Yohann Grandsire : « Avec une œuvre, tu voyages à chaque fois »
Rencontre avec Yohann Grandsire, ancien danseur et chorégraphe, aujourd’hui créatif multi-support et conseiller en identités visuelles et images de marques. Jeune collectionneur, il possède déjà le travail de plusieurs artistes dans sa collection variée (peinture, photographie, dessin et sculpture).
Quelle a été votre première rencontre avec l’art et comment avez-vous commencé à collectionner ?
Dans ma famille, on a toujours été collectionneur. Moi j’ai commencé il y a une quinzaine d’années. Ma première œuvre était une peinture d’un ami, le petit ami d’une danseuse avec laquelle je travaillais. Une peinture abstraite.
Quelle est votre motivation pour acheter des œuvres d’art ?
Ma motivation est double. D’abord, soutenir la créativité et soutenir des artistes car ils créent le monde et l’enjolivent. Ils nous donnent des pistes de réflexions sur un avenir à construire. Ensuite, j’ai besoin d’être entouré de « belles choses » et d’objets qui me racontent des histoires. À chaque œuvre c’est une histoire différente : comment j’ai connu l’artiste, comment je suis tombé sur cette œuvre et qu’est-ce qu’elle m’a dit. Je n’achète jamais par spéculation, j’achète toujours par coup de cœur, ce qui me permet de n’être jamais déçu et de ne jamais regretter, parce qu’on ne peut pas regretter une histoire. Elle existe, elle te forme et elle te permet de voir l’avenir autrement.
Quel est le fil rouge de ta collection ?
Je ne l’ai découvert qu’une fois ma collection vue par d’autres. Lors de ma première exposition, j’ai alors réalisé que le fil rouge était le mouvement et l’émotion. Quand tu es face à une abstraction, ou à l’imaginaire d’artistes, il y a forcément une émotion et il y a forcément un mouvement entre les différentes couleurs et espaces, qu’ils soient vides ou pleins. Certains achats sont aussi motivés par mon passé de danseur, d’où le mouvement, et comme je suis danseur contemporain de formation, je privilégie l’émotion à la structure. C’est pourquoi j’ai acheté, entre autres, une photo de Jeremy Kost, une photo qui est très inspiré par Le Faune Barberini [au Louvre].
Qu’avez-vous acheté dernièrement ?
Le travail en céramique d’Étienne Pottier, celui du peintre et dessinateur Axel Roy, et une photo de Benoit Barbagli.
Avez-vous besoin de rencontrer l’artiste ?
C’est essentiel parce que les œuvres nous parlent beaucoup plus quand on sait ce que l’artiste a voulu dire, surtout en art contemporain. Le contact avec l’artiste, c’est aussi le contact avec le créateur. La façon dont il bouge et comment il raconte l’histoire sont aussi importants. Alors quand on pas l’occasion de rencontrer l’artiste, il faut que le galeriste puisse pallier l’absence et transmettre ce récit, décrire cette personnalité.
Quels sont vos conseils à quelqu’un qui voudrait commencer sa collection ?
Mon conseil est très simple : se laisser guider par l’inspiration, ne pas se donner de limites. Si on a vraiment envie d’une œuvre et qu’elle est inabordable, on peut souvent payer en plusieurs fois. Une fois l’œuvre chez toi, tu voyages tout le temps. Avec un billet d’avion, tu voyages une seule fois ! Une fois l’œuvre chez toi, tu te racontes des histoires ou tu replonges dans ce que t’as vécu, et également à l’intérieur de l’œuvre ton voyage varie selon ton humeur du jour. Il vaut mieux manger des pâtes pendant un mois que de regretter de ne pas s’être offert cette occasion de voyage perpétuel.
Quel artiste nous conseillez-vous de suivre ?
Axel Roy, que j’ai rencontré au Salon de Montrouge et que je suis depuis plus de deux ans. D’abord dessinateur, il peint aussi mais il travaille la peinture comme le dessin. Il commence par le sombre pour arriver au clair, ce qui donne des couleurs magnifiques. Ce qui est intéressant est aussi son rapport au monde et au vide que l’on retrouve dans son travail. Du coup, la réserve est aussi importante que la partie peinte.
Propos recueillis par Stefano Vendramin
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