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Zhou Xuan, une « voix d’or » à l’écran

3 octobre 2010
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Neuf longs métrages pour dévoiler  les talents d’une star des années 30 et 40. A cette époque,  le star system a en effet atteint les rives de l’Extrême-Orient. L’industrie cinématographique, à  Shanghai, s’y développe sur le modèle américain. L’Histoire dessine le décor : la guerre sino-japonaise et l’influence des Concessions étrangères.

Dans ces quartiers de Shanghai administrés par les Occidentaux, mais habités en grande  partie par les chinois, le cinéma est à la mode. La majorité  des films est importée d’Amérique et les productions chinoises largement influencées par Hollywood. Les stars chinoises affichent leurs gracieux minois aux côtés des sourires enjôleurs de Greta Garbo ou Marlene Dietrich.

L’objectif ? distraire. Divertir le public le plus large possible. Les premiers films sont  commerciaux, jusqu’à l’occupation japonaise, en 1937 – qui  épargnera les Concessions pendant quelques années. Dans la relative tranquillité de l’ « île solitaire » formée par les deux quartiers étrangers de Shanghai, le cinéma devient aussi le vecteur du patriotisme chinois face à la menace impérialiste nippone. Il est encore l’instrument idéologique de la mouvance communiste ; le réalisme social s’affiche sur les écrans.

En deux décennies et quarante-trois films, Zhou Xuan pratique tous les genres. Avec un style qui lui est propre et fera son succès : l’actrice-chanteuse.

Son interprétation dans « Les Anges du boulevard », tourné en 1937 à Shanghai, sera déterminante pour sa carrière. Ce grand classique tient à la fois de la comédie, du film d’amour, du film musical, tout cela teinté de réalisme social et ses thèmes récurrents : maltraitance des femmes, prostitution, pauvreté et injustice.

Voix douce, timbre délicat, Zhou Xuan, y interprète deux chansons mythiques, « La chanteuse des confins du ciel » et « La chanson des quatre saisons ». Pour les Chinois, l’actrice-chanteuse possède d‘étonnantes capacités techniques de modulation de la voix.

Orpheline dès la petite enfance, adoptée par un oncle, elle apprend à chanter et danser vers l’âge de 8 ans. En 1934, à la suite d’un concours radiophonique, Zhou Xuan est proclamée « Voix d’or ». Elle enregistrera au total plus de deux cent cinquante chansons, sous le label Pathé, à Shanghai. Pour les besoins de son rôle de favorite dans « Mei Fei » (1941), elle apprend même à chanter l’opéra de Pékin, avec un maître, en quelques heures seulement.

« Quiproquo » (1948) la met en scène dans une comédie légère, qui livre un aperçu de la vie de la bourgeoisie chinoise. Le film se déroule dans le décor d’une garçonnière meublée à l’occidentale. Zhou Xuan,  chevelure impeccablement crantée retenue par un ruban de soie, bouche en cœur, taille marquée et souliers à talons compensés, fait la mutine au milieu de ses amis en costumes cravates. Allongée sur un sofa, elle feuillette les pages du magazine Life en grignotant des biscuits américains, pendant que les hommes fument dans leurs luxueuses automobiles.

Mais le répertoire de l’actrice est varié. Elle se glisse aussi bien dans la vie d’une jouvencelle que d’une concubine impériale, une chanteuse des rues, une désespérée,  une suicidaire… Et la réalité de sa vie privée frôle la fiction de sa vie d’artiste.

Zhou Xuan n’a pas été heureuse.

Entre les lignes d’une biographie incomplète et tourmentée, ses déboires amoureux ressemblent à s’y méprendre à ceux qu’elle porte à l’écran. Ses rencontres, dans la vraie vie,  avec des hommes manipulateurs, profiteurs et malveillants font échos aux personnages des scénarios de ses films. 

Après plusieurs internements psychiatriques, elle est placée en sanatorium en 1951. Elle décède quelques années plus tard, en 1957. Et la rumeur parle d’un suicide…

Zhou Xuan  laisse derrière elle une brève carrière éblouissante, des refrains inoubliables, des films comme lointains témoins de l’aventure tumultueuse entre l’Orient et l’Occident. Un mythe en somme, porté haut par ses deux petites-filles, bien décidées à honorer les talents et la mémoire de leur grand-mère.

Sylvie Ramir

Zhou Xuan

Cinquième festival du cinéma chinois

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