Nuits Blanches de Visconti – sortie DVD
Du texte à l’image
Luchino Visconti, maître incontesté du néoréalisme italien, tend à rompre avec son propre style cinématographique, pour créer une œuvre poétique, loin du grand air. Le film, tiré d’une œuvre de jeunesse de Dostoïevski, Nuits blanches, permet au cinéaste de réunir à l’écran Marcello Mastroianni, Jean Marais et Maria Schell qui porte le film d’un jeu fin, juste et puissant à la fois.
La volonté esthétique que Visconti développe dans son film lui permet de modifier l’œuvre de Dostoïevski. Ainsi, par la création d’une unité de lieu (qui n’existe pas chez l’écrivain), il réussi à concentrer le drame. Bien que le décor soit urbain (aux rues étroites, à la reconstruction d’un canal et d’une passerelle pour passer d’une rive à l’autre), il donne l’aspect d’un huit clos oppressant, certainement dû à la récurrence des actions et des lieux.
Mais ce décor qui ne cache pas son côté artificiel, construit exclusivement en studio, sera peut-être la seule digression envers le texte original. En effet, les dialogues ne sont que très peu modifiés ; et malgré les reproches quant à leur « manque de poésie », l’esthétique de l’image, construite de noir et blanc redonne à ce chef-d’œuvre toute la poésie nécessaire.
L’histoire oscillant entre amour et pitié est teintée de réalisme et cruauté. « Mario arrive dans une ville qui ressemble à Livourne. Lors de sa première nuit, errant dans les rues désertes, il croise sur un pont une jeune femme en pleurs, Natalia. Tantôt extatique, tantôt accablée, cette dernière possède un comportement étrange et fascinant. La nuit suivante, Mario la retrouve au même endroit. Natalia lui avoue qu’elle fugue chaque nuit pour attendre, sur ce pont, l’homme qu’elle aime et qui lui a donné rendez-vous un an auparavant… »
Nuits Blanches peut certainement être considéré comme le film le plus humain de Visconti. Ce drame d’une sensibilité extrême, à la fin déchirante et réaliste, emprunte au registre théâtral (comme le déclare Visconti lui-même) la posture de l’attente.
Un bonheur restauré
Les Editions Carlotta offrent encore une fois la possibilité de voir (ou revoir) les chefs-d’œuvre cinématographiques, de grands cinéastes, soit épuisés depuis bien trop longtemps soit toujours pas distribués en France. Nous avions déjà eu la chance de trouver dans cette édition les films de cinéastes comme Belà Tarr, P.P Pasolini, F.Fellini… Aujourd’hui, c’est au tour de Visconti. Dans une version restaurée en HD, les amateurs peuvent apprécier tout le génie du cinéaste.
De plus, les Editions Carlotta proposent en supplément des bonus d’une très grande richesse et qualité. Dans un premier bonus, c’est une rencontre avec Piero Tosi, costumier de théâtre et collaborateur de L.Visconti de 1950 à 1976, qui dévoile les anecdotes entre les deux hommes. Puis Piero Tosi parle de Nuits Blanches, sa création, sa réalisation, ses personnages, ses décors et ses costumes, tout cela sur fonds de photographies d’archives personnelles. Un second bonus, c’est le critique et producteur Vieri Razzini qui se lance dans une brillante analyse du film et en français. Avant d’évoquer les procédés de production du film de Visconti, qu’il voulait différent des précédents.
Livia Colombani
Nuits Blanches
Un film de Visconti
Avec Marcello Mastroianni, Jean Marais et Maria Schell
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Sortie le 18 août 2010
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