Zeklo : “J’aime cultiver la tradition en m’appropriant ses codes”
Entre graffiti, peinture, et tatouage, Zeklo est un artiste qu’on peut qualifier de polyvalent. Il varie les inspirations et les styles en passant de la bande dessinée au préraphaélisme. Zeklo nous partage son expérience et se confie sur son parcours en tant qu’artiste autodidacte.
Peux-tu nous parler un peu de toi et de ton parcours ? Comment et pourquoi as-tu commencé à dessiner ?
Je suis un artiste de 32 ans originaire du Sud de la France, je vis à Bruxelles en ce moment. Je suis issu d’un milieu plutôt prolétaire, sans vraiment de références en art dans mon cercle proche. Je suis un produit des animés et des bandes dessinées de l’époque, comme beaucoup d’enfants de ma génération. Dragon Ball, entre autres, fut une grosse claque et c’est notamment en copiant ses personnages que je me suis lancé. Au lycée je me suis plongé dans le graffiti, inspiré par les vétérans de mon secteur et par le biais de quelques camarades de classe. Je suis autodidacte, je n’ai pas de références académiques, techniques ou théoriques. C’est vraiment par le prisme du graffiti, au départ, que je me suis ouvert à l’art en général. J’ai rencontré de nombreuses personnes, de milieux et pratiques variés, qui m’ont motivé et inspiré dans mon parcours. À 20 ans, poussé par l’envie de sceller une page de mon histoire, je me suis fait un gros tatouage plein de couleurs. Quelques mois plus tard, j’ai décidé de me lancer là-dedans. Depuis, je suis cette créature hybride.
Du graffiti, à la peinture sur toile, au tatouage, ton travail est très éclectique. Comment définirais-tu ton style ? Quelles sont tes différentes inspirations ?
J’essaie toujours d’adapter mon style afin d’exploiter au mieux les outils, supports et contraintes du médium choisi, c’est probablement ce qui rend mon style éclectique. J’aime cultiver la tradition en m’appropriant ses codes. Les références classiques sont très inspirantes pour moi : les graffiti old school sur les trains, le tatouage traditionnel américain, le baroque, etc. C’est l’univers qui entoure un médium qui le rend attractif pour moi. Dans le graffiti, la peinture est facultative, c’est l’ambiance et l’action en soi qui comptent à mes yeux. Pour mes peintures, je suis très inspiré par le côté impulsif de certaines bandes dessinées et les classiques des grands maîtres. En ce moment, le préraphaélisme, les sculptures antiques, l’art primitif et le Moyen Âge m’inspirent beaucoup. J’ai fini par remarquer que j’aime cloisonner mes différentes pratiques. Au fil des années, j’essaie de réconcilier mes différentes personnalités.
Tu peins beaucoup de visages, qui sont ces personnes qui t’inspirent ?
Je vais parfois dessiner mes proches, d’autres fois ce sont des inconnus qui m’inspirent. Il y a des gens qui ont des expressions et des visages inspirants à dessiner. J’ai du mal à définir pourquoi je vais choisir une personne en particulier. Pour ma toute dernière série de peintures, j’ai décidé de travailler quasiment exclusivement autour d’une seule et même personne. J’apprécie beaucoup, chez les vieux peintres que j’admire, que tous les personnages se ressemblent. Ils travaillaient souvent avec le même modèle, j’ai donc voulu y faire référence.
Qu’aimes-tu dans le fait de t’exprimer sur différents supports ? Y a-t-il un autre support que tu aimerais exploiter dans le futur ?
Faire tous les jours la même chose, ça transformerait mes passions en un travail contraignant. Une partie de l’innocence initiale est déjà perdue depuis que je vis de mon art. Jongler entre toutes ces choses me permet de garder la motivation sinon je m’ennuie vite. Chaque option m’apporte des plaisirs et sensations bien distinctes, c’est une question d’équilibre pour moi. Cette polyvalence me disperse aussi, j’essaie donc de limiter les nouveaux supports pour le futur mais si j’avais le temps, la céramique ou les arts martiaux seraient ma prochaine destination.
Tu voyages beaucoup, y a-t-il un endroit qui t’inspire particulièrement ? Un pays où tu aimerais aller dans le futur ?
Question difficile… Beaucoup d’endroits sont inspirants pour des raisons bien différentes mais les Cévennes reste un territoire indétrônable dans mon cœur. Ces derniers temps, je m’intéresse particulièrement à l’Asie de l’Est : Hong Kong, la Corée du Sud, etc. Ces différentes cultures et ces grandes villes bouillonnantes qui ne dorment jamais sont très inspirantes pour moi. Il y a énormément d’artistes très talentueux dans cette partie du monde. Il reste des tonnes d’endroits que je souhaite visiter ! Dans le futur, j’aimerais aller au Japon.
Tu fais partie de l’association “Line Up”, peux-tu nous en dire un peu plus sur ta démarche et tes projets en lien avec l’association ?
Suite à un concours, je me suis retrouvé quelques temps en résidence dans leur QG. J’ai travaillé sur un projet d’exposition sur place, en compagnie de Franck Noto alias Zest qui a partagé son atelier avec moi. Il m’a beaucoup inspiré dans ma démarche, on a bien accroché humainement et artistiquement et ma résidence a duré bien plus de temps que prévu au final ! On s’entend très bien avec Line up, l’ambiance y est familiale, j’ai pu travailler sur des projets très sympas en collaboration avec eux. En tant qu’artiste, ça me permet de travailler dans de bonnes conditions tout en conservant ma liberté d’expression. Le fait qu’il y ait des artistes actifs au sein de la structure leur donne une vision plus réaliste que beaucoup d’autres n’auront pas. Maintenant que j’habite à Bruxelles, on travaille forcément beaucoup moins ensemble, je les salue !
Peux-tu nous parler de tes projets en cours et/ou à venir ?
Actuellement, je travaille sur une exposition que j’ai quasiment achevée à l’heure où j’écris. Elle se fera à la Villa Tschaen en septembre si tout va bien. J’ai travaillé sur une série de toiles de la même gamme de couleurs et j’en suis très satisfait. J’ai réussi à mélanger encore un peu plus mes identités et mes différents traitements graphiques en une seule entité. J’ai hâte d’avoir des retours sur ce travail ! En ce moment, je travaille également sur un projet de livre, avec mon collectif “TPA”, qui devrait être terminé d’ici un an minimum. C’est un très gros pavé qui réunira 25 ans d’histoire.
Quel est le projet rêvé que tu aimerais concrétiser dans le futur ?
Dans un futur proche, j’aimerais passer plusieurs mois en Asie pour concrétiser une résidence, suivie d’une exposition là-bas et agrémentée de quelques façades à peindre, ce serait un bon début !
Vous pouvez retrouver les créations de Zeklo sur ses réseaux sociaux, Facebook et Instagram.
Propos recueillis par Camille Bonniou
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