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Après l’océan, Eliane de Latour.

12 juillet 2009
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Un rêve de conquête.

 

L’un s’appelle Shad, l’autre Otho. Ils sont Ivoiriens et veulent conquérir l’Europe, des rêves de “guerriers” plein la tête. L’Espagne semble leur ouvrir les bras mais, pour Otho, arrêté par la police, l’affaire tourne court. Il rentre au pays, le visage plein de honte et Shad continue seul l’aventure. Pour l’un comme pour l’autre, c’est alors une autre histoire qui commence, chacun d’un côté de l’Atlantique…

 

A travers ces parcours croisés, Eliane de Latour nous pose de profondes questions morales : comment fuir la pauvreté sans perdre son intégrité ? quel est le sens de la réussite ? Pour qui, pour quoi ? Sans jamais prendre parti, le film nous donne à voir ce double destin, celui de deux « frères », deux compagnons d’armes, qui ont pris des routes opposées : l’un prêt à braver le code d’honneur de sa famille pour garder son intégrité et rester un « guerrier », l’autre prêt à tout pour épouser celle qui l’aime et rentrer en héros.

 

Autant vous le dire sans tarder : ce film est une véritable réjouissance, un bol d’air frais dans le paysage cinématographique formaté de l’été. Distribué dans seulement 15 salles, il mérite, à plus d’un titre, qu’on s’y arrête.

 

L’un des talents d’Eliane de Latour (et ils sont nombreux), c’est de traiter d’un sujet grave sans jamais se départir de la gaieté et du rire : tous ces visages ivoiriens nous réservent des facéties verbales franches, drôles et crues, qui font l’un des pures délices du film. Comme lorsque Otho rétorque à sa soeur Pélagie, en découvrant sa perruque blonde : ” tu penses qu’on peut être Marylin en haut et Carl Lewis en bas et que ça peut passer ?”.

 

Le film a un autre mérite, et non des moindres quand on s’intéresse aux imaginaires africains, trop souvent stéréotypés : c’est la richesse de son regard. Très loin de tout manichéisme, Eliane de Latour, anthropologue de formation, nous dit la difficulté de choisir dans un spectre d’intérêts parfois contradictoires, entre honneur, mère-patrie et liberté.

 

Côté interprétation, si le jeu de notre joyeuse bande ivoirienne est parfois approximatif (Pélagie particulièrement au début), il nous offre de beaux moments de franchise. La talentueuse Marie-Josée Croze est, quant à elle, tout simplement magistrale dans son rôle d’homosexuelle prête à tout pour aider Shad. Dans le rôle du père, Kad Merad, dans le business capillaire à Château-rouge, est savoureux. Tout comme Lucien Jean-Baptiste, alias Tétanos, compagnon d’infortune peu scrupuleux .

 

En bref, un film rafraîchissant qui ouvre les perspectives au-delà de l’Atlantique. Après l’Océan !

 

Actuellement dans toutes les bonnes salles de cinéma.

 

Sophie Gasol.

 

Sorti le 8 juillet 2009.

Réalisé par Eliane de Latour.

Avec Fraser James, Marie-Josée Croze, Djédjé Apali, Sara Martins, Lucien Jean-Baptiste, Kad Merad, Malik Zidi.

Durée : 1h 48.

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