Brothers de Jim Sheridan
Parfaits représentants de la famille de classe moyenne américaine, Sam (Tobey Maguire) et Grace (Natalie Portman) sont séparés quand Sam est envoyé en Afghanistan. Celui-ci confie à Tommy (Jake Gyllenhaal), son frère tout juste sorti de prison, le soin de s’occuper de sa famille. Mais lorsque Sam est porté disparu et présumé mort, Tommy se rapproche dangereusement de Grace. Cette situation électrique explose définitivement quand Sam revient miraculeusement du front.
Difficile de vraiment s’enthousiasmer pour un projet comme Brothers avec à sa tête Jim Sheridan (réalisateur inspiré d’Au nom du père mais aussi coupable du récent Réussir ou mourir avec 50 Cent). Pourtant, c’est avec une pudeur et un sens de la retenue rare que le réalisateur nous entraîne dans les confins de l’american way of life, l’horreur, la tension, les failles du repas dominical. Ou quand les blessures d’un rescapé du Vietnam, l’omniprésence de la religion et les bonnes vieilles valeurs du pays rencontrent une réalité plus contemporaine, moins idéologique et plus humaine. Le drame qui se joue sous nos yeux n’a ainsi rien de salvateur ou de jouissif, le sursaut d’humanité est vain et l’Amérique reste l’Amérique.
Brothers marque aussi un tournant dans la carrière de son trio d’acteurs. Natalie Portman (Léon), Jake Gyllenhaal (Donnie Darko) et Tobey Maguire (Spider-Man) ont littéralement grandi sous les caméras, et ils atteignent ici une maturité inattendue. Les voir « jouer » aux adultes peut surprendre, mais rapidement, rien n’est plus logique pour le spectateur que de les envisager en jeunes parents. Et cette transition parfaitement orchestrée se joue à plusieurs niveaux, à des détails, d’une métamorphose physique pour Tobey Maguire à une simple couleur de cheveux pour Natalie Portman. Quel cadeau de voir ces acteurs s’épanouir ensemble, se pousser les uns les autres dans leurs derniers retranchements pour livrer au final des performances impeccables.
Ce drame du quotidien, de la banlieue et de l’Amérique sort sur nos écrans avec un très bon timing. Dans le contexte politique actuel, les questions qu’il pose n’ont jamais été autant d’actualité. Moins d’ailleurs sur la guerre elle-même que sur ses dommages collatéraux, de la croyance au désespoir. Brothers touche là où ça fait mal, mais sans morale ou message, juste avec ce qu’il faut de sensibilité et d’empathie pour que le spectateur soit touché, voire bouleversé.
Lucile Bellan-Julé
Brothers
Un film de Jim Sheridan
Avec Natalie Portman, Jake Gyllenhaal et Tobey Maguire
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Sortie le 3 février 2010
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