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Année bissextile – Caméra d’or

16 juin 2010
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Agé de plus de 35 ans, le réalisateur Michael Rowe d’origine australienne a de quoi être fière et heureux. En recevant son prix lors de la cérémonie de clôture du festival de Cannes, il a rendu hommage au Mexique pour lui avoir permis de créer ses personnages de Laura (Monica del Carmen) et Arturo (Gustavo Sanchez Parra déjà vu dans Amour Chiennes de Alejandro Gonzalez Inarritu et Trois enterrements de Tommy Lee Jones). Vivant à Mexico depuis plus de quinze ans, cet ancien étudiant de littérature post-coloniale anglaise est déjà l’auteur de trois pièces de théâtre et passe donc pour la première fois derrière la caméra.

Son film Année bissextile divise le public. Lequel se prend pourtant d’affection pour le personnage principal, la pauvre et solitaire Laura âgée de 25 ans. Journaliste indépendante, travaillant de chez elle, elle mène une vie morne et monotone, accumulant les conquêtes d’un soir jusqu’à sa rencontre avec l’étrange et énigmatique Arturo.

Le pari était risqué, le résultat est à la hauteur. Filmer pendant 1h30 la vie d’une jeune femme pendant un mois dans un petit appartement de Mexico n’est pas une mince affaire. Autant dire que le réalisateur a posé dans tous les recoins possibles sa caméra, pour en saisir le maximum d’intimité et de voyeurisme qu’offre ce petit appartement. Mûrement réfléchies et par moment oppressantes et écrasantes, toutes les scènes offrent de longs plans-séquences à l’image fixe, dont le seul but est de suivre le regard et les mouvements de la jeune Laura. Peu importe les différents hommes qu’elle ramène chez elle ou la venue de son frère par moments, la volonté première du cinéaste est de filmer uniquement le parcours de la journaliste, laissant planer le suspens qui entoure son passé. Seuls quelques indices, comme une photo dans un cadre et un calendrier dont la date du 29 février est dessinée au crayon rouge, sont dévoilés aux spectateurs.

Ce huis clos ne manque donc pas d’en choquer certains pour ses scènes crues et difficiles, faisant écho au film chilien Tony Manero présenté il y a deux ans à la Quinzaine des réalisateurs. Il faut avouer qu’il y a un côté facile et gratuit à montrer ces ébats sexuels entre deux êtres obligés d’avoir recours à la violence physique pour échapper à leur triste quotidien. Malgré cela, on ne peut que ressentir de la peine et de la compassion pour ce couple dérangeant et ces amants aussi paumés l’un que l’autre. Elle, est obligée de s’inventer une vie et passe son temps à mentir à son entourage tandis que lui rêve d’une carrière d’acteur presque impossible. Ce que nous montre le réalisateur Michael Rowe est un état des lieux du Mexique : un pays où l’on se perd facilement avec ses personnages marginaux issus de communautés indiennes.

La relation entre ces deux individus est malsaine. Entre bourreau et victime, les rôles s’inversent au fur et à mesure jusqu’à ce que l’homme soit pris dans son propre jeu et se retrouve dans une situation d’abandon. Une manière de conclure qu’il n’y a pas au final de solution aux problèmes quotidiens et que la pauvre Laura est condamnée à poursuivre sa paisible existence.

Malgré certaines scènes difficiles mais installées tout en pudeur, le cinéaste Michael Rowe propose un film marquant sur une jeune femme en manque d’amour et au passé trouble. Une interprétation imposante portée à l’écran par la courageuse et téméraire Monica del Carmen qui offre un vrai rôle de composition au côté de l’acteur Gustavo Sanchez Parra.

Edouard Brane
www.cinedouard.com

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1 nomination au Festival MK2 Close Up 2011 :

  • Prix du meilleur 1er film étranger

Année Bissextile

Un film de Michael Rowe
Avec Mónica Del Carmen et Gustavo Sánchez Parra

Sortie le 16 juin 2010

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