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Rencontre avec Michael Lonsdale et Tahar Rahim

6 octobre 2011
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Les Hommes libres

Deux acteurs, deux générations, une belle rencontre. L’un déboule avec un charisme et une fulgurance rares dans le métier, l’autre conforte à chaque nouvelle prise de rôle sa densité, tout aussi facétieuse qu’inspirée. L’un sprinter — Tahar Rahim — l’autre coureur de fond — Michael Lonsdale : ils sont les atouts maîtres, et formidables relais, du nouveau film d’Ismaël Ferroukhi, Les Hommes libres (en salle actuellement).

Une drôle de course, voire de marathon, en effet ! De facture classique, voire appliquée, ce long métrage revient néanmoins sur le rôle peu connu – et assez haletant, pour le coup ! – qu’a joué la Mosquée de Paris, pendant la Seconde guerre mondiale, dans la cache de Juifs et de résistants. Tahar y incarne un ouvrier immigré, vivant du marché noir, qui peu à peu se métamorphose en combattant de la liberté, tandis que Michael se glisse, lui, dans la peau du Recteur Si Kaddour Ben Ghabrit. Deux itinéraires exemplaires, l’un fictif l’autre pas, sur lesquels ils reviennent, chacun,  avec souffle et sensibilité.

Tahar, le sprinter

« Après Un Prophète, j’ai eu beaucoup de propositions. Tout et n’importe quoi ! Pour accepter de jouer dans un film, il faut que je sois emballé. Car mon envie d’acteur, c’est d’aller le plus loin possible de moi. Et puis… Je ne reçois pas que des scénarios magiques (sourire). Or, le scénario d’Ismaël était assez fort. En fait, moi aussi, comme tout le monde, j’ai découvert cette histoire grâce à ce film ! Mon personnage, Younes, est représentatif d’un groupe, c’est le seul personnage de fiction, tout le reste est vrai. Ce qui est intéressant à jouer, avec lui, c’est qu’il est évolutif. On en a beaucoup discuté avec Ismaël, avant le tournage. Et puis, j’ai regardé beaucoup de photos de l’époque. En revanche, peu de films existants pouvaient m’aider. Mon préféré, sur des faits disons similaires, enfin sur la même période, reste L’Armée des ombres, de Jean-Pierre Melville. En fait, je suis originaire de Belfort et lorsque j’étais jeune, je m’y emmerdais tellement que j’allais tout le temps au cinéma ! C’est comme ça qu’est née mon envie de jouer. Je me souviens qu’à l’époque, aussi, je rêvais de voyager à travers le monde… Aujourd’hui, mon métier me permet de combiner tout ce que j’aime ! Ainsi, là, j’ai deux films qui sortent en même temps, celui d’Ismaël et celui du cinéaste chinois Lou Ye. Un peu plus tard, il y aura aussi celui de Jean-Jacques Annaud, L’Or noir, et ça, bien sûr, ça ne se refuse pas ! Quatre mois de tournage, avant et pendant la révolution, l’automne dernier, en Tunisie… J’avais l’impression d’être au bon endroit au bon moment (large sourire) ! »

Michael, le coureur de fond

« Une petite précision, d’abord, qui a son importance, et pour l’histoire du film, et pour le public : si Kaddour Ben Ghabrit, le personnage que j’interprète, est un recteur, pas un imam. Sinon, ce qui est étonnant, c’est que ma mère, née en Algérie, l’a connu quand elle était jeune. Et puis, elle l’a retrouvé quand il a été nommé à Paris ! Elle m’en avait donc parlé… Reste qu’au départ, lorsque l’on m’a proposé ce rôle, j’ai été surpris. J’ai même résisté : pour moi, il fallait que ce soit un acteur musulman qui l’incarne ! Puis j’ai accepté, mais c’était risqué : j’ai beau avoir appris quelques phrases, on sent bien que je ne suis pas arabe. Mais si vous me dites que je suis crédible, alors ça va (sourire reconnaissant). Cela dit, il parait que Ben Ghabrit parlait le français couramment… Pourquoi ai-je accepté finalement ? Pour les mêmes raisons qui m’ont fait accepter le rôle du moine, le frère Luc, dans le film de Xavier Beauvois (Des Hommes et des Dieux). Je suis content, à travers ces personnages et ces films, de pouvoir montrer que les Arabes ne sont pas tous des assassins ! D’ailleurs, aujourd’hui, les gens dans la rue m’arrêtent pour me dire “merci” ! Cela fait du bien, et d’autant plus que, longtemps, j’ai joué des rôles de méchants au cinéma (nouveau sourire) ! Je dois dire que j’ai besoin de faire ce métier pour sortir de moi-même. Enfant, j’étais anxieux, timide, réservé… J’étais un enfant adultérin et… Mon grand-père l’avait d’ailleurs été lui aussi, c’est une tradition familiale (sourire amusé) ! Donc, j’ai voulu jouer pour me délivrer de moi-même, car je respire mieux quand je suis quelqu’un d’autre. J’ai été baptisé à l’âge de 22 ans et mon père spirituel, un Dominicain, m’a d’ailleurs dit, un jour : “Vous ferez au public des confidences que vous ne ferez jamais dans la vie”… »

Propos recueillis par Ariane Allard

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Les Hommes libres

Film d’Ismaël Ferroukhi

Avec Tahar Rahim, Michael Lonsdale et Lubna Azabal

Sortie le 28 septembre 2011

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