Ceux qui travaillent, travailler plus pour perdre plus
Le film d’Antoine Russbach s’inscrit dans la plus pure tradition du film social francophone, qui déploie des enjeux éthiques et tire à vue sur la société du travail.
Peut-être est-ce la présence à la barre d’Olivier Gourmet, personnage principal qui est quasiment de tous les plans du film. En tout cas, Ceux qui travaillent fait fortement penser aux premiers films de Luc & Jean-Pierre Dardenne. Pas tout à fait pour sa mise en scène, la caméra étant bien moins tumultueuse que chez les frères belges, mais par sa façon de suivre un individu pressé par des contraintes sociétales qui le pousse à flirter avec la monstruosité.
Dans le cas de Ceux qui travaillent, c’est un problème de fret maritime qui va pousser Frank, joué par l’acteur belge, à commettre l’irréparable. Son but était de faire réaliser de considérables économies à son entreprise, mais sur ce coup-là, soudain, sa direction ne peut plus le suivre. Licencié, Frank réalise soudain que sans son travail, il ne lui reste plus rien. Père de famille, marié, il a pourtant tout laissé de côté pendant des années afin de se consacrer à sa boîte. Délaisser ses proches serait apparemment beaucoup plus acceptable que de compter ses heures de travail.
La suite montre un Frank en train de tourner comme un lion en cage, si dépendant de la valeur travail qu’il finit par subir une crise de manque. Peu sympathique, difficile à aimer en raison de ce qu’il a fait par le passer, le personnage n’est jamais montré comme une victime à propos de laquelle il faudrait verser des larmes de pitié. Le réalisateur Antoine Russbach ne lui trouve pas d’excuses, tout en montrant que Frank n’est qu’un pion, remplaçable quoi qu’il en pense. C’est ce qui rend Ceux qui travaillent digne de la comparaison avec les films des Dardenne ainsi qu’avec Violence des échanges en milieu tempéré : il se soucie peu du confort du public et préfère frapper là où ça fait mal.
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