“Grandir” donne la parole aux enfants du Mékong
Grâce à Enfants du Mékong, 60 000 enfants peuvent accéder à l’éducation. Pour ses 60 ans d’existence, l’association a souhaité nous faire rencontrer six de “ses” enfants. Ceux-ci ont en commun une immense soif d’apprendre. Le documentaire Grandir en témoigne.
Grandir : le défi d’un documentaire, le défi de la vie
Ce documentaire d’une cinquantaine de minutes nous emmène en Asie du Sud-Est, cette partie du monde que cette association sillonne depuis des dizaines d’années. Tout un réseau d’aides financières et de relations épistolaires a été étroitement tissé entre les enfants et des milliers de parrains en France.
Enfants du Mékong a souhaité financer Grandir à part pour que cela n’ait pas de répercussions sur les actions menées sur le terrain. La maison de production Aloest, la réalisatrice Jill Coulon ainsi que le couple de musiciens Yael Naim et David Donatien ont participé à l’aventure.
Un quotidien avec des combats et des rêves
Du Vietnam aux Philippines, en passant par la Birmanie, le Laos, le Cambodge et la Thaïlande, nous rencontrons Prin, Myu Lat Awng, Phout, Pagna, Thookolo et Juliet. Ils ont respectivement 6, 10, 14, 17, 21 et 34 ans. À eux tous, ils forment un seul personnage, l’être humain qui se développe à différentes étapes de la vie.
Ce documentaire, réalisé “à hauteur d’enfants”, rend compte du combat que doivent déjà mener ces enfants, qui veulent tout simplement grandir et devenir des hommes et des femmes.
C’est le cas de Myu Lat Awng qui, pendant 5 ans – soit la moitié de sa vie –, a déjà connu l’errance. Victime des conflits entre l’armée birmane et la milice Kachin, sa famille vient tout juste d’arriver dans le camp de déplacés de Palana. Le jeune garçon essaye courageusement de rattraper son retard scolaire car, sinon, “personne ne s’intéressera à toi”, comme lui dit sa maman.
En effet, aller à l’école change une vie. La réalisatrice Jill Coulon tient à souligner : “Derrière ce titre, je voulais montrer que cette action n’était pas réduite au simple fait de donner accès à l’éducation, mais que l’aide du parrainage agit sur la vie entière de l’enfant.”
La chance d’aller à l’école
Grandir nous dépayse, nous pousse au décentrement. À seulement 6 ans, Prin a déjà été confrontée à la dureté de l’exclusion de son peuple Jaraï. Elle est la seule de sa famille qui aura l’opportunité d’aller à l’école et d’apprendre le vietnamien. Son rêve : devenir institutrice pour que les Jaraï puissent s’instruire sans avoir à partir loin de leur famille.
Ce documentaire s’adresse aussi à tous les écoliers français qui peuvent avoir l’impression de se voir imposer l’école. En découvrant le combat de ces enfants, ils pourront prendre conscience que l’école est une chance et que l’éducation permet de devenir acteur de sa vie.
S’engager
Comme le rappelle très justement le musicien David Donatien, “s’engager pour l’enfance, c’est préparer le monde de demain”. Résolument engagé pour l’éducation, Grandir est également une série de rencontres destinées à nous faire changer de regard et à nous faire réagir en commençant à notre échelle avec des petites actions. C’est ce que souhaite la réalisatrice.
Ces petits bouts d’hommes et de femmes éprouvés par la pauvreté, l’exclusion ou encore le handicap savent nous rappeler la fraîcheur de l’enfance et nous faire partager leur joie de vivre. Malgré la barrière des langues, Jill Coulon a réussi à saisir tout cela. Elle nous confie, à la fin de l’avant-première au théâtre Max Linder, que c’est même avec Phout, la jeune sourde-muette de 14 ans au Laos, que la communication a été la plus naturelle.
Au-delà des souffrances : des victoires
La narration est scandée par des phrases d’une espérance profonde, des élans venant tout droit du cœur et par des traits d’humour. Les images et les plans où transparaît la sensibilité aiguë de Jill Coulon sont sublimés par la musique pure et hautement significative de Yael Naim et David Donatien.
Ce film est une véritable ode à la vie. La plus grande de tous, Juliet, qui a maintenant 34 ans, semble avoir bien saisi l’une des composantes essentielles de notre existence : “Grandir, c’est dépasser ses souffrances pour les transformer en victoires.”
Sixtine Molia
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