Copacabana – Isabelle Huppert
Elle est de tous les plans, ou quasiment. Rétive, inconséquente, libre, fofolle : Isabelle Huppert, alias Babou, crève l’écran dans Copacabana, le nouveau long métrage de Marc Fitoussi. Rien de surprenant. D’abord, c’est un film en forme de portrait, et un portrait très très payant : celui d’une quinqua d’aujourd’hui, un peu joueuse, un peu rêveuse, qui refuse les règles, oscillant entre précarité et désinvolture. Jamais amère, jamais rancunière. Jamais prête, non plus, à capituler : ainsi les accents exotiques des musiques brésiliennes, pour accompagner sa mouise quotidienne, plutôt que l’éclat triste des fanfares du Nord.
Et puis surtout, après une enfilade de rôles glaçants, la rousse comédienne surprend, tout simplement, en femme souriante et passionnée, bien décidée à regagner l’estime de sa fille, Esméralda, adepte implacable, elle, du “droit chemin” (Lolita Chammah, la propre fille d’Isabelle Huppert dans la “vraie” vie, qui s’en sort discrètement, donc bien). Même si, bien sûr, l’élan atypique de son personnage frôle la dérive et la douleur. De fait, coincée entre les briques uniformes de Tourcoing, en guise d’ultime rebondissement à sa course imprévoyante, et les ventes d’appartements en temps partagé à Ostende, en guise d’ultime sursaut “normatif” : on ne peut pas dire qu’elle choisisse la facilité la Babou, en refusant obstinément la ligne droite !
Reste que cette sorte de Bienvenue chez les Ch’tis femelle, version fureteuse et marginale, se veut optimiste. Tout aussi résolument. C’est peut-être là, d’ailleurs, dans cette drôlerie un rien appuyée sinon forcenée, que cette comédie douce-amère perd de son talent. De sa singularité. D’autant qu’elle est traversée par quelques lourdeurs scénaristiques (la relation entre Babou et les deux jeunes sdf, mais encore la critique du monde du travail, assez convenue, qui pointe à travers l’agressivité impitoyable des VRP). On lui préfère l’émotion perplexe et farouche, presque blessée, distillée par le comédien flamand Jurgen Delnaet : elle en dit autant, mais en creux, et ça repose un peu, sur l’apparente euphorie de Babou… Puisque tout, chaque fois, converge et s’en revient à elle.
Avec une nuance, néanmoins. Certes, la grande Isabelle étonne, voire captive tout le long. Pourtant, la vraie confirmation sinon révélation de Copacabana, c’est… Aure Atika, formidable de dureté et de soumission mêlées, dans le rôle pourtant peu flatteur de la “responsable des ventes”. Pas facile d’exister face à la “super Huppert” ? Hé bien si : à côté d’une Babou tout couleurs, c’est un véritable diamant noir !
Ariane Allard
Copacabana
De Marc Fitoussi
Avec Isabelle Huppert, Aure Atika, Lolita Chammah.
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Sortie le 7 juillet 2010
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