Hôtel Woodstock
Woodstock, vous vous souvenez? Eh bien, si vous vous souvenez, c’est que vous n’y étiez sûrement pas.
1969. Elliot est décorateur d’intérieur à Greenwich Village. Il traverse une mauvaise passe et doit retourner vivre chez ses parents. Il décide de reprendre en main la gestion du motel délabré de sa famille. Alors menacé de saisie, la famille n’a que quelques jours pour rembourser l’emprunt. Elliot est au bout du rouleau, tiraillé entre ses parents, sa vie à New York et son homosexualité inavouée. Alors que la situation est tout simplement catastrophique, il apprend qu’une bourgade voisine refuse d’accueillir un festival de musique hippie. Voyant là une opportunité inespérée, Elliot appelle les producteurs. Trois semaines plus tard, 500 000 personnes envahissent le champs de son voisin et Elliot se retrouve embarqué dans l’aventure qui changera sa vie pour toujours.
Hôtel Woodstock raconte comment tout cela fut possible. Le film ne montre rien du concert : ni Jimmy Hendrix et son Hymne National, ni Janis Joplin et son Try qui offre une myriade de bizarreries mêlées d’extravagances et d’un désir indolent, apathique et engourdi, ni Joan Baez et sa voix folk qui transcende la nature la sublimant pour l’éternité, ni les Who qui resteront culte et surtout unis bien des années après Woodstock. Le film est l’adaptation du livre, Taking Woodstock : A True Story of a Riot, A Concert, and A Life d’Elliot Tiber. Quelle histoire! Comme toutes les grandes choses cela a failli ne pas se faire. Un grain de sable et la mécanique s’enrayait, le festival n’aurait jamais eu lieu. Si tout ceci a été possible c’est certainement grâce à l’abnégation de Mickael Lang et des producteurs, mais aussi au courage d’Elliot Tiber qui a dû affronter ses parents, sa ville et toute la communauté, un défi qu’il a su relever avec classe.
Le réalisateur du Secret de Brockeback Mountain signe un nouveau film poignant, original et plein d’émotion qui captive le spectateur malgré quelques longueurs. Effectivement le film raconte l’avant Woodstock, le public attend avec impatience le concert, pourtant ce n’est pas le propos. On assiste à la mise en place du festival, mais aussi à l’arrivée des milliers de jeunes hippies qui n’attendent qu’une chose : se réunir pour écouter de la musique. La musique est sans doute le meilleur moyen pour faire coexister des milliers de personnes. Elle le fait pacifiquement. La politique ici n’est pas la question, elle est éludée, bien que certains personnages comme Billy (Emile Hirsch), un vétéran du Vietnam devenu presque aphasique, complètement chamboulé par une guerre qui le changea pour toujours, sont le symbole d’une Amérique malade mais qui sait rester festive en toute occasion.
Elliot Tiber est interprété par Demetri Martin qui livre une prestation juste et dans la retenue. Il arrive parfaitement à se mettre dans la peau d’un jeune juif homosexuel qui ne s’assume pas totalement. Malgré tout cela il reste à l’écoute des autres et de leurs problèmes. Mais Elliot Tiber n’attend qu’une chose : vivre Woodstock. Il veut partir de chez lui, il souhaite s’éloigner de l’oppression de ses parents, il souhaite démarrer une nouvelle vie, où il sera le seul à en choisir l’issue. Son père Jake Tiber (Henry Goodman) est un homme nerveux, impatient, un rien l’irrite, il est agité par une peur bleue de l’inconnu. Pourtant il aime sa femme malgré ses défauts et ses gestes, il aime son fils malgré son homosexualité. On découvre finalement un personnage haut en couleurs, loin de la caricature. La mère d’Elliot, Sonia est une femme méchante, acariâtre et hargneuse. Elle fait vivre à son fils et à son mari un enfer. Pleine d’amertume, elle est aigrie et désagréable, allant même jusqu’à cacher des milliers de dollars sans en avertir sa famille menacée alors d’expulsion.
La musique d’un film sur Woodstock est capitale. Malgré de grands absents comme Jimmy Hendrix ou Janis Joplin, on découvre avec émotion les morceaux du groupe Sweetwater ou bien le très beau Wooden Ships interprété par Crosby, Stills & Nash. Pourtant certaines erreurs ce sont glissées dans le casting musical à l’image de Bob Dylan ou des Doors.
Le film est un excellent divertissement malgré quelques longueurs, il permet de découvrir la face caché du plus grand festival de musique du siècle. Un film qui reste plein de poésie, mais à voir de loin et à prendre à la légère .
François SLAMA
Hôtel Woodstock
de Ang Lee
avec Demetri Martin, Inelda Stauton, Liev Schreiber, Emile Hirsch et Mamie Gummer
sortie le 23 Septembre 2009
durée: 2h00
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