendant soixante minutes sa puissance massive. Il excelle dans ce répertoire et semble vouloir donner le meilleur de lui-même à un chef qu’il respecte. Christoph von Donhnanyi semble connaître la partition dans ses moindres détails. Sans pratiquer systématiquement l’opulence, privilégiant les lignes de force traversant l’oeuvre, c’est tout de même une apothéose des timbres orchestraux que nous entendons. La sonorité des cuivres est particulièrement colorée. Les tutti de la cinquième porte sont colossaux.
Elena Zhidkova en Judith est magnifique. Elle incarne son rôle avec passion et n’est jamais couverte pas l’orchestre.
Matthias Goerne en revanche a plus de mal à se faire entendre. Son timbre est toujours très beau, son expression est fascinante, mais peut-être est-il un baryton trop léger pour le rôle.
Le public fait un triomphe au chef et à l’orchestre.
Felix Mendelssohn-Bartholdy
Symphonie n° 4 en la majeur, dite « Italienne », op.90
Béla Bartók
Le Château de Barbe-Bleue, Sz 48
Elena Zhidkova, mezzo-soprano
Matthias Goerne, baryton
Orchestre de Paris
Christoph von Dohnanyi, direction
Le jeudi 11 octobre à 20h
Salle Pleyel
252, rue du faubourg Saint-Honoré
75008 Paris
M° Ternes
[Visuel : crédit Dan Porges]
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