Watchmen – film de science fiction de Zack Snyder
Publiée de 1986 à 1987 par DC Comics, la bande dessinée éponyme d’Alan Moore allait révolutionner tout un pan de la culture populaire américaine. Alors que le mercantilisme aseptisé se substitue à la magie des premières planches estampillées seventies, le scénariste des Watchmen livre une œuvre sombre aux imbrications multiples. Fable uchronique mise en image par le génial Dave Gibbons, la bande dessinée suit le parcours désenchanté d’un groupe de super-héros interdits d’exercer sous la présidence Nixon. Bientôt confrontés à la menace d’une troisième guerre nucléaire contre le bloc soviétique, les « Gardiens » vont devoir s’unir une dernière fois pour le « salut » de l’humanité. Jugé inadaptable par des armées d’aficionados fétichistes, le comic-book, ou garphic novel (ambiguïté sémantique inepte) accouche pourtant d’une œuvre cinématographique immense. Zack Snyder, passé maître dans l’art des films digérés (de son remake de Romero à l’adaptation de Frank Miller sur 300), réussit la parfaite transposition entre deux mediums.
Comme Robert Rodriguez sur Sin City, il prend le parti de l’adaptation littérale, et réinterprète quasiment toutes les cases du comic-book. Mais loin de l’exercice de style figé de ce premier, Watchmen impressionne par la fluidité de sa mise en scène. Décrié pour son utilisation à outrance des ralentis sur 300, Snyder insuffle à son dernier film une véritable dimension épique. Certains plans, servis par un cinémascope flamboyant, légitiment à eux seuls le passage de la bd au grand écran. Reprenant toute la mythologie Watchmen, Zack Snyder conserve l’univers alternatif créé par Alan Moore, et inscrit son récit dans une Amérique post-Vietnam en proie à l’anarchie. Plutôt qu’anachronique, l’œuvre de Snyder révèle la force universelle du comic original et l’intemporalité de ses thématiques.
Héros ou salauds ?
Fidèle au cadre, le réalisateur est aussi fidèle aux personnages dont il ne nous épargne aucune des ambivalences. A l’instar du Comédien, interprété par Jeffrey Dean Morgan, icône badass au nihilisme quasi suicidaire, pourfendeur des utopies et bras armé de l’idéologie Nixon. Du Hibou, Ozymandias ou Spectre Soyeux, Zack Snyder n’oublie aucune des caractéristiques, se permettant même -audace pour une oeuvre de studio- de révéler l’anatomie insolente du DR Manhattan. Comme Guillermo Del Toro, le réalisateur filme avec empathie ses freaks, enfants malades d’une civilisation déliquescente. Il maintient cette dualité constante, entre forfaits héroïques et psychés maladives, résumée dans la question « Who watches the watchmen ? ». Une mise en abyme de la société de contrôle, où les « Gardiens » du Temple en sont parfois les prédateurs.
Plus qu’une simple relecture, Snyder livre une œuvre personnelle, tout à la fois mélancolique, violente et contemplative. Conspué par son créateur original, qui refusa même d’être crédité au générique, « The Watchmen » s’impose pourtant comme le plus grand film de super-anti-héros.
Romain Blondeau
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Watchmen
De Zack Snyder
Avec Jackie Earle Haley, Patrick Wilson et Malin Akerman
Durée : 160 min.
Sortie le 4 mars 2009
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