Baaria – Giuseppe Tornatore
L’histoire de l’Italie du XXe siècle pour Giuseppe Tornatore, c’est une entreprise de contrefaçon gonflée aux dollars et aux images décaties d’un certain cinéma populaire. A l’instar de Baaria, petite ville de Sicile qui donne son nom au titre, et dont la reconstruction ad hoc dans un décor de simili Cinecitta confine plus à l’artifice touristique qu’à l’authenticité revendiquée. Un décor réduit à une avenue centrale délimitée par une église et une vieille villa bourgeoise, dont quelques plans aériens hasardeux trahissent le manque de perspective. C’est ici donc, que Giuseppe Tornatore compose sa grande saga familiale étendue sur trois générations des années 30 à aujourd’hui. Le film déroule ainsi les souvenirs légèrement romancés du réalisateur, de son enfance solaire aux premiers émois militants.
Dans son déjà surestimé Cinéma Paradisio, Giuseppe Tornatore avait au moins l’humilité de circonscrire l’expérience autobiographique à ses souvenirs cinéphiliques. Mais il s’agit ici d’habiller le retour sur soi d’un prétexte supérieur ; quelque chose d’un dialogue entre une narration classique (une chronique familiale) et des prétentions lyriques (une fresque historique). Le même dispositif qu’avait employé Marco Bellocchio dans le formidable Vincere, auscultant les mécanismes du fascisme dans l’intimité amoureuse du Duce. Mais il manque ce souffle à Baaria, dont la progression didactique annihile tous les enjeux (intimes et nationaux, donc).
Un peu victime de son ambition, le film balaye cinquante ans d’histoire dans un montage épileptique réduisant chaque période clé à un simple argument de serial. En attendant la résolution de sa fresque maousse dans un twist charriant le final de The Village, on passera sans transition du fascisme (en tout deux arrestations orchestrées par des carabinieri grotesques) aux balbutiements euphoriques du communisme. Et l’on n’oubliera pas la violente saillie contre les réseaux mafieux responsables du développement anarchique de l’urbanisme en Sicile.
Bref, un petit précis d’Histoire de l’Italie emballé avec l’âme d’un faussaire.
Romain Blondeau
Baaria – Giuseppe Tornatore
Réalisé par Giuseppe Tornatore
Avec Francesco Scianna, Margareth Madé, Nicole Grimaudo
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Sortie le 16 juin 2010
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