Selkirk, le véritable Robinson Crusoé – film d’animation
Robinson Crusoé n’était pas son vrai nom, non non. Le véritable héros corsaire, abandonné sur une île par ses co-équipiers, se nomme Alexander Selkirk (1676–1721). Écossais, querelleur, âpre au gain : on est bien loin de l’image d’Épinal de Daniel Defoe. Devenu marin en 1695 et corsaire en 1704, c’est de son plein gré, car il ne supporte plus les décisions du capitaine, que Selkirk décide de débarquer sur l’île Mas-a-Tierra, au large des côtes chiliennes. Il espère que d’autres marins suivront sa décision. Raté. Il espère qu’un navire viendra rapidement le chercher. Il attendra quatre ans et quatre mois.
Le film respecte strictement ces deux périodes de l’aventure, avec une longue introduction sur la vie en mer, conspuant l’avidité et l’arrogance de Selkirk. Épaulé par la raisonnable Gertrude (déguisé en matelot-coq Pupi afin de rejoindre son fiancé), il doit sans cesse affronter les sautes d’humeur tempétueuses du capitaine Bullock, couard et voleur. Seul détenteur des cartes du Cap Horn, Selkirk croit en sa chance, ce en quoi il aura raison. Mais sa capacité à monter les hommes les uns contre les autres en organisant des jeux d’argent sur le navire le rend insupportable : il est débarqué.
La deuxième partie — la vie sur l’île — se révèle bien plus poétique et douce : débarrassé de ses concitoyens, Selkirk se trouve et s’invente dans la nature. Ses animaux de compagnie, chèvres et chats sauvages (véridiques !) l’aident à supporter sa solitude. Après bien des peines, il sera sauvé.
Le véritable Selkirk avait donc raison : malgré l’horreur de l’abandon, il sera presque le seul à survivre, la quasi-totalité de l’équipage se noyant suite aux mauvaises décisions du capitaine. C’est ce dernier qui le sauve en 1709, et le ramène en Angleterre, où le récit de ses exploits est publié dans le journal. Bien que devenu célèbre, il ne renouera jamais totalement avec ses contemporains et vivra une vie d’ermite entouré d’animaux.
Techniquement parlant, malgré un début un peu poussif, le film est une réussite : l’animation est ingénieuse, bourrée d’effets. Il faut cependant un temps d’adaptation (lié sans doute à l’omniprésence des Studios Aardman et de leur Wallace et Gromit, dans le paysage de l’anime) pour adopter le rythme des images, l’enchaînement des scènes, parfois un peu hachées. Le décor du navire, de grande qualité, compense l’antipathie du personnage de Selkirk. Le summum du film se déroule bien évidemment sur l’île, où les scènes bucoliques provoquent un authentique ravissement.
Bref, foin de pirate, Selkirk est un divertissement sérieux et bien troussé : une jolie aventure maritime pour découvrir le travail de Walter Tournier, star de l’animation dans toute l’Amérique du Sud et au delà.
Mathilde de Beaune
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Selkirk, le véritable Robinson Crusoé
De Walter Tournier
Durée : 75 min.
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