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Wonder Woman 1984 : un massacre à 200 millions de dollars

Victor Ribeiro 23 février 2021
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Des années après un premier opus prenant la première guerre mondiale comme toile de fond, Diana Prince se retrouve cette fois-ci dans le merveilleux monde des années 1980, à travailler dans un musée : c’est certainement moins glamour qu’être au front.

Elle fait face à un antagoniste aussi terrible que le dieu de la guerre du premier volet : une pierre capable d’exaucer les souhaits les plus fous, y compris ramener les morts à la vie. Si vous avez vu le film ou la bande annonce qui en dit beaucoup trop, vous comprenez bien vite de quoi se composera ce second volet.




Le problème le plus évident vient du scenario. La première itération de l’héroïne était ingénieuse quant à la façon de gérer l’étendue des pouvoirs de la princesse. Elle s’opposait à une guerre totale et devait affronter toute une armée, à la seule force de son lasso de vérité. C’était une prouesse digne de son pouvoir. Ici, elle se retrouve dans une période sans véritable conflit dans laquelle elle affronte de simples humains. Il n’y a pas vraiment d’opposants dignes de sa puissance, exceptée Cheetah mais nous y reviendrons.
Pour rendre la lutte intéressante, les scénaristes ont eu l’idée de lui faire perdre ses pouvoirs à cause d’un dilemme moral loin d’être original. Elle doit choisir entre le retour à la vie de son amant ou ses pouvoirs. Certes, le dilemme semble cornélien et tout à fait légitime quand on observe leur relation. Il est pénible et insoutenable de devoir renoncer à l’amour de sa vie, même pour sauver le monde, mais on a eu exactement le même dilemme dans le premier film… Il faut arrêter de prendre le public pour des vaches à lait : on ne peut décemment pas faire une suite strictement calquée sur le premier opus. Eh oui, c’est aussi toi que l’on vise Deadpool 2…

Visiblement, il doit il y avoir une justice parce qu’a contrario de son concurrent de chez Marvel, Wonder Woman 1984 ne sera pas un grand succès. Il y a deux causes à cet échec en perspective. La première cause est la plus évidente : la COVID ne permet pas d’aller le voir en salle. Mais là où beaucoup de studios décalent les sorties, le studio d’Harry Potter en a décidé autrement… Le long métrage sera une exclusivité pour la plateforme HBO, mais cela ne remboursera pas (du tout ?) un budget colossal de 200 millions de dollars.

Pour en revenir au film en lui-même, il reste tout de même non dénué de toute qualité. Le casting est toujours choisi avec soin et apporte beaucoup de prestige à cette adaptation. Gale Gadot représente Wonder Woman avec brio. Elle mélange à merveille la sagesse, et le charisme de la princesse amazone. Son amant incarné par Chris Pine la complète parfaitement. Ils sont diamétralement opposés physiquement mais l’alchimie entre eux semble évidente, le coup de foudre est tangible. De plus, les thèmes musicaux sont singuliers et immédiatement reconnaissables. Le thème de Wonder Woman, avec sa guitare électrique au rythme effréné est sans doute l’un des meilleurs thèmes de super héros composés depuis ceux de la trilogie du Dark Knight d’Hans Zimmer et ce n’est clairement pas une mince affaire. Quoi de plus normal quand c’est ce dernier se retrouve à la baguette. On regrettera cependant l’absence de nouveaux thèmes aussi marquants, spécialement pour les antagonistes qui restent plats à tous les niveaux… Dommage.

Un esthétisme singulièrement mauvais…

DC a toujours voulu se démarquer de Marvel en dépeignant un univers sombre et réaliste quand la maison des idées proposait un univers coloré et plein d’humour. Du moins, c’était le cas jusqu’à ce Wonder Woman 1984. Les premières bandes annonces nous introduisaient un univers coloré, vivant et grandiloquent. Gal Gadot voyait le costume de son personnage remodelé pour l’occasion. Le rouge et le bleu se mariaient à un doré beaucoup plus éclatant qu’à l’accoutumée, puis la réalité devient tout autre à la sortie. Le tout, hormis l’introduction, devient une gadoue grisâtre comme chacune des autres productions DC depuis l’annonce du DCCU (DC Cinematic Universe). Il suffit de comparer l’une des affiches avec des captures du film. La différence est flagrante et l’on ne peut que comprendre la déception des fans.


Hormis ce que nous avons évoqué plus haut, il n’y a guère plus à sauver du naufrage. Les meilleurs plans du film sont combinés dans la première bande annonce. Le tournage a subi un retournement drastique pour coller à l’esthétique globale du DCCU et le matériau final a perdu toute sa saveur et son intérêt.

Que laissons-nous donc couler dans ce naufrage à 200 millions de dollars ? Le scénario est vu et revu, l’imagerie est ratée, fade. Mais ce n’est malheureusement pas tout… Le premier opus avait filmé Wonder Woman comme une force de la nature, ici la chorégraphie rend l’action molle et, encore une fois, fade. Elle devait avoir face à elle Cheetah, sa plus grande némésis issue des comics à l’instar d’un Joker pour Batman. Elle est bien présente dans ce film, pendant 6 minutes sous sa forme féline. Cheetah est présentée comme une fusion entre une femme et un léopard. Elle est puissante, agile, sauvage et intelligente. Elle est tout ce que représente Wonder Woman, poussé à son paroxysme. Leur affrontement se doit d’être le point d’orgue du film. Toutes leurs confrontations au cours du métrage sont brusquement interrompues pour augmenter drastiquement la tension du combat final. Encore une fois, le soufflé retombe. Le design de Cheetah ne se dévoile que lors de cette confrontation et, on peut le dire sans détour, il est clairement raté… Les traits sont brouillons, la fourrure semble sans aucune texture et ses mouvements font trop lisses pour paraitre humains et crédibles. La tension bâtie pendant 2 heures retombe indubitablement au bout de 6 minutes de combat… Sur un film de 2h34, on se sent floué.
D’autant qu’au final (SPOILER) le méchant se trouve être un maniaque du pétrole devenu fou et ne représentant pas une immense menace non plus… Pourtant campé par un Pedro Pascal qui a le vent en poupe (The Mandalorian, Narcos, Game Of Thrones), son alter ego n’est pas intéressant. C’est l’archétype de l’homme prêt à tout pour réussir mais qui se repentira au dernier moment, empêchant le héros d’avoir à accomplir quoi que ce soit…

Finalement ce film est long, nous promet beaucoup pour un rendu bien terne. Certains films d’une durée équivalente le sont bien moins. Wonder Woman arrive en costume au tout début du film puis on ne la revoit pas avant au moins une bonne heure de film. L’idée ne semble pas mauvaise en théorie, les Spiderman de Sam Raimi avaient proposé bien plus de temps d’écran à Peter Parker mais il avait quelque chose à exploiter, des dilemmes moraux, une vie sociale compliquée… Pour Diana Prince c’est tout l’inverse ! Sa vie est parfaite, elle est adulée de tous, seul lui manque son petit ami, qu’on lui rend au bout d’une petite demi-heure ! Quel est l’intérêt ?

Notre acharnement s’arrête donc ici. En dépit de qualités existantes, un goût amer subsiste à la fin du visionnage du film. Plus qu’un mauvais film, c’est un métrage malhonnête. Il est étiré pour nous servir un récit réchauffé et insipide. Le sachet de thé du film de super héros moyen a été utilisé bien trop de fois, il ne reste cette fois-ci que de l’eau chaude dans nos tasses.

Victor Ribeiro

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