Black Swan – film de Darren Aronofsky
Tape à l’œil. L’expression est presque trop simple pour un film aussi boursouflé ! Elle a le mérite, néanmoins, d’être parlante, rappelant incidemment que dans le cinéma de Darren Aronofsky, les corps ont mal. Jusqu’à l’épuisement. Ou la folie. Une petite précision liminaire qui n’est pas inutile : Black Swan se présente explicitement comme le pendant féminin de The Wrestler, l’ouvrage précédent – également perclus de douleur – du réalisateur. Le second volet d’un diptyque dédié au sacrifice, en somme, ceci pour la beauté de l’art : le catch chez les garçons (volet 1), la danse classique chez les filles (volet 2, quand même, l’inverse aurait été plus audacieux !). En bref, à des années lumière des gracieux Chaussons rouges de Michael Powell – auxquels on ne peut pas ne pas penser – Darren Aronofsky vise l’électrochoc. C’est peu dire qu’il charge. Et… que l’on souffre. Aïe !
Or donc, voici la jolie Nina (Natalie Portman, impressionnante, pas seulement physiquement), ballerine du prestigieux New York City Ballet qui, par la grâce d’un directeur artistique aussi ténébreux que manipulateur (excellent Vincent Cassel), se voit confier le rôle principal du fameux Lac des cygnes. Gros défi : il s’agit d’incarner à la fois la pureté du cygne blanc et la sensualité du cygne noir. Toute d’innocence et de frustrations mêlée, cette perfectionniste monomaniaque saura-t-elle ouvrir la porte à ses démons sans se perdre ? On s’interroge… peu de temps ! A grands renforts d’effets appuyés, de jeux de miroirs et de masques, de rivalités mère-fille et de confrontations entre danseuses antinomiques, on comprend vite que la dualité est le nerf de cette guerre intime. Voire le dédoublement. Voire la schizophrénie. De fait, Nina brouille ses cartes entre réel et fantasmes. Daronofsky aussi. Et nous… on soupire.
Pourtant, a priori, le thème anxiogène de la métamorphose (jusqu’à la bascule finale) accompagne assez idéalement ce genre de cinéma, trouble, tourmenté, évidemment sexué. Après tout, Black swan – et son cortège de symboles, freudiens et/ou gothiques – n’est jamais qu’une nouvelle plongée, en forme de chute, dans la psyché d’une jeune fille en passe de devenir femme. Tada… Le hic, c’est que les tourments de la sexualité féminine, vus à travers l’œilleton de Daronofsky, sont tellement hystérisés sur grand écran que l’on a juste envie… de se frotter les yeux. A moins d’être totalement sidéré par la performance de Natalie Portman – ça sent l’Oscar à plein nez – ou agréablement chahuté par l’aisance de Mila Kunis, impossible de ne pas être agacé par les surlignages grossiers de la mise en scène (et de la musique, Tchaïkovski revisité par Clint Mansell, pfff…). Black swan, hélas, n’est pas un film complexe. C’est une expérience un peu ridicule. Et, pour finir, assez épuisante.
Ariane Allard
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A lire aussi sur Artistik Rezo :
– les films à voir en 2011
– Le Lac des cygnes au Théâtre des Champs-Elysées.
Black swan
De Darren Aronofsky
Avec Natalie Portman, Mila Kunis et Vincent Cassel
Sortie le 9 février 2011
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