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Autophysiopsychic Music Gate, le quartet de jazz AMG va tout vous expliquer !

Juliette Labati 9 décembre 2022
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© Thomas Behuret

Rencontre avec le quartet de jazz composé de Antoine Fleury au piano, Mailo Rakotonanahary à la batterie, Keïta Janota au saxophone et Anthony Jouravsky à la contrebasse.

Est-ce que vous pouvez nous parler un peu de vous, de votre rencontre et de la formation du groupe ? 

Antoine : J’ai d’abord rencontré Keïta par hasard sur un concours, dans une scène, en express. 

Keïta : On a joué un morceau, il a pris mon numéro et il est parti comme ça (rires). Puis il m’a recontacté en me disant : “T’es dispo pour un concert ?” Et c’était parti ! 

Antoine : Je l’ai recontacté parce que j’avais un plan et en plus je cherchais à monter une équipe. Puis on a joué un morceau ensemble, j’ai kiffé, et Keïta m’a présenté Mailo d’abord et ensuite Anthony. 

Keïta : Ouais, ça fait un moment qu’on se connait avec Anthony et Mailo, trois ans maintenant.

Anthony : On s’est rencontré dans le même cursus au Conservatoire de Paris.

Keïta : Donc vraiment c’est un pur hasard qu’on se soit connu avec Antoine, grande chance !

Anthony : C’est la musique qui nous a réunis ! (rires) 

Mailo : C’est le jazz ! (rires)

Pouvez-vous nous parler du concept de musique autophysiopsychique ? 

Antoine : C’est quelque chose qui nous tient vraiment à cœur. Disons que c’est une définition de la musique jazz, inventé par Yusef Lateef, qui est un musicien de jazz des années 50 aux États-Unis que j’apprécie beaucoup, à la fois par la pratique de son instrument mais aussi par sa façon de composer, sa vision qu’il exprime à travers sa musique. C’est un musicien qui s’est mis dans une démarche unique parce qu’il a étudié des musiques folkloriques du monde entier notamment la flûte hausa au Nigéria. Il a carrément fait un doctorat là-dessus. Il est saxophoniste et a développé un rapport avec les instruments à vent, notamment d’une partie des musiques africaines. Donc la musique autophysiopsychique c’est un jazz qui se nourrit de toutes les influences qui sont dans la tête des musiciens qui jouent mais aussi du public autour. C’est une façon de définir une musique en mouvement perpétuel, assez hybride et qui est toujours rythmée par le moment présent. Pour nous, c’est un clin d’œil, c’est une référence, on ne considère pas qu’on fait la même musique : c’est plutôt un hommage. Ce mot est aussi drôle parce que il veut tout et rien dire à la fois. C’est une façon de définir le jazz sans dire jazz !

Quelle est la signification de votre nom de groupe AMG ?

Antoine : AMG est le nom de moteurs allemands, d’une partie de l’écurie Mercedes dans les années 70 si je ne me trompe pas. L’idée est de mettre des moteurs de voiture de sport dans des berlines, donc nous ça nous a fait marrer parce que ça va vite, ça fait du bruit, mais c’est classe ! C’est rigolo, efficace. J’aimais bien l’idée d’avoir un nom avec des initiales comme si c’était un nom de marque : tu le vois partout et en même temps tu peux le reconnaître tout de suite.




Quel a été votre cheminement pour arriver à ce concept, comment avez-vous réussi à vous aligner tous les 4 sur ce “style” très précis ? 

Keïta : Je pense qu’on a tous des références communes et après on s’est tous “influencés” en se rencontrant et en jouant ensemble. Par exemple, on a tous kiffé la proposition musicale d’Antoine, donc on a tous convergé vers ça, même si on avait déjà des affinités avec ce genre de style avant. 

Antoine : Y’a aussi un truc qu’il faut savoir, c’est que eux, ils sont étudiants dans ce qu’on appelle “l’élite” (rires). De mon côté, j’ai eu des études qui ont été avortées, j’ai un parcours qui n’est pas “simple”, donc ça m’a aussi fait du bien de les rencontrer, de travailler, d’essayer de proposer plus de choses. Pour moi, c’est une façon d’avancer et d’évoluer. 

Keïta : Si ça va dans un sens, ça va dans l’autre. Nous aussi ça nous a énormément apporté de jouer avec toi, de découvrir tes compos, ton approche. Et tu avais aussi cette vision de ne pas nous brider, tu nous as toujours dit de nous exprimer à notre façon. Il n’y a jamais eu de moments où l’on s’est sentis limités.

Antoine : Dans ce que j’écris il y a aussi énormément d’improvisations, et on est tous sensibles au son de groupe !

Keïta : Et puis le groupe est aussi bien défini par les individualités de chacun sans qu’on soit bridé au final. C’est un peu ça qui constitue AMG : des individualités qui ont matché. 

Mailo : C’est aussi possible parce que la musique qu’on joue nous laisse beaucoup de liberté à tous les quatre, grâce à l’improvisation, et au matériel de base qui est assez simple. Cela nous permet de développer ce qu’on veut dans nos personnalités. Cette liberté nous a permis de matcher. 

Yusef Lateef semble être votre source d’inspiration principale, peut-on dire que c’est un mentor pour vous ? 

Antoine :  Non, je ne vais pas te dire ça parce que déjà on ne l’a pas connu. Pour moi l’idée de mentor est liée à une relation. Mais oui, on essaye de le revendiquer, pour nous c’est une manière de faire du jazz qui est touchante et qui a du sens aujourd’hui. Le fait d’intégrer plusieurs cultures, façons de faire, de faire en sorte que la musique soit tout le temps en mouvement, faire confiance à ceux qui la font. C’est une influence majeure, mais on ne peut pas parler de mentor comme on ne l’a pas connu. 

Est-ce que vous puisez votre inspiration dans d’autres univers culturels ?

Antoine : Un max, même tout, en vrai. La vie, les gens, des moments. Par exemple, t’es là tu prends un super café en plein hiver, tu penses à une sensation et boum ça peut donner quelque chose ! Et puis on a pas les mêmes âges, on ne vient pas des mêmes milieux, donc on a chacun des éléments perso qui nous inspirent. Quand j’écris un morceau, je pars forcément de quelque chose. Ça peut être un moment, un film, un livre… Le but c’est aussi de rendre hommage, de partager une émotion. 

Mailo : Avec l’improvisation chaque version sera toujours très différente, parce qu’on peut s’inspirer de ce qu’on a vu le jour même, c’est ça qui est intéressant.

Parlez-nous de l’importance de l’improvisation pour vous ?

Anthony : C’est une improvisation déstructurée, qui a une forme claire, indicative pour chaque musicien. Il y a aussi une improvisation totalement spontanée et libre, pas forcément avec des notes, qu’on appelle l’improvisation générative, avec des cris, des coups, on peut jouer avec les textures, les personnalités du public. 

Keïta : Ouais ça c’est surtout toi (rires) !

Anthony : Oui, parce que j’adore me plonger dans ces univers qui changent de la musique pure et dure. 

Antoine : Ça rejoint aussi ce concept de musique autophysiopsychique : c’est la vraie vie au final. On s’adapte aussi au lieu où l’on joue. 

Keïta : Après malgré tout, l’improvisation est cadrée, il y a des codes. On n’est pas en roue libre (rires). Il y a des morceaux qui sont propices à de l’improvisation plus ou moins poussée. 

Antoine : Il y a aussi un truc avec l’improvisation : c’est l’énergie. Ce qu’on essaye de faire, c’est qu’en concert on veut donner quelque chose d’assez brut, on essaye de faire la différence sur le son. 

Keïta : On n’est pas du tout sur une improvisation européenne mais plutôt afro-américaine. 

Antoine : Le message passe par l’énergie, parfois certaines personnes n’ont rien compris au concert mais ont adoré parce que ils ont ressenti notre énergie ! C’est un peu notre but ultime : que ça parle à tout le monde. 

Keïta : On est très proche de la vibe afro-américaine, proche du blues qui est un peu l’essence du jazz. Même si on peut aller très loin, il y a toujours une culture qui nous nourrit. 

Vous avez un son très authentique, aujourd’hui l’importance de l’utilisation des nouvelles technologies ou machines est très importante. Les utilisez-vous et qu’en pensez-vous ? 

Antoine : Pour l’instant pas du tout. Notre musique est faite du rapport qu’il y a entre nous, un rapport acoustique. 

Mailo : Notre album a été fait comme si c’était un live !

Antoine : D’ailleurs, on a déjà eu des interventions de musiciens qui sont venus avec leurs instruments sur certains morceaux. Pour l’instant, on n’a pas utilisé de musiques électroniques, mais c’est pas exclu ! 

Si vous deviez amener avec vous 3 disques sur une île déserte, lesquels prendriez-vous ?

Keïta : Songbook – Kenny Garrett / Twio – Walter Smith iii / Blue train – John Coltrane

Anthony : Dialect fluorescent – Steve Lehman trio / Nefertiti – Miles Davis Quintet / Happening le live au vanguard – Gerald Clayton

Mailo : Live in Paris – Walter Smith III / Ahmad Jamal – Happy moods / Luidji – Tristesse Business 

Antoine : A Love supreme – John Coltrane quartet  / Jewels of Thoughts – Pharoah Sanders / Extensions – McCoy Tyner

Votre actualité ? Vos Projets ? Vos envies ? 

On joue ce samedi au Sunset à 19h ! Et d’autres dates arrivent. 

C’est notre but principal, jouer un maximum. On a besoin d’éprouver, de se produire, de roder notre set, d’aller de plus en plus loin pour oser. On aime bien l’idée aussi de jouer dans des lieux qui ne sont pas forcément dédiés au jazz, sortir du cadre classique. Par exemple jouer dans des lieux hyper classes mais aussi beaucoup plus underground. 

Rendez-vous ce samedi 10 décembre au Sunset Sunside ! 

Interview réalisée par Juliette Labati

À lire également sur Artistik Rezo : “Je ne savais pas que je faisais partie d’une espèce en voie de disparition !”, Barton Hartshorn sort son nouvel album par Juliette Labati

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