Chopin et sa clique : la dissonance médiatique
Envahisseur des médias, le classique est partout. Où est le problème ? Sa nouvelle fonction. À force d’entendre du Bizet dans la publicité du nouveau 4×4 et de ne plus l’écouter à sa juste valeur, on ne sait plus quoi penser. Zoom sur la nouvelle valeur mercantile de la musique classique.
La fonction de la musique classique dans le prisme des médias, n’est plus culturelle et artistique mais bien mercantile. Qui n’a jamais entendu un « Oh c’est la musique des impôts ! ». Déprimant.
La publicité est un exemple pertinent de ce qui me désole particulièrement. Force est de constater que les publicitaires abusent de nos trésors musicaux pour vendre leur savonnette star. Une symphonie de Beethoven ou une valse de Strauss, réduites à une simple musique d’ambiance, n’est pas rendre hommage aux arpèges, doubles croches et triolets écrits par ces grands compositeurs.
Il y a une utilisation rationnelle pour les publicitaires puisque le classique renvoie aussi à
l’excellence et au luxe du produit. Une lecture faussée et unilatérale du morceau. La palme revient aux parfums et aux voitures. À l’ère d’internet, sur YouTube, apparaissent des playlists telles que « Relaxation Piano » ou pire « Tristesse – Chopin » et « Travailler en musique avec Mozart ». Alors pourquoi pas la playlist « Faire une raclette avec Rachmaninov » ? Certes, écouter du classique peut nous détendre mais avouons que ce détournement est affligeant.
Autre grand média : le cinéma, qui se voit être également un gros consommateur de cette musique. Autrefois, dans le cinéma muet, les « dialogues » étaient magnifiés par une musique omniprésente. Pourtant, l’arrivée du cinéma parlant à la fin des années 20, a plus que jamais puisé dans le registre classique. En effet, malgré la multitude de styles musicaux, le classique reste exploité de façon abusive. Il n’est plus rare d’entendre parler de la « musique d’Intouchables » ; propos quelque peu réducteur, laissant l’auteur sur le bas-côté.
Enfin, les téléréalités qui émergent (voire qui pullulent) injectent aussi leur dose de classique. En stéréotypant à outrance, pour illustrer Cindy qui pleure toutes les larmes de son corps après que son Jules l’ait quittée. Où veux-je en venir ? Pendant qu’elle se lamente en interview, c’est un extrait de Vivaldi qu’on perçoit entre deux « snif ». Comble de la paresse, les programmateurs ne choisiraient-ils pas au hasard les morceaux ? C’est la course à la plus forte intensité dramatique pour illustrer le plus trivial. À travers cet exemple on comprend que ce style de musique est malgré lui populairement synonyme de tristesse, mélancolie, lui collant une étiquette émotionnelle figée.
Pour relativiser cependant les points négatifs de cette utilisation « marketing » de la musique, on peut observer que cela suscite de la curiosité, de l’intérêt chez des personnes loin de cette culture classique. Les médias permettent donc, pour certains, une mise en lumière et une découverte de cette grande musique.
Emma Bergounioux
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