La princesse de Montpensier
A l’époque des guerres de religion, la jeune Marie de Mézières est contrainte de délaisser son premier amour, le duc de Guise, pour épouser le prince de Montpensier. Ce dernier s’éprend de son épouse, ce qui constitue presque une violation de la loi tacite de l’époque du « tu n’aimeras point ta propre femme ». Son homme d’armes, le Comte de Chabanes, tombe de même sous le coup de la beauté de la jeune femme. De ce ménage à quatre s’opère une tragédie mise en parallèle avec le désastre politique qui annonce la Saint-Barthélémy.
L’ambition de Bertrand Tavernier est palpable : réutiliser les poncifs du cinéma hollywoodien, du western notamment, pour en faire un film héroïque à la française. Dans un scénario qui se concentre sur un épisode noir mais au caractère proprement mythologique de l’histoire française, les acteurs sont choisis en conséquence parmi le fleuron du film d’auteur français : Lambert Wilson conserve le rôle du pieu qui lui va si mal, mais qui a fait de façon très surprenante son succès dans Des Hommes et Des Dieux, Grégoire Leprince-Ringuet prête sa voix frêle au Prince de Montpensier, et Gaspard Ulliel fait les yeux maquillés doux à toutes les filles en sa qualité de duc de Guise. La bonne trouvaille de Tavernier a été, pour représenter la véritable figure héroïque de cette joute des orgueils, de préférer la ravissante Mélanie Thierry à l’omniprésente Léa Seydoux, qui aurait consacré le parisianisme du film.
La question du genre
Le choix du genre du costume est, selon le point de vue, soit extrêmement paresseux, soit infiniment périlleux. Paresseux parce que le film historique romancé comporte un attrait évident d’exotisme, et qu’il favorise une adhésion presque nostalgique vis-à-vis d’une période héroïque et virile perdue, où la brute courtoisie conduit les hommes à combattre au nom de la femme aimée. Les psychologies esquissées par Madame de La Fayette, dont le film s’est inspiré, sont campées avec un tragique grandiloquent et sans jamais questionner cette forme de représentation.
Le choix du costume est surtout périlleux parce qu’il est ici pris à la lettre, et le film tombe dans le premier travers du genre, qui est de laisser l’historicité envahir l’histoire. Le discours surcodé de références devient une signalétique de l’ancrage temporel de l’action. Par cette surabondance de citation du réel de même que par la diction stéréotypée des dialogues, le film perd l’illusionnisme qui servirait sa logique générale, et ne gagne pas en réflexion sur son support. Le décorum prime sur l’innovation. Et c’est tout le problème de ce film qui ne se pose jamais la question de sa nécessité. Il ressort toute l’imagerie d’une cour française des plus conventionnelles sans proposer de vision alternative. Puisque le propos du film est le fantasme d’une autre époque par la consécration d’une héroïne passionnée, qu’on nous offre un nouvel imaginaire, qu’on renouvelle les fantasmes ! Il aurait fallu pour ce faire une forme nouvelle, issue d’une réflexion sur la pertinence du film à costume et qui redonnerait un peu de vigueur à ce genre trop soumis aux conventions.
Oubliant de questionner sa raison d’être, la Princesse de Montpensier se contente de ressortir les frusques poussiéreuses de son genre avec une confiance inébranlable et se repaît de son fantasme conventionnel.
Viviane Saglier
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- Prix du meilleur jeune acteur (Raphaël Personnaz)
La Princesse de Montpensier
Un film de Bertrand Tavernier
Avec Mélanie Thierry, Lambert Wilson, Grégoire Leprince-Ringuet, Gaspard Ulliel et Raphaël Personnaz
Sortie le 10 novembre 2010
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